Le Bal des folles – Avis +/-

Présentation officielle

1885 : comme chaque année, à la Salpêtrière, se tient le très mondain « bal des folles ». Le temps d’une soirée, le Tout-Paris s’encanaille sur des airs de valse et de polka en compagnie de femmes déguisées en colombines, gitanes, zouaves et autres mousquetaires. Cette scène joyeuse cache une réalité sordide : ce bal « costumé et dansant » n’est rien d’autre qu’une des dernières expérimentations de Charcot, adepte de l’exposition des fous.

Dans ce livre terrible et puissant, Victoria Mas choisit de suivre le destin de ces femmes victimes d’une société masculine qui leur interdit toute déviance et les emprisonne. Parmi elles, Geneviève, dévouée corps et âme au célèbre neurologue ; Louise, abusée par son oncle ; Thérèse, une prostituée au grand cœur qui a eu le tort de pousser son souteneur dans la Seine ; Eugénie enfin qui, parce qu’elle dialogue avec les morts, est envoyée par son propre père croupir entre les murs de ce qu’il faut bien appeler une prison.

Avis de Chris

A la fin du XIXe siècle, l’hôpital de la Pitié Salpêtrière est dirigé par le professeur Charcot, éminent neurologue, aussi reconnu par ses pairs que par le tout-venant. Les pensionnaires de cet asile sont toutes des femmes considérées comme folles, car hystériques, épileptiques, mélancoliques, traumatisées ou simplement n’ayant pas les « bonnes » pensées.

Chaque année, à la mi-carême, un bal est organisé mêlant les folles aux bourgeois triés sur le volet. Cette soirée est une occasion rêvée pour observer celles qu’on enferme contre leur gré et qu’on dissimule à la vue de tous, telles des pestiférées. Pour les patientes, c’est une occasion de voir le monde, alors les semaines qui précèdent ce bal met l’asile en effervescence.

C’est dans ce contexte animé que Geneviève Gleizes, l’intendante en chef de la Salpêtrière et grande admiratrice de Charcot, voit tout ce qu’elle idéalise se fissurer après sa rencontre avec Eugénie, une nouvelle « folle », abandonnée par son père et son frère. Son tort : converser avec les morts.

Le Bal des folles témoigne d’un passé douloureux pour les femmes qui dérangeaient une société totalement patriarcale dévolue au contrôle entier de leurs épouses, filles, petites filles, voisines ou simple ombre avec un vagin. C’est à travers le parcours de plusieurs d’entre elles, emprisonnées dans cet asile, que l’on plonge dans ce court roman.

Seulement, l’écriture manque de finesse et, bien que l’ouvrage se dévore d’une traite, l’auteur ne met pas assez en valeur les terribles traumatismes des héroïnes. Par ailleurs, les événements sont toujours prévisibles, notamment dans la dernière partie cousue de fil blanc. En outre, il est dommage que les hommes soient seulement présentés comme des êtres cruels envers les femmes. Pas un seul, à part Théophile, le frère d’Eugénie, ne montre un minimum d’humanité et de bienveillance à l’encontre des femmes.

On accuse également un manque de réalisme, bien que le roman aborde des sujets forts et réels. C’est d’autant plus palpable qu’il s’appuie sur un personnage qui remet tout en cause : Eugénie et sa possibilité de parler au morts. Au vu de la façon dont sont décrits les passages de communication entre la jeune femme et les défunts, on ne peut à aucun moment affirmer qu’elle a une pathologie mentale. Tous ce qu’elle apprend des esprits ne peut pas être le fruit du hasard, ni de son imagination. Elle a un véritable don ésotérique.

Ainsi, Le Bal des folles peut se révéler décevant, voire frustrant. L’épilogue n’aide en rien à dépasser ces sentiments. Trop bref, il évoque à peine ce qu’advient les personnages principaux. Et, à cause de ce côté fantastique, le roman perd en intensité, alors que le propos traité est très intéressant et mérite d’être connu du plus grand nombre.

Note : Une adaptation en film est disponible sur Amazon Prime.

Fiche technique

Format : poche
Pages : 240
Editeur : Le Livre de poche
Sortie : 31 mars 2021
Prix : 7,40 €