Editeur : J’ai lu
roman de Victor Guilbert
Présentation de l’éditeur
Hugo Boloren a perdu la bille. Celle qui l’accompagne dans ses enquêtes et qui fait « ding » pour le mettre sur la bonne piste. Neurasthénique, il erre dans le commissariat, au grand dam de Lulu la stagiaire. Il est temps de changer d’air.
Justement, alors qu’il s’apprête à emmener sa mère à un rendez-vous médical chez un spécialiste lillois, Hugo apprend qu’un garçon de dix ans s’est fait agresser dans une immense décharge publique à la frontière franco-belge jouxtant la Terra nullius, un camp de laissés-pour-compte.
Son instinct lui dicte d’aller jeter un oeil à ce territoire sans maître, mais il est loin de se douter que l’attend là-bas l’affaire criminelle la plus sordide de sa carrière.
Avis de Thérèse
C’est dans Douve que Victor Guilbert nous a fait découvrir son étrange policier, l’inspecteur Hugo Boloren. Et c’est suite à la traumatisante enquête de Douve que Boloren a perdu sa bille, celle qui tourne dans sa tête et qui fait « ding » quand il est sur la bonne voie. Puisqu’il se refuse à consulter quelque psy que ce soit, son commissaire l’envoie rencontrer… une paléontologue. Ce même commissaire lui a décroché un rendez-vous avec un spécialiste lillois pour sa mère atteinte d’Alzheimer.
Alors qu’il s’apprête à prendre le train avec sa mère, Boloren apprend qu’un enfant d’une dizaine d’années a été agressé dans une décharge publique près de Lille. Au même moment, Lulu la stagiaire, à qui on a confié une pile de vieux dossiers, alerte Boloren sur l’existence d’un mystérieux « trimoin ». Quelque chose se met à frémir au fond de son cerveau, il a l’impression que tout est lié, il décide de faire du tourisme policier pendant le séjour de sa mère dans la clinique du Nord.
Voilà qui ne donne qu’une vague idée de l’univers étrange, à la fois sombre et farfelu, que Victor Guilbert a créé dans ce roman. Car il y a bien plus à découvrir, au fur et à mesure.
Terra Nullius, c’est le nom d’une zone située près de la frontière franco-belge, dont chacun des deux pays aimerait se débarrasser. Terra Nullius, c’est un camp à proximité d’une décharge, où se côtoient réfugiés, migrants, sans-abri et autres laissés pour compte.
Dès le prologue, on découvre Jimcaale, une dizaine d’années, il vit dans le bidonville, la décharge est son terrain de jeu, il y joue au super-héros et déclare avoir trouvé un trésor qui va sauver tout le monde. Mais violemment frappé, il sombre dans le coma.
Dans cette enquête un brin surréaliste qui va durer six jours, Boloren va faire la connaissance de ses collègues lillois et côtoyer un fantôme noir, un petit garçon chinois, un photographe peut-être un peu pédophile, un Cambodgien taciturne, la vieille Sara qui a élevé Jimcaale, un cuisinier à la tête d’une émission de télé, le chien Magnétophone qui ne ressemble pas à un magnétophone, Mani qui règne sur le bidonville, deux Indiennes très agressives, un chauffeur de taxi philosophe et météorologue, et bien d’autres encore. Le talent de Victor Guilbert, c’est de réussir à rendre chacun de ces personnages vivants, chacun a sa personnalité, son histoire, ses zones d’ombre.
Toujours aussi imprévisible dans sa manière d’enquêter, en croquant les morceaux de chocolat de son étui à cigarettes et en buvant la bière locale, Boloren va devoir reconstituer un puzzle sordide, tout en essayant de prendre de vitesse sa bille revenue, histoire de lui prouver qu’il n’a pas besoin d’elle.
Avec son style bien particulier, d’une écriture fluide, limpide, teintée d’humour et d’humanité, Victor Guilbert nous plonge dans une histoire où tout est sombre, désespérant, angoissant, et pourtant son roman semble dégager une lumière : celle de ce petit garçon qui ne grandira pas, cet enfant qui dégage une sorte d’aura surnaturelle même pour ceux qui ne le verront que dans le coma. Terra Nullius aurait aussi pu s’appeler Lille au trésor de Jimcaale…
Bravo à Victor Guilbert pour ce tour de force.
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Fiche technique
Format : poche
Pages : 352
Éditeur : J’ai lu
Sortie : 8 mars 2023
Prix : 8,50 €