Interview de Pierre Pevel

Onirik : Je vous ai découvert avec Les lames du cardinal éditées chez Bragelonne. Votre verve et la façon de mélanger roman épique et Fantasy m’ont tellement plu que je suis actuellement plongée dans Les Ombres de Wieldstadt et Les enchantements d’Ambremer. D’ailleurs à ce propos, le deuxième tome, L’élixir d’oubli, est maintenant absolument introuvable même en occasion, y-a-t-il une réédition prévue ?

Pierre Pevel : effectivement, Le livre de poche n’ayant pas décidé de le publier à la suite du tome 1, il est devenu introuvable et non aucune réimpression n’est prévue

Onirik : En me penchant sur votre bibliographie, j’ai remarqué qu’entre Les ombres, Ambremer et Les lames, il s’était écoulé 5 années. Est-ce qu’elles correspondent au temps de conception de ce nouveau roman, vu l’importante recherche documentaire que l’on y trouve, ou au temps nécessaire pour trouver l’idée ?

Pierre Pevel : j’ai passé deux années sans arriver à écrire, la suppression d’Ambremer m’avait beaucoup affecté à l’époque car c’est une série que j’aime beaucoup et à laquelle j’aurais voulu ajouté un troisième tome. Ensuite j’avais poussé assez loin un projet avec Bragelonne mais qui n’a pas abouti. Heureusement avec Les lames du cardinal, j’ai réussi à mener à terme une idée qui me tenait à cœur.

Onirik : Le XVIIe siècle est visiblement une période que vous aimez particulièrement. Qu’est-ce qui vous fascine dans cette époque ?

Pierre Pevel : c’est une période que j’adore ! Ça a commencé avec Les trois mousquetaires d’Alexandre Dumas que j’ai découvert assez tard, vers vingt ans ; je suis tombé amoureux du livre, des personnages, de l’univers, du contexte historique et du genre littéraire. Ça m’a amené à faire des recherches, à lire beaucoup et à me documenter par goût personnel. Ce n’est que bien plus tard que ces recherches personnelles sont devenues la matière pour des romans.

Onirik : Dans Les ombres, il y a un héros, dans Ambremer un couple et dans Les lames c’est un groupe savamment construit : chacun des personnages a sa personnalité propre, ses défauts, ses qualités, ses zones d’ombre. Un groupe très réel, très vivant puisqu’à l’intérieur se créent des tensions. Était-ce un choix délibéré de ne pas mettre l’accent sur un des personnages en particulier ou est-ce que ça s’est fait au fil de l’écriture ?

Pierre Pevel : c’est un choix absolu ! Dans Wieldstadt, c’est un héros solitaire puis j’ai eu envie de m’essayer à la mécanique du couple et c’est devenu Ambremer, il me restait à explorer le groupe. En plus cette dynamique a un intérêt romanesque et dramatique car non seulement ça permet de typer différents personnages mais en plus ça permet d’avoir toujours des pôles d’intérêt sur lesquels se fixer. J’avais envie de raconter une bande, j’avais envie qu’il n’y ait pas un personnage qui se distingue plus particulièrement, donc je savais qu’il fallait que je les aime tous autant les uns que les autres, sinon il y aurait un favori. Ceci dit dans Les Lames, ils sont sept dont quatre importants et trois qui sont subordonnées à l’un ou à l’autre.

Onirik : Votre roman est très visuel, quand on le lit, les images viennent à nous. Est-ce votre façon d’écrire, de prévisualiser en quelque sorte les scènes avant de les retranscrire sur le papier ?

Pierre Pevel : je ne peux raconter que ce que je vois, je suis obligé de tout visualiser, même les scènes purement dialoguées. Je pense que c’est une question de génération, j’ai regardé la télévision avant d’apprendre à lire ; mes plus beaux souvenirs de fictions, ce sont les séries télé comme Mannix, Mission impossible. Moi, les histoires je les ai vues avant de les lire et je crois que ça force l’imaginaire.

Onirik : Nous n’avons pas parlé des dragons très présents dans votre roman. Dans le premier tome ils sont plutôt méchants mais je suppute qu’il en existe sept blancs qui œuvrent différemment. Ça vous vient de l’enfance l’attirance pour cette créature mythologique fascinante ?

Pierre Pevel : s’il y a une créature qui relève uniquement de la Fantasy, c’est le dragon ! Il est emblématique du genre, si on veut faire comprendre qu’un roman est un roman de Fantasy, il suffit de mettre un dragon sur la couverture. Mais l’intérêt du dragon c’est qu’il est polymorphe, on a l’impression de tout savoir à son sujet mais en fait on peut l’adapter de plusieurs manières différentes: on peut le traiter comme une force de nature à l’instar des tempêtes comme dans Wieldstadt ; dans Ambremer ce sont des créatures cultivées, anciennes ; dans Les lames, ils deviennent des créatures maléfiques en concurrence avec la race humaine ; chez d’autres auteurs ils ne sont que des créatures qui servent à se déplacer du point A au point B et à cracher sur les ennemis. Dans Les lames, j’ai essayé de mettre toutes les créatures dragonniques mais elles seules – pas d’orques ou de centaures – pour maintenir un juste équilibre entre les éléments de fantasy et la période historique.

Onirik : Dans Neverland, le magazine de Bragelonne, j’ai lu que Les lames étaient maintenant disponibles en Grande Bretagne, que les droits avaient été achetés par un éditeur américain et que c’était la première fois qu’un auteur français de fantasy était publié en anglais (ce que je ne savais pas). D’abord je tenais à vous féliciter.

Pierre Pevel : merci beaucoup, j’ose croire que la qualité du livre y est pour quelque chose, mais je sais ce que je dois à Bragelonne.

Onirik : Vous devez être heureux de pouvoir toucher ainsi d’autres lecteurs dans le monde. Est-ce que ça va changer votre façon d’écrire ? Est-ce que vous allez être tenté de chercher à toucher plus le public américain ?

Pierre Pevel : non, ça ne changera rien car l’éditeur n’a pas acheté un projet mais un livre fini. Je suis content d’être édité aux USA mais en plus chez cet éditeur particulièrement qui n’est pas une grosse machine dans laquelle je serai noyé mais un éditeur connu pour trouver des bouquins un peu particuliers et différents.

Onirik : On attend le tome 3 des Lames avec impatience. Avez-vous une idée de la date de parution ?

Pierre Pevel : Je suis en train de le finir, il sortira à la rentrée prochaine

Onirik : Pouvez-vous nous dire quelques mots de ce qui va s’y passer ?

Pierre Pevel : non (rires)

Onirik : Je me suis demandé si l’incendie prévu à Paris avait quelque chose à voir avec celui qui détruisit une partie du théâtre du Marais en 1643, bien que ça fasse un battement de 10 ans ?

Pierre Pevel : Paris a une particularité unique en Europe, c’est une ville qui n’a jamais été détruite, Londres a été ravagée par un incendie, Rome a été pillée mais Paris qui est pourtant une ville particulièrement exposée, a toujours échappé à la destruction. Donc il ne faut pas rechercher dans l’histoire pour savoir comment cette ville peut être incendiée…

Onirik : Je vous remercie d’avoir pris un peu de votre temps pour répondre à ces questions et aussi pour le plaisir de lecture que vous nous procurez.