La Zone d’intérêt – Avis +

film en coproduction de Jonathan Glazer (2024)

Présentation officielle

Le commandant d’Auschwitz, Rudolf Höss, et sa femme Hedwig s’efforcent de construire une vie de rêve pour leur famille dans une maison avec jardin à côté du camp.

Avis de Valérie

Dans la hiérarchie nazie, Rudolf Höss a une place particulière, puisque cet homme précis et rigoureux a mis en pratique ce qu’on a appelé la Solution finale, soit l’exécution et l’élimination de centaines de milliers de prisonniers, dont la plupart des Juifs d’Europe. Cette systématisation des exécutions a été pensée et mise en place, car les soldats chargés des mises à mort se fatiguaient physiquement et émotionnellement de cette lourde tâche. (cf : La Conférence)

Donc, les différents camps de travail où l’on mourrait à tout-va vont devenir sous l’impulsion de ce bon commandant une usine où l’on peut tuer et incinérer dans la foulée des milliers de personnes : l’efficacité allemande ! Sa responsabilité ne fait donc aucun doute, car outre la gestion des camps, il a tout mis en place pour améliorer le débit afin de désengorger les arrivées.

Ce terrible cynisme est l’ambiance dans laquelle baigne la famille Höss. Femme et enfants vivent dans une très belle maison doté d’un grand jardin, accolée à l’enceinte d’où on voit sans discontinuer les cheminées des incinérateurs fonctionner. À la fin de la guerre, s’est posée la question de la responsabilité de la mère, Hedwig, ce qui est finalement le sujet du film, renvoyant vers toute personne non directement impliquée mais complice volontaire de l’horreur, quelle qu’elle soit.

La force du film, en plus de l’incroyable talent des deux acteurs principaux Sandra Hüller et Christian Friedel, est que jamais le spectateur ne verra quoi que ce soit de ce qui se passe au-dehors de l’enclave familiale. On entend, des coups de feu, des cris, des sirènes, mais ce sont ces fumées persistantes, envahissantes, éternelles, qui sont impossibles à ignorer. C’est lunaire et incroyablement malin, car le spectateur est obligé de se mettre à la place des habitants de la maison.

Ce film est génial, et se doit d’être vu, pas seulement pour honorer la mémoire des millions de morts de la Shoah, mais pour la mécanique déshumanisante qui est ici démontrée avec clarté. Ce qui nous différencie en tant qu’humain du barbare est justement notre capacité à refuser cette indicible volonté d’anéantissement.


Fiche technique

Sorti : 31 janvier 2024
Durée : 105 minutes
Genre : drame historique
Avec Christian Friedel, Sandra Hüller, Johann Karthaus…
Titre original : The Zone Of Interest