La veuve – Avis +

Présentation de l’éditeur

Meurtrière ou pas ? En scrutant la jeune veuve, son allure de princesse lointaine, ses grands yeux froids qui dissimulent Dieu sait quel obscur secret, Maguire se demande si elle a assassiné son vieux mari, le célèbre peintre Aristide Pompasse, dont les toiles se vendent à prix d’or dans le monde entier. Car même si nul ne parle encore de meurtre, lui, Maguire, ex-grand reporter familier des guerres les plus violentes, reconnaît un meurtre quand il en voit un. Et le cadavre de Pompasse ne l’a pas trompé.

Si Maguire a commencé à s’intéresser au peintre peu avant sa mort, c’est pour des raisons bassement mercantile, pour écrire une biographie fracassante et sulfureuse d’Aristide Pompasse. A présent, sous couvert de représenter une société d’assurances, il enquête discrètement dans la superbe résidence toscane du défunt, à deux pas de Florence où se touve déjà la belle Charlie, l’épouse légitime qui a fui le foyer conjugal plusieurs années plus tôt pour s’installer à New York et qui, en tant qu’exécuteur testamentaire, est revenue régler la succession. Entouré des “femmes” du peintres, la vieille favorite, la dernière maîtresse, Charlie, Maguire cherche des indices qui corroborent l’hypothèse du meurtre et nourrissent ses recherches. Dans la touffeur sensuelle de la Toscane, il est prêt à tout pour arriver à ses fins, y compris à coucher avec les “femmes” de Pompasse s’il le faut, à commencer par la veuve…

Avis de Gaëlleb

Il n’est plus besoin de présenter Anne Stuart. Elle sait mieux que personne nous ravir avec des intrigues borderline et des héros atypiques, sans concessions qui trouvent une rédemption sans jamais tomber dans la mièvrerie. Mais avant d’en arriver à un tel point, l’auteur nous gratifie ici d’un roman dont l’intrigue bien qu’excellente, ne possède pas encore le petit plus qui rendra par exemple la série des Ice inoubliable.

Lorsque le peintre Aristide Pompasse décède, tous les regards se tournent vers sa veuve, la très jeune Charlie et notamment celui de Maguire, un journaliste sans foi ni loi dont le seul but est d’écrire un livre sur la vie de l’artiste. Il suit donc la jeune femme jusqu’en Toscane où se réunissent les femmes de Pompasse. Dans une ambiance sulfureuse, où chacun s’épie, le mystère autours de décès du vieil homme s’épaissit. Et s’il avait été victime d’un meurtre ?

Comme bien souvent chez Stuart, les héros de cette histoire sont deux écorchés. Lui, ancien grand reporter de guerre, traumatisé, devenu paparazzo. Elle, mariée très jeune à un vieillard, frigide et émotionnellement refoulée. Pourtant des étincelles jaillissent entre eux, et l’on suit la métamorphose de leur relation avec délectation. De détaché, Maguire deviendra amoureux et Charlie apprendra tout simplement à vivre. C’est fort et sensuel.

Autour d’eux gravite toute une galerie de personnages pour le moins originaux, allant de la vieille folle à la jeune perverse manipulatrice. Tous sont autant de suspects dans la résolution du meurtre. Chacun d’eux devient tour à tour le coupable idéal. Mais c’est sans grande surprise que le mystère est résolu. Peu importe, tel n’est pas réellement l’intérêt du roman.

Avis de Marnie

Il est étonnant de constater que l’éditeur ne sachant pas vraiment étiqueter ce livre, l’inscrit dans la veine du roman à suspense. Or, comme la plupart des oeuvres d’Anne Stuart de cette décennie, la veuve est inclassable. Ce n’est pas un romantic suspense. En effet, nous devinons qui sont les méchants dès le premier chapitre et nous voyons arriver les rebondissements sans aucune surprise… mais cela n’a aucune importance, puisque notre attention est focalisée sur un autre aspect du roman : les deux héros, bien évidemment !

Lorsque l’on sait que Maguire est un ex-grand reporter de guerre, reconverti paparazzi, tout est dit… un homme qui n’a aucun scrupules ni sur les autres, mais aussi aucune estime pour lui-même. Quelque part, traumatisé, idéaliste revenu de tout, il s’est perdu en cours de route, pour se retrouver usurpant le rôle d’enquêteur des assurances pour découvrir les scandaleux secrets des proches d’un peintre de renom qui vient d’être assassiné.

Charlie a la place de l’épouse légitime, sortie de la vie du peintre quelques temps auparavant et qui est obligée de revenir dans la villa, en tant qu’exécutrice testamentaire. Provoquée, cernée, agressée par les autres résidants, la jeune femme tente de garder son impassibilité apparente pour ne pas être détruite… Nous ressentons pourtant de plein fouet sa fragilité, ses sentiments de rejet, de dégoût d’avoir été utilisée depuis tant d’années par ceux en qui elle avait le plus confiance et une envie profonde de se reconstruire, de se prouver ce dont elle est capable, de s’assumer pleinement après avoir été traitée de façon malsaine comme une enfant bien trop longtemps.

L’affrontement entre ces deux êtres qui n’ont confiance en personne et surtout en eux-mêmes représente le point central de l’histoire. Le danger ne constitue que le moteur de l’exacerbation des sentiments de Maguire et Charlie. Cela permet huis clos, confrontations, tension sexuelle jusqu’à la révélation des émotions et sentiments, avec un plus ici fort intéressant, l’atmosphère d’une perversité malsaine que le peintre a distillé bien avant sa mort, d’où l’importance des personnages secondaires qui contribuent à renforcer l’aspect glauque et quelques fois hystérique de l’ambiance qui règne à la villa. Le contexte est donc assez éprouvant, pesant, formant un contraste avec la pureté qui se dégage de Charlie, elle qui est pourtant considérée de prime abord comme une veuve noire et perverse par Maguire, influencé par ses propres préjugés.

Si ce roman n’est pas le meilleur de Anne Stuart, il constitue cependant une de ses histoires incontournables, reprenant ses thèmes favoris :

– le bad boy en rupture avec lui-même et qui va trouver la force de se revaloriser à travers les yeux de la femme pour qui il éprouve une attirance qu’il ne nommera jamais amour,

– l’héroïne, traumatisée, sexuellement bloquée, fragilisée et qui semble perdue, mais dont la force de caractère est indéniable, sans cela intéresserait-elle un tel héros qui méprise la faiblesse ?

– la mésentente entre Charlie et sa mère, avec une supposée ou vraie trahison (problème récurrent que l’on retrouve dans la plupart des romans de Anne Stuart)

Les confrontations se transforment en scènes sensuelles exacerbées, les relations de plus en plus étroites entre nos deux héros, leur donnant la force de surmonter les difficultés mais aussi de reprendre le cours de leur vie, tout en ne tombant jamais dans des déclarations pleines de tendresse ou de douceur, ce qui ne serait ni cohérent ni compatible avec leur caractère, puisqu’ils ont appris à se battre pour survivre et se sentent vibrer dans les rapports de force qui nourrissent leur être… Un roman électrique et sulfureux comme on les apprécie !

Fiche technique

Format : broché
Pages : 393
Editions : Harlequin
Collection : Mira
Sortie : 1er janvier 2010
Prix : 12,50 €