Finnigan et moi – Avis +

Résumé de l’éditeur

Anwell, jeune garçon de 20 ans, raconte son histoire depuis son lit d’hôpital alors qu’il est victime d’un mal inconnu. Sous forme de flash-back, il narre son enfance bouleversée par sa rencontre avec Finnigan, son opposé, son idéal. Toujours accompagné de son chien Surrender, Finnigan n’est pas comme les autres : il n’est pas gentil ni bien élevé, il ne va pas à l’école et, surtout, il est son seul ami.

Les deux garçons passent un pacte : dès qu’il faudra mal agir, Finnigan s’en chargera. Anwell n’aura plus qu’à faire le bien. Lorsqu’une épidémie d’incendies ravage le village, la police locale est sur la sellette. La suspicion grandit et achève de diviser les habitants de Mulyan, une petite bourgade australienne jusqu’à ce que Gabriel convainque Finnigan d’arrêter…

Avis de Callixta

Sonya Hartnett a été surnommée la « Stephen King australienne ». Elle livre dans Finnigan et moi un récit qui a peut-être en commun certains traits avec le grand auteur américain mais qui est totalement original et lui permet d’avoir un style très personnel qui ne doit rien à personne.

Nous voici, grâce à elle, plongés dans la tête d’Anwell, un jeune homme de vingt ans, cloué au lit par une maladie inconnue qui le ronge inexorablement. Parvenu au dernier stade de son mal, il va prendre le lecteur à témoin et conter sa courte et terrible vie d’enfant solitaire. Attention, Anwell ne se livre pas à un récit larmoyant ; il explique à l’aide de flash-backs, comment il a fini dans ce lit, soigné par sa jolie tante Sarah. Tout d’abord, Anwell est devenu Gabriel, comme l’ange, lorsqu’il a rencontré vers dix ans, Finnigan. Sale, dépenaillé, ce jeune garçon qui avait à peu près son âge a débarqué de l’autre côté de la barrière du jardin où le petit garçon jouait seul. Il est devenu son double maléfique, sa deuxième face, son autre lui-même. En effet, Anwell vit à Mulyan, une bourgade paumée d’Australie et appartient à la famille des « zinzins » du coin. Cela lui vaut les quolibets de ses camarades, une solitude garantie, lui qui n’a plus de frère et des parents indifférents et cruels. Finnigan va devenir son ami, son secret, son bras armé. Commence alors le récit de cette longue dérive que sera sa relation avec Finnigan et permettra de comprendre ce qui a cloué au lit Gabriel/Anwell, si seul encore une fois.

Sonya Hartnett écrit un roman particulièrement intelligent et bien construit. Il commence comme le récit de la vie d’un enfant. Et quelle vie… Enfant soumis, écrasé par l’autorité de ses parents qui ne conçoivent leur rôle que comme des éducateurs impitoyables mais ignorent totalement leur enfant, Anwell passe d’humiliation en moment de souffrance. Rien de bien spectaculaire, pas de coups ni d’abus mais des brimades constantes et un cruel manque de tendresse. Il n’a pas d’ami, et est le souffre douleur de ses camarades de classe. Sa solitude et son malheur serrent le cœur.

Puis le roman va basculer dans plusieurs genres différents. Le lecteur sent bien que ce récit n’est pas gratuit et va sans doute révéler des abimes supplémentaires, ce qui ne manque pas d’arriver. Ce qui donne une autre dimension au roman, c’est que peu à peu, Sonya Hartnett introduit des éléments délirants qui montrent que la réalité vue par Gabriel se tord et se déforme peu à peu. Nous nous mettons à douter de ce qui est dit et de son interprétation. Qui est vraiment Finnigan, ce petit être sale et malfaisant qui comprend tellement bien Gabriel et cherche à réparer le mal qui lui est fait en le vengeant ? Comment Gabriel va-t-il contrôler son jumeau alors qu’il grandit et qu’il veut mener une vie normale ? Comment va-t-il faire vivre Finnigan et ses éventuels nouveaux amis : Evangeline, la seule copine d’école et qu’il voudrait qu’elle soit bien autre chose ou Surrender, son chien ? Inexorablement, la roue tourne et le mécanisme se referme autour de Gabriel.

Le style de l’auteur contribue à créer une ambiance qui vous plonge dans la tête de Gabriel. Elle évoque beaucoup les couleurs, les odeurs, les sensations de Gabriel qui analyse peu au départ mais réagit beaucoup. Elle balance ainsi des couleurs qui impriment l’œil comme un flash : le blanc stérile de la maison de Gabriel, les jolies couleurs de la chambre d’Evangeline. Les odeurs s’ajoutent : l’odeur d’humus et de montagne de Finnigan, la cire des meubles de sa maison… Chaque personne, chaque moment est ainsi défini , rendant le texte presque charnel. Nous ressentons autant que nous lisons.

Sonya Hartnett a signé ici un très beau texte, dur et même dérangeant. Certaines scènes sont terribles même si l’auteur les raconte platement et les colorie simplement avec ses teintes et ses sensations. Avant tout, c’est une descente dans les enfers personnels d’un pauvre gamin, tendue comme un thriller. Effrayant mais brillant et totalement convaincant.

Fiche Technique

Format : broché
Editeur : Le serpent à plumes
Collection : Fiction étrangère
Sortie : 19 février 2009
Prix : 21 €