L’homme du passé – Avis – et +

Résumé

En 1338, Cynthia de Wendeville, une guérisseuse, devient veuve et hérite de la fortune de son mari. Furieux et avide, l’abbé, respecté de tous, décide de monter un stratagème afin d’accuser la jeune femme de sorcellerie car elle utilise des herbes médicinales.

Pour mener à bien ce plan, il place le père Garth en tant que chapelain du château de Cynthia. Mais il ne sait pas que le moine est aussi Garth de Ware, l’homme auquel Cynthia, encore enfant, a juré d’appartenir.

Avis de Francesca

Ce livre fait partie de la trilogie des Chevaliers de Ware, dont c’est le dernier tome, après L’insoumise et le chevalier, également traduit en français par J’ai Lu. La période du Moyen Age est une époque riche en histoire, en culture et en religion. Le poids du christianisme et l’influence des abbés et autres hommes d’Eglise sont de notoriété courante. Le fait de traiter d’un moine en perpétuel conflit entre sa foi et ses pulsions charnelles aurait pu être intéressant si le style n’était pas aussi lourd, répétitif et vide d’émotion.

Cynthia est une jeune femme qui a toujours cru au prince charmant, elle l’a rencontré d’ailleurs, mais s’est résigné à se sacrifier pour le bien de sa famille en épousant un homme riche et bien plus âgé qu’elle. Ses retrouvailles avec Garth réveillent en elle la passion et l’amour, et, après avoir accepté ses sentiments, tente par tous les moyens de séduire Garth. Sa détermination est claire, obstinée et compréhensible, ce qui n’est pas le cas pour les tourments de Garth.

Garth est un homme qui est devenu un religieux pour des motifs familiaux, le dernier fils des familles nobles devant entrer dans les ordres. Il a vécu une expérience traumatisante avec une femme qui l’a cruellement blessé dans sa virilité de mâle et a fait vœu de chasteté, ce qui lui est pénible puisqu’il est rapidement rattrapé par ses désirs physiques et sexuels. Il ressent un fort désir envers Cynthia mais ne veut pas renier son serment envers la religion. Le défaut du livre réside dans l’insistance que l’auteur fait passer au lecteur pour qu’il prenne conscience de l’état d’esprit dans lequel se trouve le héros et de son extrême difficulté à vivre ainsi tiraillé entre deux natures opposées. Cette insistance finit par peser sur la lecture et à atténuer la compassion ou l’émotion qu’on pourrait ressentir envers ce héros et cette relation en général. Personnellement, je suis devenue très vite impatiente et j’en souhaitais presque que le héros n’ait plus de scrupules avec sa conscience et cède le plus rapidement possible afin de finir avec ce livre.

Le personnage secondaire de l’abbé n’est pas plus riche en personnalité. C’est un homme à la limite de la caricature, réfractaire à ce qu’il considère comme de la sorcellerie, avide et attiré par l’appât de l’héritage du mari de Cynthia. De plus, il renie certains fondements religieux pour son profit personnel, ce qui le rend détestable. Néanmoins, cela ne lui donne pas pour autant l’image d’un homme intelligent. On se demande d’ailleurs la raison pour laquelle il a introduit Garth dans le domaine de Cynthia, ce dernier n’étant même pas au courant de ses plans.

Au final, le lecteur a droit à un livre fade, pesant, qui accumule les clichés du genre de la romance historique, ce qui n’a aucun intérêt. C’est le style de lecture que je redoute et que j’évite !

Avis de Marnie

Excellente surprise que ce roman sentimental d’un auteur inconnu ! Par contre, il semble que ce soit le dernier tome d’une trilogie dont seulement deux ont été traduits… de quoi encore inciter les lecteurs qui hésiteraient à lire en version originale à se pencher sérieusement sur la question ! J’ai découvert ici une intrigue assez simple mais profondément originale, qui flirte malicieusement avec certains codes de la romance, et surtout qui a la très bonne idée de ne pas se prendre du tout au sérieux.

