
Depuis quelques mois, l’abréviation en deux lettres IA est sur toutes les lèvres. En effet, l’intelligence artificielle est au cœur de bien des débats, notamment lorsque l’on parle d’art. Tandis que certains justifient que l’IA ne peut pas être considérée comme une forme d’art car elle ne fait qu’utiliser des œuvres déjà existantes pour produire en un clic une nouvelle image, d’autres font le choix d’utiliser cet outil qui marque le début d’une nouvelle ère dans bien des domaines.
C’est le cas du photographe Laurent Leoncini qui expose plusieurs de ses œuvres (dont certaines utilisant l’Intelligence Artificielle) dans le cadre d’Art Capital qui se tient au Grand Palais du 19 au 22 février 2025.
Tout d’abord, Laurent Leoncini m’explique son processus de création avec l’IA : dans un logiciel, il entre une cinquantaine de ses propres photographies qui serviront de modèles, puis il écrit un prompt, c’est-à-dire une instruction ou consigne que le système d’IA devra respecter. Grâce à la combinaison de photographies proposées et au prompt écrit par Laurent, l’IA génère une nouvelle image. Malgré tout, comme il le précise, un travail de correction à l’aide de logiciels tels que Photoshop ou Blender est pour le moment nécessaire, car l’IA génère encore beaucoup d’erreurs. Tout cela prend du temps, et il faut écrire le bon prompt et « trouver des techniques pour obtenir ce que l’on veut« .
Ce qui attire Laurent Leoncini dans l’IA, c’est cette possibilité nouvelle de créer des univers et d’obtenir des résultats qu’il n’aurait pas pu obtenir auparavant, ni en photographie, ni en peinture. Lorsque je l’interroge au sujet de la controverse autour de l’utilisation de l’Intelligence Artificielle à des fins artistiques et que je lui demande si l’on peut considérer que l’IA peut être une forme d’art, sa réponse est cinglante et se fait sous la forme d’une autre interrogation : « est-ce que mettre en vente une banane ou des toilettes à 200 000 euros, c’est de l’art ? » Notre conversation s’axe alors sur l’idée que ce qui semble faire qu’un objet est reconnu comme étant de l’art n’est pas le fait qu’il soit le produit d’une création humaine ou non, mais plutôt sa valeur pécuniaire, une valeur qui n’est que le résultat de spéculation et d’opinions purement subjectives.
Lorsque je l’interroge sur les limites de l’IA qui, comme il le soulignait lui-même, propose encore à l’heure actuelle des résultats imparfaits, il me dit que ces imperfections qui nécessitent un travail de correction humaine en valent malgré tout la peine car le résultat final reste une œuvre qu’il n’aurait « jamais été capable de faire avant« .
Je lui demande alors si on pourrait considérer que l’IA est un outil qui l’assiste dans son travail de création, ce à quoi il me répond : « en fait, quand on commence à [utiliser l’IA], on a presque l’impression que c’est nous-mêmes qui l’avons fait. […] C’est une [bêtise], c’est l’IA qui le fait« . Par conséquent, Laurent Leoncini semble reconnaître qu’une image générée par Intelligence Artificielle est avant tout l’œuvre d’une machine, sans pour autant minimiser la nécessité d’impliquer la créativité humaine en amont (pour l’écriture du prompt et soumettre des photos qui serviront de modèle), et en aval (pour apporter les corrections nécessaires).
Le photographe a un avis bien tranché sur la question : l’IA est un progrès et « on ne peut rien contre le progrès ; si on va contre, on va l’avoir dans l’os un jour ou l’autre« . Cette idée est ce qui justifie son choix de faire appel à l’IA dans la création de ses œuvres. Un choix d’ailleurs payant, puisqu’il me confie que la première vente qu’il a réalisée dans le cadre de ce salon est une des quatre œuvres générées par l’Intelligence Artificielle qu’il expose en ce moment au Grand Palais.
Laurent Leoncini conclue : « ce sont les gens qui ne savent pas utiliser [l’IA] qui ont les boules. Souvent, [le résultat est] mieux que des vraies photos, et ça les [énerve]« .
En bref, que l’on soit pour ou contre l’utilisation de l’IA dans le milieu artistique, et en faveur ou opposé à sa reconnaissance comme une forme d’art, certains artistes ont choisi d’utiliser les outils à leur disposition pour créer, et malgré la controverse, un public intrigué voire admiratif existe bel et bien pour l’IA lorsqu’elle rencontre l’art.
Vous pouvez retrouver les œuvres de Laurent Leoncini au Grand Palais du 19 au 22 février, stand A8. Vous pouvez également consulter son site Internet ou sa page Instagram. S’inscrivant dans la volonté du photographe d’évoluer avec son temps, vous pouvez également consulter sa galerie d’art virtuelle.