La mort blanche – Avis +

Présentation de l’éditeur

Albane, une jeune humanitaire française, a disparu en Afghanistan dans la vallée de Jurm, le royaume de l’opium. De Paris à Kaboul, de San-Francisco à Monte-Carlo, de l’île de Rhodes à Karachi, Jonathan remonte la piste de la poudre pour retrouver cette femme qu’il n’a pas su retenir et qui s’est perdue elle-même en voulant sauver l’humanité tout entière.

Confronté à la cupidité des multinationales, à un monde d’intrigues et de complots, il va livrer un combat désespéré contre les maîtres du narcotrafic.

Avis d’Enora

Globe trotter dans l’âme, Olivier Weber est parti juste après ses études d’anthropologie sur les traces de Jack London. Devenu grand reporter pour Le Point, il a parcouru le monde, de la Chine à l’Afrique en passant par les États-Unis et a couvert de nombreux conflits en Birmanie, en Tchétchénie et en Afghanistan. De ces expériences, il a tiré la matière de ses récits. La mort blanche est un grand roman document sur les réseaux de drogue entre Kaboul, San Francisco, Karachi et Paris. Tout est réalité dans ce récit, même les personnages et leur destin si on juge de la dédicace, seule l’histoire d’amour est une fiction.

Albane qui a voué sa vie aux interventions humanitaires, disparaît lors d’une mission, dans la région sud de l’Afghanistan. Pour tenter de retrouver celle qu’il aime, Jonathan, le plongeur martiniquais, sera obligé de remonter la filière de l’opium, et se retrouvera face à des gens prêts à tout pour garder le pouvoir, l’argent, le contrôle.

Roman en forme d’enquête, il nous révèle non seulement l’aveuglement des pays occidentaux face au trafic de drogue mais aussi comment ils l’ont encouragé pour financer ou réguler des conflits (Indochine, Vietnam, Afghanistan, Colombie, Sri Lanka, Liban), sans parler du bénéfice qu’ils tirent lors du blanchiment de quelques 250 milliards de dollars. Le narcotrafic, c’est 450 milliards de dollars par an, dont seuls 5 % reviennent aux producteurs locaux, le reste du profit étant partagé en chemins par les pays consommateurs.

Historiquement la culture massive du pavot a commencé en Afghanistan en 1980, les services secrets occidentaux ayant encouragé les résistants à l’invasion soviétique à financer leur guérilla de cette façon. Puis les Talibans ont repris les rênes de la production avec une belle hypocrisie jusqu’à ce que le Mollah Omar interdise la culture de l’opium en mars 2001. Mais après les attentats du 11 septembre, tout le monde s’est remis à en produire. Aujourd’hui la production afghane s’élève à 600 000 tonnes par an et représente 60 % du PNB afghan. Comme en Colombie, les paysans sont mis dans une dépendance économique qui les pousse à planter du pavot, dix fois plus rentable que le blé.

L’Otan s’est engagé dans la lutte anti-drogue en Afghanistan, mais se heurte à la corruption à tous les niveaux de la société et aux multinationales qui recyclent l’argent blanchi quand ce n’est pas aux industries pétrolières qui se concurrencent par tous les moyens pour faire passer leurs pipelines. Le président Karzaï, malgré son désir d’y mettre fin, est empêtré dans la guérilla contre les talibans… qui est financée par le trafic d’opium…. Cycle infernal dont on n’imagine pas ce qui pourrait y mettre un terme. Comme le constate Olivier Weber, les occidentaux se trouvent pris dans les mâchoires d’un piège qu’ils ont eux-mêmes fabriqué « Personne n’a vu venir l’effet boomerang et la déferlante qui arrive aujourd’hui »

Outre le fait que La mort blanche soulève bien des voiles sur le narcotrafic et les routes de la drogue, c’est aussi un superbe roman. A l’analyse pleine de finesse de ses personnages, Olivier Weber joint une belle écriture qui n’est pas exempte d’une certaine poésie en particulier dans tous les passages relatifs à Jonathan et à son amour. Plongeur professionnel, promeneur des grands fonds sous-marins, il connaît les requins et au fil de ses rencontres, l’analogie avec ces dangereux prédateurs s’impose à son esprit. Cet homme affamé de la tendresse du monde, atteint du syndrome du trop-généreux et habité par son amour pour Albane est personnage émouvant, une sorte de Don Quichotte des temps modernes. Lauréat des prix Albert Londres, Joseph Kessel et Lazareff, Olivier Weber réussit là un roman passionnant, inspiré de faits réels et de drames vécus, qui nous plonge dans l’enfer du troisième plus grand commerce du monde après celui du pétrole et des armes.

Fiche technique

Format : broché
Pages : 342
Editeur : Albin Michel
Collection : Littérature générale
Sortie : 24 octobre 2007
Prix : 19,90 €