Disons le tout de suite, ce roman pourrait ne pas plaire à tous ceux ou celles qui ne peuvent pas supporter qu’on égratigne un peu les préceptes religieux. Ceci mis à part, je pourrai résumer cette histoire en une seule phrase, un moine et une châtelaine guérisseuse sont violemment attirés l’un par l’autre, leur entourage et leur propre conscience, faisant tout pour les séparer. Le talent de Glynnis Campbell est d’avoir su écrire dans un style très enlevé et joyeux, dans un faux vieil anglais très plaisant, une fable sur la tolérance (félicitations au traducteur d’avoir su recréer cette atmosphère ironiquement cadfaellienne, même si l’on peut regretter certaines répétitions ou encore expressions un peu trop modernes qui paraissent incongrues).

Le livre est intitulé en version originale My hero (mon héros), titre on ne peut plus ironique lorsque l’on fait connaissance de Garth de Ware. Troisième fils d’un seigneur, il s’est depuis des années destiné à la vie religieuse, jugeant ses aptitudes de combattant nettement inférieures à celles de ses deux frères, deux chevaliers dont on continue de vanter les mérites dans toute l’Angleterre. Profondément traumatisé par une désastreuse expérience sexuelle, le jeune homme s’est jeté dans la religion avec une soif d’absolu quasi mystique. Moine depuis quatre années, il copie toute la journée des versets de la Bible. Seulement, aussi bien physiquement que moralement, l’existence dans cette abbaye ne lui convient pas, même s’il ne s’en rend pas compte. Il ne peut contrôler ses rêves érotiques qui le désespèrent et dépérit peu à peu en menant cette vie étiolée. On ne pouvait choisir comme héros un homme aussi terne, torturé mentalement, qui s’autoflagelle lorsqu’il ne se supporte plus…

Cynthia de Wendeville, est une riche veuve. Jeune femme, ni très belle, ni très conventionnelle, elle séduit par sa spontanéité, son entrain et sa gaité, sa communion avec la nature, et son profond dévouement envers son prochain. Le contraste entre son caractère extraverti et celui nettement plus introverti et contrôlé de son nouveau chapelain est déroutant. Les malentendus tragi-comiques entre les deux héros s’accumulent, au fur et à mesure des péripéties du récit. Aucun temps mort dans cette histoire, même s’il n’y a pas de coup de théâtre, juste deux êtres qui se cherchent, s’évitent, s’épient, se confrontent avant de s’éprendre éperdument l’un de l’autre. Mais, pour mieux s’unir, il leur faut apprendre à s’accepter l’un et l’autre, en leur propre âme et conscience. Si Garth doit trouver la paix avec lui-même et concilier sa vocation avec son amour pour une femme, il faut que Cynthia puisse exercer en toute sérénité son don de guérisseuse, qu’elle doit pratiquer comme un bienfait et non une malédiction.

Les autres personnages aussi bien les méchants que les gentils ont une forte personnalité même s’ils sont peu nuancés. Ils contribuent à enrichir le récit, bien que l’action soit nettement focalisée sur l’évolution de la relation entre les deux héros. Glynnis Campbell a choisi d’écrire cette histoire sur un ton volontairement ironique et joyeux. Bien évidemment, nous sommes loin d’une intrigue profonde et pleine d’introspection, avec vérité historique en toile de fond. L’auteur a préféré la truculence à la délicatesse, la passion à l’ardeur des sentiments et c’est un choix, somme toute, appréciable.

Cette tentative de sortir des sentiers battus de la romance est totalement réussie, tant le sujet est original et parfaitement traité et maîtrisé. En traduisant la totalité des oeuvres de cet auteur qui sont résumées dans le livre, il aurait été intéressant pour nous de découvrir ce dont Glynnis Campbell était capable de faire avec deux récits plus traditionnels… A découvrir !

Fiche Technique

Format : poche
Pages : 347
Editeur : J’ai Lu
Collection : Aventures & passions
Sortie : 24 mai 2007
Prix : 6,50 €