L’inattendue – Avis +

Présentation de l’éditeur

Une jeune femme tient le carnet de bord de sa grossesse, de cet enfant qu’elle fabrique enfin après l’avoir très longtemps désiré. Aujourd’hui, elle l’attend avec ferveur, enthousiasme, inquiétude : qui sera-t-il ? Conjurera-t-il le souvenir entêtant d’un autre enfant, disparu depuis longtemps ? De ce moment banal et merveilleux, de cette attente infinie, elle note jour après jour les moindres changements, les plus infimes événements et les émotions puissantes qu’ils font naître en elle. Oscillant sans cesse entre peur et bonheur, la vie fait son chemin tandis que l’heure de la rencontre approche pour la jeune mère et son enfant, après neuf mois passés à faire connaissance

Avis d’Enora

L’inattendue, le premier roman de Karine Reysset, est une sorte de carnet de bord tenue par une jeune femme pendant sa première grossesse. Roman certainement basé sur l’expérience personnelle de l’auteur, puisqu’elle a donné aux personnages les prénoms de son compagnon et de sa fille.

La narratrice est une jeune femme traumatisée par la mort subite d’un petit frère, à trois mois et un jour, qui cherche à devenir enceinte. Elle le veut maintenant, tout de suite, elle ne supporte pas l’attente. Ce désir de grossesse devient une idée fixe ainsi que la peur. La peur de ne pas pouvoir y arriver, de le perdre, de le voir mourir lui aussi. Les souvenirs remontent et avec eux « ses démons » dit la jeune femme. De quels démons s’agit-il ? D’une culpabilité inconsciente dans la mort de ce petit frère? Des liens qui l’unissent à sa mère ?

Quand l’enfant s’annonce, la peur est toujours là tapie au fond de son ventre, celle d’une fausse couche comme sa mère. Elle pensait que la grossesse la comblerait de bonheur mais elle découvre que malgré cela elle ressent une profonde solitude. L’enfant qui grandit en elle la remplit et la vide en même temps.

La découverte du sexe est un tournant dans sa grossesse. Une petite fille. Le petit garçon qu’elle n’est pas lui manque, peut-être parce que du coup le bébé s’individualise par rapport au fantôme du jeune frère. Dans le même temps sa mère subit une hystérectomie. Le fossé des générations se matérialise, émancipant la future mère de celle qui deviendra une grand-mère. Trois poupées russes, trois femmes liées mais séparées, trois destins qui se différencient.

Quand Juliette vient au monde, le souvenir du petit frère mort s’apaisera doucement, enfin. Pas facilement, car la jeune mère dans sa complétude et sa peur dépassera le terme et empêchera inconsciemment son corps de laisser sortir sa fille vers l’inattendu de la vie, mais quand enfin le danger est écarté et que Juliette repose dans ses bras, une page se tourne.

Plus que le carnet d’une grossesse, c’est l’histoire de la mise au monde d’une femme qui, traumatisée par la mort de son frère, renaît véritablement avec la venue de sa fille. Ce travail d’écriture de plus de dix mois sera un exercice salvateur.

Le style heurté, haché, parfois violent de Karine Reysset, fait de phrases courtes et souvent non finies, martèle l’émotion, les désillusions, la souffrance, l’espoir et la peur au rythme des pensées de son personnage. A la fois intemporel et en même temps très personnel, L’inattendue retrace la naissance d’une femme qui trouvera avec la maternité, la possibilité de devenir elle-même et de surmonter les traumatismes de son enfance. Un très beau livre au style original.

Fiche technique

Format : poche
Pages : 175
Editeur : Pocket
Collection : Nouvelles voix
Sortie : 02 juillet 2009
Prix : 5,90 €