Adieu Birkenau – Avis +

Editeur : Albin Michel

de Ginette Kolinda, JDMorvan, Victor Matet, EFA, CESC et Roger

Présentation de l’éditeur

En avril 1944, à 19 ans Ginette Kolinka est déportée au camp d’extermination Auschwitz II-Birkenau. Elle n’en parle pas durant 50 ans, avant d’accepter d’être filmée pour la « Shoah Foundation », que Steven Spielberg vient de créer. À la grande surprise de la septuagénaire, les souvenirs enfouis rejaillissent. Elle se lance à corps perdu dans le témoignage.

En octobre 2020, à 95 ans, elle permet à Victor Matet et Jean-David Morvan de l’accompagner lors d’un de ses voyages de groupe en Pologne, à l’issue duquel elle décide de ne plus jamais revenir.

Dans cet album bouleversant mis en images avec pudeur et puissance par Efa, Cesc et Roger, elle fait le point entre son premier et son dernier passage dans  » le plus grand cimetière du monde  » avec ce mélange unique de force, d’humour et d’espoir qui la caractérise.

Avis de Chris

Pour le batteur du groupe Téléphone, sa mère est comme les autres, à peu de chose près qu’elle arbore un tatouage à son bras qu’aucune autre maman n’a. Il ne comprit que tardivement la raison de cette spécificité. Pourtant, il en assimila l’importance et l’ampleur lorsqu’elle décida de témoigner 50 ans plus tard, après avoir réveillé les souvenirs de cette période qu’elle pensait à jamais oubliée. Durant la fin de la Seconde Guerre mondiale, Ginette Kolinka1 a été déportée dans le camp d’Auschwitz II-Birkenau, ainsi qu’une partie de sa famille. Elle est la seule rescapée et, dans les années 2000, elle incarne la voix de la passeuse de mémoire, afin que cet odieux crime contre l’humanité et que les millions de déportés ne soient jamais oubliés.

Adieu Birkenau s’articule alors entre passé et présent, entre souvenirs et confessions. En 2020, Ginette Kolinka accompagne une classe de jeunes adolescents à Auschwitz qui découvre alors, effarée, son témoignage poignant non dénué de second degré. C’est durant ce dernier voyage pour elle en Pologne que Victor Matet et Jean David Morvan vont débuter ce nouvel ouvrage. Elle explique à son auditoire avec bienveillance, mais sans ambages, les longs mois terribles qu’elle a vécus en tant que personne juive. On y ressent toutes les émotions qui l’ont maintenue en vie, et sa force de caractère sans pareille lors de situations innommables et inhumaines.

La personnalité de Ginette y est dépeinte avec pudeur alors même que son intimité a été bafouée à de nombreuses reprises lorsqu’elle n’était plus qu’un numéro dans un baraquement de fortune. Son instinct de survie et sa rencontre avec des personnes importantes l’ont sauvée, alors même que des milliers de ses compatriotes n’ont pas eu cette chance. A travers son regard, d’abord naïf puis éteint, le lecteur en apprend beaucoup sur les conditions de détention des femmes car, comme elle le dit elle-même, elle ne témoigne que sur ce dont elle se souvient.

Cette bande dessinée est très efficace, d’une grande qualité graphique également, car elle n’instille pas l’horreur avec des images choquantes, ni même avec des mots trop sensationnalistes. Certes, le thème se veut dramatique et très documenté, mais on est loin de certains médias traumatisants comme Nuit et brouillard2 ou Le procès d’Auschwitz. Adaptée à un public plus large, cette œuvre écrite, dessinée et colorisée par cinq paires de mains, devrait figurer dans tous les CDI des collèges et lycée français tant elle est d’utilité publique.


  1. A ce jour, elle est toujours en vie et a 100 ans. ↩︎
  2. L’auteur de cet avis a été traumatisé par Nuit et Brouillard (vu à deux reprises au Collège en cours d’Histoire), un film documentaire aux images insoutenables qui montre l’ignoble horreur des camps d’extermination. ↩︎

Fiche technique

Format : album
Page : 112
Éditeur‏ : ‎Albin Michel
Sortie : 27 septembre 2023
Prix : 21,90 €