La vengeance d’un lord – Avis +

Présentation de l’éditeur

Bien loin des plaisirs effrénés de Londres, la frivole Cholé Boscastle se morfond à Chistlebury lorsque la vie du paisible village est bouleversée par l’assassinat du ténébreux Dominic, vicomte de Startfield. Vengeance de mari jaloux ! persiflent les mauvaises langues. Et le pis, dit-on, c’est que son fantôme rôde dans la région…

Chloé ne croit pas aux spectres, mais elle pleure cet homme aussi mal élevé que séduisant, qui, un soir de pluie, lui a dérobé un baiser. Depuis sa disparition, la vie lui paraît encore plus morne… Jusqu’à ce qu’elle découvre Dominic dans son placard ! Bien vivant, il réclame son aide et lui fait jurer le secret avant de lui révéler les événements qui l’ont contraint à mettre en scène ses propres funérailles…

Avis de Marnie

Deuxième tome d’une série qui pour le moment comprend quatre ouvrages, (commencée par L’héritier libertin, la très bonne surprise du semestre précédent) cette intrigue bizarre et totalement incohérente déconcerte notamment à cause de son aspect nettement plus sombre que dans le premier opus. J’ai été pourtant peu à peu entraînée dans cette histoire pour en apprécier finalement ses charmes, avant que l’auteur ne reprenne soudain son habituel ton malicieux, dans le dernier tiers du livre. Il est vrai que la famille Boscastle et ses personnages haut en couleur surgissent alors, à ma grande satisfaction, et la légèreté et la causticité reprennent le dessus.

En premier lieu, et pour ma part, c’est vraiment un plus d’avoir lu le premier tome, pour appréhender toutes les facettes de l’héroïne, Chloé, frivole et volage, dont les fêlures sont apparues (dans le livre précédent) aux yeux de celle qui est devenue depuis sa belle-sœur, Jane. En effet, au début de cette histoire, seuls ses côtés superficiels et versatiles prédominent, alors que le lecteur a découvert que la jeune femme a été profondément traumatisée par la perte brutale du frère dont elle était très proche. Ses sautes d’humeur et sa façon de se jeter au cou de chaque jeune homme qui passe ne sont qu’une façon de tenter d’oublier le drame qui a bouleversé sa vie et dont elle ne s’est pas remise. Pour la punir de provoquer scandale sur scandale, son frère aîné l’envoie à la campagne se calmer le temps également de lui trouver un prétendant. C’est là que le récit commence. C’est en appréhendant ce contexte bien particulier, que le lecteur a de l’empathie pour cette femme obstinée et passionnée et qu’il comprend ses réactions notamment sa décision de se lancer sans vraiment réfléchir à corps perdu dans cette nouvelle aventure.

Ce que le lecteur admet beaucoup moins, c’est l’énorme faiblesse de l’intrigue qui veut qu’un jeune homme qu’on a tenté d’assassiner erre un mois entier dans les passages secrets de son propre château, attendant d’être remis de sa blessure et cherchant un hypothétique moyen de se venger. Il y avait d’évidentes solutions bien plus directes et logiques pour régler ses problèmes ! Si Jillian Hunter est excellente lorsqu’elle ébauche un marivaudage oscillant entre frivolités et sentiments profonds, il n’en est pas de même lorsqu’elle tente de créer une intrigue digne de ce nom. C’est vraiment la très grande faiblesse du roman, ce manque total de cohérence et de solidité du scénario.

En y réfléchissant, je pense que l’auteur a trouvé une idée assez lumineuse : relater une parodie des romans gothiques qui faisaient fureur dans les salons à l’époque même où se déroule histoire. Au bout de trois chapitres, j’ai eu l’impression que Jillian Hunter a réalisé elle-même que son histoire est si peu convainquante, qu’elle s’est autorisée à se parodier, le récit tout d’abord très sombre devient franchement délirant. Ainsi, lorsque le héros se prend au jeu en interprétant un fantôme plus vrai que nature devant la tante de Chloé qui le pourchasse depuis le début, l’ardente campagnarde (une vraie Boscastle, ne l’oublions pas) s’ennuie tellement qu’elle est prête sans vraiment l’avouer à tomber dans les bras d’un spectre libidineux.

Dès lors, les faiblesses s’effacent pour laisser place à ce que l’auteur sait le mieux mettre en scène, des petites séquences drôles et malicieuses. On notera par exemple, la visite de l’héroïne au château de Dominic et la recherche d’un tableau où il serait représenté, un des multiples clins d’œil au roman de Jane Austen, Orgueil et préjugés. Si l’on en cherche d’autres, il y a les allusions répétitives à la vie monotone à la campagne, et la compagnie pas très réjouissante des voisins. Par contre, si les personnages sont ainsi décrits par petites touches ironiques et piquantes, ce procédé délibéré du bon mot à tout prix enlève de la profondeur et même de l’authenticité (étonnant qu’un jeune homme dise devant Chloé qu’il a peur de se faire castrer, si l’on rit en imaginant la scène, c’est totalement incongru pour l’époque), ou encore ledit jeune homme qui joue la scène de Roméo clamant son amour de façon bien peu discrète. C’est amusant, certes, mais aurait du provoquer un vrai scandale…

Ainsi, le ton délibérément parodique provoque une certaine distance vis à vis des héros. Dominic et Chloé sont nettement moins attachants que Grayson et Jane, personnages principaux de l’héritier libertin et si leur relation est passionnée et sensuelle, il y manque une certaine intensité. Mais l’humour et le côté jeunes chiens fous de nos deux jeunes aventuriers emportent l’adhésion totale du lecteur qui s’est laissé entraîner dans une histoire improbable grâce à leur entrain et à leur fougue ! Et l’apparition de toute la famille redonne la stabilité et la structure qui manquait au roman, mais surtout une vraie épaisseur. Là encore, certaines allusions malicieuses au premier tome refont surface.

La parution du troisième tome, ce mois-ci, ne mettra heureusement pas un point final aux aventures des Boscastle… Je me réjouis déjà de me plonger dans l’histoire de l’énigmatique Heath dont le caractère inquiétant mais d’une exquise politesse et teinté d’humour, nous laisse entrevoir un héros aux mutiples facettes.

A suivre…

Fiche Technique

Format : poche
Pages : 313
Editeur : J’ai Lu
Genre : historique
Sortie : 24 août 2006
Prix : 6,40 €
# Langue : Français