Graine de sorcière – Avis +

Présentation de l’éditeur

Margaret Atwood réécrit Shakespeare avec brio dans ce nouveau roman rocambolesque et savoureux. Une histoire de vengeance mais aussi de rédemption et surtout une réflexion sur le pouvoir infini de la littérature.
Injustement licencié de son poste de directeur du festival de Makeshiweg, au Canada, alors qu’il mettait en scène La Tempête de Shakespeare, Felix décide de disparaître. Il change de nom et s’installe dans une maisonnette au cœur de la forêt, pour y panser ses blessures, pleurer sa fille disparue. Et préparer sa vengeance.

Douze années passent et une chance de renaître se présente à Felix, l’occasion de donner des cours de théâtre dans une prison. Là, enfin, il pourra voir sa troupe de détenus jouer La Tempête, et tendre un piège aux traîtres qui l’ont détruit. Mais la chute de ses ennemis sera-t-elle suffisante pour permettre à Felix de s’élever à nouveau ?

Le nouveau roman de Margaret Atwood, la grande dame des lettres canadiennes au succès phénoménal, est un hommage à Shakespeare, à travers une prose sublime, déchirante et drôle à la fois.

Avis de Thérèse

En 2017, à l’occasion du 400e anniversaire de la mort de William Shakespeare, la maison d’édition britannique Hogarth a demandé à plusieurs écrivains de réécrire une de ses pièces pour le public contemporain. En s’attaquant à La Tempête, Margaret Atwood relève le défi avec brio, même si cet exercice obligé l’éloigne des thèmes habituellement abordés dans ses romans.

Caractériel, égocentrique, Felix Phillips, le personnage central du roman, n’est même pas quelqu’un de sympathique mais on a forcément un peu d’indulgence pour cet homme sur qui le sort s’acharne : sa femme meurt à la naissance de leur fille unique, puis celle-ci décède à l’âge de trois ans. Metteur en scène d’avant-garde à la tête d’un festival de théâtre, il est brutalement évincé par son bras droit alors qu’il était en train de préparer une mise en scène de La Tempête de Shakespeare.

Sans plus rien pour le rattacher à la vie, il renonce à tout, change de nom et se réfugie dans une bicoque délabrée, avec pour toute compagnie le fantôme de Miranda, sa fille.

Quelques années plus tard, sous son faux nom, il reprend son rôle de metteur en scène auprès de prisonniers, dans le cadre d’ateliers de réinsertion. Ses méthodes pédagogiques, peu orthodoxes, se révèlent tout à fait passionnantes. Et c’est dans cette prison que le destin va lui fournir l’occasion de se venger de ceux dont les manigances l’ont éjecté de sa vie précédente…

C’est à partir de là que Margaret Atwood laisse se développer tout son talent, dans cette mise en abîme de la pièce de l’Anglais, quand Felix, tout en mettant en scène la pièce dans laquelle Prospero réalise sa vengeance, va mettre également en scène sa propre punition.

Les exercices que Felix demande à ses comédiens/détenus mettent en avant le modernisme des textes de Shakespeare. Sa manière de leur faire appréhender la personnalité de chaque personnage, les réécritures de certaines scènes en langage actuel, les chansons de la pièce transformées en rap, tout cela est passionnant, plein d’humour, surprenant.

Margaret Atwood nous livre un roman de vengeance, alliant lenteur et rythme, qui est en même temps une véritable leçon de littérature, une leçon de théâtre et une relecture totalement jubilatoire et irrespectueuse de la pièce (mais Shakespeare ne lui en voudrait sans doute pas, lui-même n’était pas particulièrement respectueux).

Et Felix, même totalement obnubilé par sa vengeance, est finalement le professeur de littérature qu’on rêverait d’avoir !

Fiche technique

Format : poche
Pages : 360
Éditeur : 10/18
Sortie : 11 juin 2020
Prix : 8,10 €