Rencontre avec Cecelia Ahern

Onirik a eu la chance de rencontrer Cecelia Ahern à l’occasion de la cinquième édition du Prix Milady des lectrices qu’elle vient de remporter.

Onirik : Les Jours meilleurs est un livre sur le fait d’avoir une seconde chance, d’en accorder ou d’en bénéficier. Justement, d’après vous, une seconde chance est-elle toujours possible ?

Cecelia Ahern : Oh oui ! Absolument, et quelle que soit l’erreur. Ce sont des valeurs indispensables. Dans mon premier livre, Ps. I love you, mon héroïne perd son mari. Dans Les Jours meilleurs, c’est la première fois qu’une de mes héroïnes est fautive. Kitty, mon personnage principal, a commis une erreur, et c’est entièrement sa faute, tout ce qu’il lui arrive. Elle est prête à se racheter, de faire amende honorable, à retrouver son honneur, alors, oui, que serait la vie sans ces valeurs ? Ce serait tellement triste si on ne pouvait avoir de seconde chance.

Onirik : Dans le livre, votre héroïne Kitty a fait une erreur de jugement à propos d’un homme qui se retrouve accusé à tort. Vous êtes-vous inspiré d’un réel fait divers ?

Cecelia Ahern : Non, pas vraiment. Bonne question. Mais c’est vrai que quand j’écrivais, vers la fin, il y avait une affaire, une histoire qui ressemble à celle que je décris. Donc, savoir que c’était vraiment arrivé m’encourageait à continuer dans ce sens. En effet, aussi fabuleux sont les journalistes, ils n’ont pas toujours raison. Donc oui finalement, en quelque sorte, j’ai été inspirée par cet événement, en partie.

Onirik : Il y a un personnage fascinant, une sorte de « marraine la bonne fée » dans le livre, il s’agit d’une Française, Constance, vous a-t-elle été inspirée par une ou des personnes existantes ?

Cecelia Ahern : (rires) Mon personnage français ! Elle est très ferme et stoïque, et la plupart des choses qu’elle dit à Kitty, c’est ce que je me dis à moi même. Donc je ne suis pas Kitty, je suis plus Constance ! Les conversations qu’elles ont sont des conversations que j’ai avec moi même. Constance c’est moi ! J’ai écrit plus de quinze romans. Je n’ai pas envie d’écrire quinze fois Ps. I love you, vous savez, j’ai envie d’écrire différentes choses, dans différentes catégories, et j’entends cette voix de Constance me dire, « Fais ce que tu as à faire. »

Onirik : Il y a dans vos livres, malgré des sujets parfois durs, un authentique optimisme, on trouve aussi les thèmes du partage, de l’entre-aide, de la transmission. Ce sont des valeurs qui vous tiennent à cœur dans vos romans ?

Cecelia Ahern : Oui, absolument. Je commence toujours un livre avec une idée en premier. Après, j’imagine les personnages, et ce qu’ils font. L’histoire nourrit les personnages et les personnages nourrissent l’histoire. La première idée vient toujours au premier jet, comme dans Les Jours meilleurs. Je ne cherche pas à faire la morale, ni à changer la vie de personne, parce que j’écris des livres pour les émotions. Au départ, j’écris des histoires pour moi, mais finalement il y a toujours un message qui aide les gens, d’après les retours que j’en ai. Et moi je me sens bien quand je les écris, quand je travaille sur un problème, et que je trouve la solution. Je me sens mieux !

Onirik : Dans le titre en version originale, on trouve la référence aux fameux cent noms qui donnent la dynamique au récit. Comment vous est venue cette idée ?

Cecelia Ahern : Voilà probablement la réponse la plus intéressante que je peux donner sur un de mes livres ! C’est toujours difficile d’expliquer d’où vient une idée. Mais là, non. J’étais à la maison, je regardais les MTV Movies Awards, et j’entends une actrice présenter la bande-annonce de son nouveau film Hundred names (cent noms). Et j’ai adoré ce titre. Mon imagination a commencé à créer sa propre idée. « Bon il y a une liste de cent noms, quelqu’un doit les relier entre eux« , et là j’ai commencé à penser à tout ça dans ma tête, et en même temps, la télé continuait et je comprends que ce n’était pas Hundred names, mais Hunger games, (rires) !

Alors j’ai tout de suite vérifié sur Google si un livre ou un film s’appelaient comme ça, si j’avais pu l’entendre ailleurs, mais non, et donc j’ai pensé à ces cent noms et à une personne qui chercherait à les relier entre eux. Mais c’était un problème, car cent personnages, ça fait beaucoup. Je n’arrivais pas à écrire. Ça faisait trop. Je me disais c’est une bonne idée, mais trop énorme. Est-ce qu’elle va vraiment le faire ? (rires)

Onirik : Comment travaillez-vous ? Quelles sont vos petites manies d’écrivain si vous en avez et si vous voulez bien nous en parler ? Avez-vous des petites habitudes ?

