La baie des secrets/Un mystérieux amant – Avis + et –

La baie des secrets de Susan Napier

Maintenant qu’elle a retrouvé Drake Daniels, le fameux auteur à succès qui a été son amant, Kate ne peut plus reculer : malgré l’appréhension qui lui noue la gorge à l’idée de revoir cet homme qui lui a donné tant de plaisir, elle doit lui avouer le secret qu’elle porte. Mais alors qu’il lui ouvre enfin sa porte, elle découvre, atterrée, qu’il n’est pas seul. Et les mots se figent dans sa gorge tandis qu’elle dévisage la rousse plantureuse qui se tient aux cotés de l’homme qui hante ses pensées…

Un mystérieux amant de Dixie Browning

En découvrant la vieille maison qu’elle vient d’hériter de son père, Val ne peut retenir quelques larmes amères en songeant au destin qui semble s’acharner contre elle : elle qui, hier encore, était une héritière choyée et insouciante, se retrouve ruinée, dans une maison délabrée bien trop grande pour elle. Aussi accueille-t-elle avec soulagement la proposition du séduisant inconnu qui se présente à sa porte un matin : elle lui louera une partie de la maison, et il l’aidera à la remettre en état. Mais elle est loin de se douter que cet homme troublant n’est pas arrivé chez elle par hasard…

Avis de Marnie

J’attendais avec crainte la parution d’un roman de ce double Passions. En fait, les deux auteurs sont des incontournables romancières Harlequin ou Duos des années 80… au même titre que Carole Mortimer, Penny Jordan, Charlotte Lamb, Anne Mather et autres inoubliables. Mais ces dernières années, ce qui nous a été présenté de ces auteurs était tellement inférieur à leurs premiers romans que nous avons été le plus souvent déçus.

Malheureusement, Le mystérieux amant fait partie de ces ratages… Si la vénérable Madame Browning (78 ans cette année !) a écrit plus de cent livres, cela se sent. Tout est téléphoné, assez incohérent et peu attrayant et disons le franchement, bêtement bâclé. Prenons comme exemple, l’héroïne, dont le père est mort alors qu’il allait être accusé de détournements de fonds, et qui ne trouve rien de mieux à faire, alors qu’elle souhaite au plus vite prouver son innocence, et qu’elle a tous les papiers à lire avec elle, préfère se mettre aux taches ménagères et aller faire des courses pour se prouver qu’elle n’est pas qu’une enfant gâtée… quant au héros, lui, qui doit chercher aussi au plus vite une preuve dans ces papiers, et bien, il s’attarde volontiers pour tondre la pelouse et autres arrangements… C’est tellement idiot, que nous pouvons faire l’impasse de ce récit.

Par contre, le plaisir de retrouver la pétulante et surprenante écriture de Susan Napier n’a été gâché que par la traduction. En effet, toute l’intrigue sentimentale est basée sur le très classique chef d’œuvre, universellement connu de Howard Hawks, To have and to have not, que tout cinéphile connaît sous le nom du Port de l’angoisse, qui nous raconte la rencontre aussi bien réelle que scénaristique du couple mythique Humphrey Bogart et Lauren Bacall. Les dialogues sont repris, en forme de clin d’œil… mais le traducteur ne s’est pas donné la peine de chercher rien qu’en tapant sur un moteur de recherche, le nom du titre français. Il a traduit « En avoir ou pas »… et est passé froidement sur les phrases célèbres du film qui sont reportées (il en est de même pour Casablanca… de quoi faire grincer les dents !)

Ainsi, Kate, notre héroïne conclut une scène avec son amant, en lançant, «Tu sais siffler, n’est-ce pas, Drake ?» qui paraphrase une des plus célèbres répliques du cinéma américain, le traducteur n’a pas l’idée de mettre une note explicative et cela tombe à plat sauf pour les cinéphiles. C’est en effet la question à double sens (pour passer la censure de l’époque) que lance Lauren Bacall dans le film, en sortant de la pièce : «You know how to whistle, don’t you, Steve ? You just put your lips together and blow. (Tu sais siffler, n’est-ce pas, Steve ? Il suffit de rapprocher les lèvres et de souffler).» On raconte que Lauren Bacall a placé un petit sifflet en or dans l’urne contenant les cendres de Humphrey Bogart, avec l’inscription : «if you want anything, just whistle (si tu a besoin de quelque chose, il te suffit de siffler)»…

Je remercie les traducteurs de ne pas réduire ces bouquins à des romans de gare, et d’avoir l’intelligence d’effectuer leur travail jusqu’au bout, nous permettant comme tout un chacun de nous cultiver, même si ce sont des romances Harlequin ! Cette digression étant faite, passons à la critique. Un plaisir, ce roman… avec un coup de théâtre auquel on ne s’attend pas, des dialogues justement brillants et pleins de fougue, des scènes sensuelles agréables.

Susan Napier qui avait en 1985 fait paraître La beauté du diamant brut, une vraie perle d’Harlequin… a gardé la même intensité, la même fougue avec un ton moderne dans le langage familier tout à fait appréciable. Quelle ne fut pas ma surprise de retrouver dans ce roman-ci (écrit en 2007), l’un des personnages secondaires de ladite perle… un des frères Marlow. Après recherches, c’est en fait une série, dont sauf erreur de ma part, seul le premier a été traduit.

Quelque part, le style est ici le même. Nous avons une héroïne qui se bat avec fougue pour gagner sa place au soleil. S’étant adaptée à ce qu’elle pensait que le héros voulait, elle y a perdu son âme. Elle décide donc de gagner l’amour de Drake, mais cette fois-ci à sa façon. Le héros, lui est représentatif des années 80 : un vrai sale caractère, une bonne dose de violence et d’égoïsme… La différence, c’est qu’il se révèle peu à peu vulnérable, n’a pas tous les talents (écrivain célèbre, il n’a pas en fait les bases pour mettre en forme ses romans…), et que son manque de confiance en lui-même provoque son rejet de ce qui peut l’atteindre.

Enfin, ce qui est singulier, c’est aussi la réaction très cynique face au clan familial. Dans La beauté du diamant brut, la jeune héroïne de l’époque aidait tous les membres de la famille Marlow, les tensions s’apaisaient et certains étaient sauvés de leurs démons grâce à elle. Or, ici, on apprend qu’un de ceux qu’elle voulait aider est en fait tombé finalement dans l’alcool et la drogue… Les deux héros ont de réels problèmes avec leurs proches qui ne seront pas résolus à la fin du roman, au contraire, mais trouvent dans l’amour qu’ils éprouvent l’un pour l’autre, la force de surmonter ces déceptions.

Un vrai plaisir, cette romance, qui nous donne envie de nous plonger dans les autres livres de Susan Napier en anglais, puisque seulement une quinzaine de livres ont été traduits… à lire !

Fiche Technique

Format : pochew
Editeur : Harlequin

Collection : Passions
Sortie : 5 décembre 2007
Prix : 5,95 €