Crimes à l’affiche – Avis +/-

Résumé

En 1934, Josephine Tey est une star du West End londonien.
Ses pièces se jouent à guichets fermés, mais cette veuve discrète préfère vivre loin des feux de la rampe. Pourtant, lorsqu’elle se rend à Londres pour célébrer la dernière de son immense succès théâtral Richard de Bordeaux, elle se trouve bien malgré elle mêlée à une affaire de meurtre. Heureusement pour Josephine, l’inspecteur de Scotland Yard Archie Penrose, en charge de l’enquête, est un ami de longue date.

Il devra se résoudre à l’impensable: son amie est la principale suspecte. ou la prochaine victime!.

Avis de Marnie

Premier livre d’un nouvel auteur britannique, Crimes à l’affiche est un roman vibrant en forme d’hommage aux grandes dames du crime des années 30, principalement Agatha Christie. Paradoxalement, ceux qui apprécient le talent de la vraie Josephine Tey, auteur de romans policiers en vogue de l’entre-deux guerres, seront déçus puisque Nicola Upson n’utilise ni son style, ni ses points forts. Non, nous sommes bien dans l’univers de la grande Agatha Christie avec ses études de caractères, une lente évolution d’une intrigue à multiples ramifications et fausses pistes, pour aboutir à une solution que personne ne pouvait trouver vu… que nous ne connaissions rien de la motivation de l’assassin.

D’ores et déjà, évoquons ce qui fâche : il existe en ce moment une mode dans le genre policier, celle d’utiliser de vraies personnalités historiques et de leur mettre soudain entre les mains un crime à résoudre. Le résultat peut se révéler brillant, réussi, notamment quand l’auteur joue avec le second degré, ou même place son héros au coeur d’une enquête totalement imaginaire. Le problème survient, et c’est le cas ici, lorsque l’héroïne nous parle d’évènements qui se sont réellement déroulés dans son existence liés à des éléments imaginés et qu’en fait, on ne sait plus démêler le vrai du faux. C’est seulement dans la post-face, que Nicola Upson remet quelques pendules à l’heure (et malheureusement pas toutes) tout en précisant un peu bizarrement que la vraie Josephine Tey aurait détesté ce mélange entre la véracité du récit et les inventions de l’auteur…

Ainsi, l’acteur principal de la pièce semble être un personnage sorti directement de l’imagination de Nicola Upson. Or, elle nous précise avoir longuement interrogé le très célèbre sir John Gielgud (qui fut presque aussi connu que Laurence Olivier) acteur shakespearien (dont elle a aussi lu les mémoires)… et qui devint célèbre en interprétant le rôle principal de la fameuse pièce de Josephine Tey dont il est ici question… Au vu des éléments « véridiques » que l’auteur révèle (soit une homosexualité discrète), nous ne savons pas vraiment qui est qui, ce qui est imaginaire, et pourquoi alors lui avoir changé son nom.

Cette longue digression semble peut-être anecdotique au vu des qualités du texte, cependant, nous nous surprenons à « décrocher » de l’histoire à cause de questions que nous nous posons, et ce n’était certainement pas le but recherché par Nicola Upson. S’agissant des points positifs, nous pouvons affirmer que ce roman n’en manque pas ! Tout d’abord, l’écriture utilisée est celle que nous trouvons dans les livres des années trente, ce qui apporte un petit aspect surrané en forme de clin d’oeil très recherché et agréablement sympathique. Ensuite, viennent les personnages, avec un nouveau héros, soit l’inspecteur Archie Penrose de Scotland Yard, partagé entre son amour mal dissimulé qu’il éprouve pour Josephine Tey et sa culpabilité liée au fait qu’il était le meilleur ami de son fiancé mort pendant la guerre de 1914. Josephine Tey est décrite comme une jeune femme dont la notoriété a très peu changé sa manière de vivre sachant aussi bien fréquenter les gens connus que continuer de mener une existence tranquille en Ecosse.

Toute une galerie de portraits défilent devant nos yeux, (l’effet est très visuel avec cet auteur) nous montrant peu à peu des facettes joyeuses, tristes, généreuses, égoïstes… ou inquiétantes. Le seul point commun entre tous, et c’est aussi le grand point fort de Nicola Upson qui rattrape ainsi la lenteur un peu lourde et les maladresses de son récit, c’est l’omniprésence de la Grande guerre qui reste dans toutes les mémoires. Chacun a été touché d’une manière ou d’une autre. Quand ce n’est pas la mort qui a emporté leurs proches, ce sont des souvenirs traumatisants qui les obsèdent. Quand ils sont trop jeunes pour l’avoir vécue, ils sont victimes des conséquences ou utilisés pour réparer les lourdes erreurs qui ont transformé leur vie à jamais. Et comme nous sommes en 1934, personne ne veut croire… que bientôt cela pourrait recommencer. Toute cette évocation est franchement remarquable, intense, dramatique et passionnante.

Ce premier roman est donc intéressant à plus d’un titre. Riche en détails de couleurs, de modes, d’habitudes dans un Londres pétillant que nous fait revivre avec une vraie passion l’auteur, il se perd un peu dans une intrigue tarabiscotée, prouvant que Nicola Upson a certainement voulu un peu trop en faire pour lancer cette première enquête… Nous attendons son second thriller historique pour savoir si ce sera le coup de maître attendu au vu du talent qui se dessine ici !

Fiche Technique

Format : poche
Pages : 411
Editeur : 10/18
Collection : Grands détectives
Sortie : 2 avril 2009
Prix : 8,60 €