Cecelia Ahern : Oui, exactement, j’en ai. Je travaille depuis mon bureau, en dehors de la maison, donc je pars de chez moi, je marche jusqu’au boulot, ce qui est bien, c’est une très jolie pièce dans laquelle je travaille, je lui dis « bonjour bureau ! » C’est mon joli échappatoire, j’allume toujours une bougie quand je travaille, qui sent le citron, le basilic et la mandarine, c’est la première odeur que je sens. J’adore. J’écris à la main, avec stylo et papier, car je suis un peu démodée (rires), j’écris quelques chapitres, puis je recopie sur informatique. Je travaille de janvier à juin. Je corrige l’été et je publie en automne. C’est très discipliné. Je viens juste de finir mon 17e livre !

Onirik : Si vous pouvez nous en parler justement, quel est le sujet de votre prochain roman ?

Cecelia Ahern : Oui, celui que je viens de finir. Ce sera un livre de nouvelles à propos de trente femmes, elles ne sont pas reliées entre elles mais pour chacune, elles sont dans leur vie dans un moment de transition, vous savez quand vous avez besoin de « arghhhh » (Cecelia fait un geste de colère). Le livre s’appelle Roar (rugir). Ce sont des femmes qui se battent, et qui osent parler. J’y travaille depuis cinq ans. C’est un projet que je poursuis avec passion. Entre mes romans j’écrivais toujours des nouvelles, ces cinq dernières années, pour arriver à ce but. J’espère qu’il sera traduit en français. C’est le livre dont je suis la plus fière. J’aime tous mes livres, mais dans celui-ci je me suis beaucoup investie, jusque dans la couverture, dans tout en fait, j’avais une vision de ce livre, parce qu’il est si différent.

Onirik : Parmi les auteurs que vous lisez, quels sont ceux qui vous inspirent ?

Cecelia Ahern : Je lis absolument de TOUT ! J’aime tout, les thrillers, et surtout des traductions du monde entier, par exemple, j’ai des listes, pour le Japon ou autre, je lis tout.

Onirik : Est-ce que cela vous influence sur votre écriture ?

Cecelia Ahern : Oui. Oui, je crois que si… j’aime lire des histoires très différentes de pays où je ne suis jamais allée, bon, quelques fois, vous aimez des choses familières, ou que vous pouvez identifier, mais moi j’aime aller à la rencontre de choses que je n’ai jamais expérimentées, de pays où je ne suis jamais allée, c’est cela que j’aime. J’aime voyager tout en restant à la maison.

Onirik : Est-ce que cela a changé quelque chose pour vous de connaître le succès aussi jeune (avec Ps. I love you, en 2004) ?

Cecelia Ahern : Je l’ai pris comme un immense encouragement, je n’avais que 21 ans. C’était mon premier livre, j’ai commencé à écrire pour moi. Je n’avais pas l’intention de le publier. Je sortais de l’université, je me demandais quoi faire dans la vie. Ma maman m’a beaucoup encouragée, elle m’a dit de le faire publier. Ça a été un bouleversement, vous savez, parce que je n’avais pas de boulot, pas d’argent, j’habitais chez mes parents, et subitement j’avais une carrière, je voyageais partout dans le monde, et je me retrouvais à expliquer ma façon d’écrire (rires). Alors que moi j’avais juste voulu écrire, et que j’avais essayé, c’était tout. Alors oui tout a changé après ça, il y a eu le film, j’ai écrit très vite quinze livres après tout ça. Si quelque chose me donne du courage et de la confiance, c’est que j’écris toujours de la même manière, je m’assoie, je commence à écrire, pour moi, bon plus en pyjama (rires) j’ai grandi, mais c’est pareil, je n’attends rien de spécial, je ne me mets pas la pression. Le succès ça peut tout bouleverser et vous freiner, vous empêcher d’avancer, mais je n’ai pas peur. Parfois j’écris un livre que j’avais besoin d’écrire pour moi uniquement, et ça marche, alors je suis contente, un éditeur déteste entendre ça (rires) ! J’essaie de me réinventer à chaque livre, de me lancer des défis, c’est comme ça que ça fonctionne.

Onirik : Pouvez-vous nous dire si d’autres romans que vous avez écrit sont en cours d’adaptation ?

Cecelia Ahern : Oui ! et je suis très frustrée car je ne peux pas vous en parler ! Oui ! je travaille dessus avec des gens incroyables aux Etats-Unis, et vous savez ce sera le plus gros truc que j’ai jamais fait ! donc on croise les doigts.

Onirik : Un petit mot pour les lectrices françaises qui ont plébiscité votre roman ?

Cecelia Ahern : Merci me semble être la plus importante des choses à dire. Merci de lire mes livres, et comme ils sont très différents, je dirais, aux personnes qui n’ont jamais lu mes livres, ou qui n’ont lu que Ps. I love you et qui pensent qu’ils sont tous les mêmes, et bien, j’aimerais que les gens aient envie de découvrir mes livres, tous mes livres, qu’ils se rendent comptent qu’ils sont tous uniques, c’est toujours moi et ma voix, mais c’est autrement. Merci beaucoup !

Merci beaucoup à Cecelia Ahern, et à l’équipe de Milady !