Personne – Avis +

Présentation de l’éditeur

Personne est le portrait, en vingt-six angles et au centre absent, en vingt-six autres et au moi échappé, d’un mélancolique. Lettre après lettre, ce roman-abécédaire recompose la figure d’un disparu qui, de son vivant déjà, était étranger au monde et à lui-même. De  » A  » comme  » Antonin Artaud  » à  » Z  » comme  » Zelig  » en passant par  » B  » comme  » Bond (James Bond)  » ou  » S  » comme  » SDF « , défilent les doubles qu’il abritait, les rôles dans lesquels il se projetait. Personne, comme le nom de l’absence, personne comme l’identité d’un homme qui, pour n’avoir jamais fait bloc avec lui-même, a laissé place à tous les autres en lui, personne comme le masque, aussi, persona, que portent les vivants quand ils prêtent voix aux morts et la littérature quand elle prend le visage de la folie.

Avis d’Enora

Dans Personne, le cinquième roman de Gwenaëlle Aubry qui vient de recevoir le prix Femina, l’auteur parle de son père atteint d’une psychose maniaco-dépressive. Partant des récits de cet homme sur sa maladie, elle suit son injonction écrite au crayon dans une marge, « à romancer ». Car c’est par le biais des mots qu’il tente de ressaisir sa « multitude intime ». Avec vingt-six chapitres déclinant l’alphabet, elle essaie de recomposer le Moi éclaté de son père, construisant autour de cette déstructuration, de ce morcellement, un genre de chambre d’écho avec ses souvenirs, ses ressentis. Chaque chapitre est une sorte de masque, un rôle que son père a joué dans la recherche perdue de sa propre identité, avec de la part de la jeune femme une tentative pour comprendre et peut-être aussi, pardonner, se pardonner et aimer…

Avec une écriture ciselée, toute en retenue et en émotion, Gwenaëlle Aubry offre un double regard sur la psychose, celui d’un homme qui se perd dans la folie, le sait et en souffre mais aussi celui de la famille qui oscille entre incompréhension, peur et douleur. Personne est un substantif qui signifie à la fois le nom de l’identité et une place vide, celle du Moi pour cet homme, mais aussi celle d’un père pour sa fille. Rarement il nous a été donné de lire un texte aussi riche et bouleversant sur les effets dévastateurs de cette maladie mentale, avec à la fois une vision intérieure et extérieure. Un prix Femina largement mérité.

Fiche technique

Format : broché
Pages : 159
Editeur : Mercure de France
Sortie : novembre 2009
Prix : 15 €