Justice League – Faute d’un clou – Avis +/-

Editeur : Urban Comics

de Alan Davis

– Ce rassemblement est illégal. S’entretenir avec un Alien est un crime. Dispersez-vous, ou vous serez arrêtés.

Faute d’un clou l’on perdit le fer,
Faute d’un fer l’on perdit la monture,
Faute d’une monture l’on perdit le héros,
Faute d’un héros l’on perdit la bataille.
C’est ainsi que l’on perdit un royaume, faute d’un clou.

De ce poème écrit en 1651 par George Herbert, Alan Davis a tiré une uchronie dans le cadre du DC Universe. Cette fois, c’est un clou planté dans une roue qui empêche un couple de fermiers du Kansas nommés Jonathan et Martha Kent de prendre la route. Ils restent donc chez eux, ne remarquant pas ce qui au loin tombe du ciel.

Cette Terre ne connaît donc pas de Superman. Néanmoins, les super-menaces sont traitées avec efficacité par la JLA de ce continuum : Batman, Aquaman, Atom, Wonder Woman, Flash, Hawkwoman, Green Lantern et Martian Manhunter veillent sur ce monde parallèle. On remarque peu de différences excepté qu’Hawkman est mort au combat, alors que Green Arrow est devenu un infirme haineux envers les Métahumains. Par contre la société ne bénéficie pas de la présence d’un super-héros charismatique. Les Métahumains sont regardés avec défiance et suspectés d’être tous des Aliens en puissance. La JLA ne comporte-t-elle pas au moins deux Extraterrestres ? Et qu’en est-il de Batman ? Humain ? Alien ? Démon ?

La méfiance est générale. Lex Luthor vient d’être réélu maire de Métropolis dans l’allégresse générale et sous la surveillance vigilante de la police métropolitaine équipée d’armes fournies par la société LexCorp. Il a réussi à fonder un mini-état policier hi-tech, interdisant la présence de Métahumains à Métropolis (une ville qui n’a jamais bénéficié de super-héros local) et bénéficiant d’un conseiller avisé en affaires métahumaines, un expert nommé… Jimmy Olsen.

À la JLA certains soupçonnent cette paranoïa grandissante d’être orchestrée par un super-ennemi. Pour l’instant, il s’agit de contrer cette offensive médiatique. Aussi, Green Lantern propose de s’adresser à une journaliste compétente dénommée Loïs Lane.

Il est précisé que ces événements ont lieu 24 ans après la mésaventure des Kent avec leur pneu. Dans les comics actuels, Superman a toujours trente ans. Ceci explique que le rôle de Flash est tenu par Barry Allen et celui de Green Lantern par Hal Jordan. Cela nous permet de retrouver la Doom Patrol, les Metal Men et les Outsiders (ah le bon vieux temps des éditions Aredit !). Les événements relatés dans Le Clou se situent donc logiquement avant l’épisode Crisis qui vit la disparition des mondes parallèles (Marv Wolfman, je te hais !).

Alan Davis s’est permis de réaliser un elseworld où Superman brille par son absence. Celle-ci se fait cruellement sentir. Alors que super-héros et super-vilains sont éliminés les uns après les autres, la Terre est isolée par un champ de force. La paranoïa de Darkseid devant ce phénomène lui fait déclencher une guerre à l’échelle cosmique occupant tous les Green Lantern disponibles, tandis que celui de la Terre est bloqué par le champ de force qui de plus absorbe le pouvoir de son anneau. Cependant, un objet est bien tombé du ciel sur le Kansas. L’enquête de Loïs Lane la conduit dans un centre de recherche secret du gouvernement situé dans une petite ville nommée Smallville.

Le Clou démontre qu’Alan Davis est un auteur complet, faisant preuve aussi bien de son talent graphique que de son habileté scénaristique, n’hésitant pas à dépecer des héros, fournissant fausses pistes et dénouement inattendu, avec un super-vilain ultime auquel on ne s’attendait vraiment pas. Datant de 1998, le premier volet a été suivi par Another Nail en 2004.

Alors que la guerre entre Apokolips et New Genesis atteint un niveau apocalyptique, nous assistons à une transformation spectaculaire d’un héros de Jack Kirby. La lanterne principale d’Oa perd de son pouvoir, de même que la Source de New Génésis. Les Green Lantern et les New Gods voient leurs pouvoirs menacés de disparition. Batman, marqué par la tragédie, croit voir à Gotham la marque du Joker trépassé dans le premier cycle. Les super-héros subissent une offensive d’un trio de super-attaquantes en la personne d’Orchidée Noire, Star-Saphir & PowerGirl qui poursuivent un but mystérieux. De plus, des portes s’ouvrent dans le temps et l’espace. Les super-héros se voient ainsi confrontés à des dinosaures, comme à divers héros et vilains de différentes époques (bon nombre de célébrités de DC comme le sergent Rock et le Baron Rouge font de brèves apparitions). Lorsque même Deadman panique, il est évident qu’il y a un problème.

L’intérêt d’Alan Davis pour les terres parallèles s’était manifesté chez Marvel dans la série Excalibur (1988-1998). Il a dû prendre goût auprès de Chris Claremont à la redéfinition d’un univers classique. Pour Another Nail l’impact du premier volet s’est atténué. Mais on trouve toujours de bonnes idées comme la manipulation des super-héros par les combattants occultes du bien.

Curieusement, si Le Clou et Un autre clou se situent avant Crisis (qui a vu la disparition de Barry Allen présent dans l’album), on voit apparaître dans le premier volet Jade (Jennifer-Lynn Hayden), la fille d’Alan Scott le Green Lantern de Terre II, qui devrait logiquement se trouver sur la Terre parallèle. Une anomalie semblable se trouve dans le deuxième volet avec l’apparition de Power Girl, la fille du Superman de Terre II. Logiquement, elles devraient être absentes de cet univers. Dommage, cela aurait pu être parfait.

Fiche technique

Format : album
Pages : 312
Scénario et Dessin : Alan Davis
Encrage : Mark Farmer
Couleurs : Patricia Mulvihill, Heroic Age et John Kalisz
Épisodes originaux :  The Nail #1 à 3, JLA Another Nail #1 à 3
Traduction : Jérémy Manesse
Lettrage : Gaël Legeard, Maurice Denoal et Stephan Boschat (Studio Makma)
Adaptation graphique : Cerise Heurteur
Éditeur : Urban Comics
Collection : DC De luxe
Sortie : 9 juin 2023
Prix : 30 €