La Représentation de l’argent dans les romans de Jane Austen – Avis +

Présentation de l’éditeur

Qu’il soit lié aux thèmes du mariage, de l’héritage, de l’ascension sociale ou de la consommation, l’argent se trouve au coeur de l’oeuvre romanesque de Jane Austen (1775-1817).

En marge de la gentry et du marché matrimonial par son impécuniosité, elle utilise l’argent comme clef d’exploration multiple dans ses six romans.

Sa modernité se manifeste dans son utilisation audacieuse de la thématique économique pour dénoncer la violence des pratiques patriarcales et leurs effets sur la psyché féminine.

Avis de Claire

La question de l’argent se révèle être un thème récurrent qui traverse la littérature du XVIIIe siècle, de Daniel Defoe à Jane Austen. Nombre des héroïnes austeniennes sont motivées par ce qui brille. Même lorsqu’elles n’ont pas forcément cette ambition, leur place dans la société les positionne de telle manière à ce qu’elles ne puissent y échapper.

Ce que montre très bien dans son essai Marie-Laure Massei-Chamayou, c’est le détournement du thème de l’argent (souvent tragique, ou plutôt du manque d’argent avec tout ce que cela comporte pour les femmes à cette époque), comme procédé littéraire.

Ce procédé se traduit en particulier par une remarquablement ironie piquante, grâce à laquelle Jane Austen dénonce le paradoxe incessant du nerf de la guerre, laissant deviner là son incroyable modernité.

Dans la famille Austen pas de gêne pour évoquer ce sujet, que ce soient dans les romans de Jane ou dans la correspondance, pas de tabous, malgré les difficultés financières avérées de la famille. Une partie des clefs du ressort dramatique de ses romans réside sans doute dans le rapport familial à l’argent, ce que l’auteur de cet essai explique parfaitement bien.

Mais la romancière n’a pas pour vocation d’évoquer l’argent uniquement pour ce qu’il représente, même s’il est le « déclencheur de l’action ». Le terme est «chargé de multiples connotations et, surtout, caractérisé par une grande puissance évocatrice», comprenons donc aussi « sexuelle ». Ce qui signifie donc que Mr Darcy ne paraîtrait sans doute pas aussi séduisant sans Pemberley et ses dix milles livres de rente.

Les six romans (achevés) de Jane Austen, ainsi que les différents autres écrits qui nous sont parvenus, sont tous «des documents de civilisation fiables, révélateurs de leur époque et de ses mutations». Instantanés d’une époque charnière, ils apparaissent aujourd’hui comme de précieux témoignages.

La question de l’héritage par exemple, gouvernée par l' »entail« et la « primogeniture » (c’est le propos de Raison et sentiments) souvent incomprise par les lecteurs contemporains est remarquablement traitée, en tant que «problématique complexe, révélatrice des mentalités d’une époque».

Pour conclure, quelques mots de l’auteur de cet essai, qui sonnent si juste, car l’on sait rarement que «l’un des derniers gestes de Jane Austen, avant de mourir, fut de récapituler par écrit les profits issus de ses romans, qui s’élevaient à 684 livres 13 shillings. (…) . Grâce à l’écriture, héritage idéal qui parvient à faire fusionner les deux modes, (…) Jane Austen avait reconquis une place dans le processus de transmission familiale, mais aussi, plus largement, de transmission d’une culture».

Fiche technique

Format : broché
Pages : 416
Edition : L’Harmattan
Sortie : 11 mai 2012
Prix : 40 €