L’incroyable histoire de Mademoiselle Paradis – Avis +

Résumé de l’éditeur

A dix-sept ans, Maria-Theresia von Paradis est un être d’exception : fille unique du conseiller de l’impératrice d’Autriche, pianiste virtuose, belle et aveugle. Lorsque son père fait appel au célèbre Mesmer qui soigne par magnétisme, elle découvre la passion et toutes les émotions dont sa cécité la protégeait. Au siècle de Mozart et de Salieri, un roman lumineux où tout est dit des sentiments, du destin et de la liberté.

Avis de Callixta

Il y a des vies qui sont tellement romanesques qu’on a envie d’en faire un roman. C’est sans doute ce qui a mené Michèle Halberstadt à consacrer ce court livre à Maria-Theresia Von Paradis.

Cette jeune femme qui répond à ce nom déjà presque trop beau pour être vrai est la fille du conseiller de l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche, Josef Anton Von Paradis. Elle est née en 1759 et est un parfaite contemporaine de Marie-Antoinette. Toutes les fées se sont penchées sur le berceau de la petite Maria-Theresia : elle est magnifique avec de grands yeux verts et présentent très tôt de grandes aptitudes musicales. D’ailleurs, elle est formée auprès des plus grands dont le fameux Saliéri et rencontre le petit Mozart dont elle jouera les œuvres et qui lui consacrera un concerto ( le concerto 18 pour piano K456).

Malheureusement au grand désespoir de son père, elle devient aveugle vers l’âge de trois ans pour des raisons inexplicables. Elle sera alors une sorte de prodige : non seulement, elle est précoce mais aveugle. Son père n’acceptera jamais sa cécité et va lui faire rencontrer tous les médecins de son époque qui lui feront subir les pires traitements (jusqu’à un plâtre autour du crâne !). Personne ne trouve de solution à un problème qui pourrait bien être d’origine nerveuse. En effet, la petite est aussi instable, sujette à des crises d’angoisse et de santé fragile. A l’âge de dix sept ans, elle va être prise en charge par le médecin à la mode de l’époque, Franz Anton Mesmer, une sorte de séduisant charlatan qui prétend soigner par magnétisme dans des séances hallucinantes où il fait reposer ses patients dans des baquets d’eau. Un livre entier ne serait pas de trop pour parler de ce curieux personnage qui pratiquait en fait une sorte d’hypnose mais c’est surtout sa rencontre avec Maria-Theresia, qui sera décisive pour tous deux, qui est contée ici. Il permet à la jeune fille de commencer à retrouver la vue et surtout, ils vont tomber passionnément amoureux.

Le roman n’apporte aucune explication scientifique à ce prodige mais ce n’est pas du tout son propos et cela serait sans doute difficile. Personne ne sait exactement ce dont souffrait la jeune femme, ni pourquoi elle retrouva temporairement la vue (serait-ce l’amour comme on le suggéra à l’époque ?). Mais il conte d’une voix légère et délicate cette poignante histoire d’une virtuose qui va amèrement apprendre à ne vivre que pour son art et surtout à fermer les yeux sur l’humanité.

C’est une sorte de conte philosophique que l’histoire de Maria-Theresia. Il y a du Candide chez cette jeune fille qui « voit » soudain le monde tel qu’il est et y perd sa naïveté mais y gagne chèrement sa liberté. Retrouver la vue n’était pas son vœu mais elle l’accueille avec joie puisque ça plaît à sa famille et surtout à Mesmer. Mais elle voit sa vie bouleversée. Comment d’un événement aussi positif, autant d’amertume et de douleur peuvent surgir ? Maria-Theresia en tirera toutes les leçons et c’est ce que Michèle Halberstadt permet aussi de faire pour nous. Et puis, dans ce siècle des lumières, la montée en grâce puis le discrédit de Messmer interrogent sur la crédulité et les luttes entre faculté et médecine différente. Qu’il est d’ailleurs troublant qu’un médecin qui avait la réputation de soigner l’âme apparaisse déjà à Vienne cent ans avant Freud !

Michèle Halberstadt fait très bien vivre Maria Thérésa que l’on sent vive et fragile comme un petit oiseau. Son écriture et son style confère une légèreté grave à son roman. Sans pathos, sans décrire toutes les affres qu’a dû traverser la jeune femme, elle livre une fin poignante par deux lettres et un vrai extrait de son journal.

La vie de Maria-Theresia Von Paradis était sans doute digne d’un roman mais elle a su elle-même en tracer le scénario en devenant une grande musicienne et c’est sans doute sa plus belle victoire. C’est en tous cas, ce que laisse deviner Michèle Halberstadt.

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 171
Editeur : Albin Michel
Sortie : 3 janvier 2008
Prix : 15 €