The Social Network – Avis +

Présentation officielle

Une soirée bien arrosée d’octobre 2003, Mark Zuckerberg, un étudiant qui vient de se faire plaquer par sa petite amie, pirate le système informatique de l’Université de Harvard pour créer un site, une base de données de toutes les filles du campus. Il affiche côte à côte deux photos et demande à l’utilisateur de voter pour la plus canon. Il baptise le site Facemash.

Le succès est instantané : l’information se diffuse à la vitesse de l’éclair et le site devient viral, détruisant tout le système de Harvard et générant une controverse sur le campus à cause de sa misogynie. Mark est accusé d’avoir violé intentionnellement la sécurité, les droits de reproduction et le respect de la vie privée. C’est pourtant à ce moment qu’est né ce qui deviendra Facebook. Peu après, Mark crée thefacebook.com, qui se répand comme une trainée de poudre d’un écran à l’autre d’abord à Harvard, puis s’ouvre aux principales universités des États-Unis, de l’Ivy League à Silicon Valley, avant de gagner le monde entier…

Cette invention révolutionnaire engendre des conflits passionnés. Quels ont été les faits exacts, qui peut réellement revendiquer la paternité du réseau social planétaire ? Ce qui s’est imposé comme l’une des idées phares du XXIe siècle va faire exploser l’amitié de ses pionniers et déclencher des affrontements aux enjeux colossaux…

Avis de Nicolas

Dans la critique du livre de Ben Mezrich, je disais: “L’intrigue, si j’ose qualifier ainsi le fil de ce récit, reste néanmoins bien maigre et on peut légitimement se demander s’il y a matière à la réalisation d’un film de 90 minutes.”[[mais voilà, qu’il s’autocite, le cuistre… Pire, il parle de lui à la troisième personne !!!]]. Me voilà bien obligé de reconnaître mon erreur. On peut en faire un film. Un film de 120 minutes. Un bon film même. C’est une véritable réussite, à plusieurs niveaux.

L’adaptation en scénario ne vient pas trahir le livre qui l’a inspiré, ce qui m’importait beaucoup car j’avais apprécié le portrait acerbe de The Accidental Billionnaire. Sorkin a fait un job parfait en portant au cinéma l’ouvrage de Mezrich. Le scénariste de The West Wing décale le récit initial qui portait principalement sur le témoignage d’Eduardo pour le recentrer sur Mark.

On se laisse emporter dans un entremêlement de flashbacks qui viennent entrecouper les auditions des deux procès qui opposent simultanément Zuckerberg à Saverin d’un côté et aux jumeaux Winklevoss de l’autre. Toute la qualité du scénario réside dans cette capacité à ne pas perdre le spectateur, tout en l’obligeant à un minimum d’attention. Sorkin explique pragmatiquement que la vitesse des dialogues est uniquement due à la difficulté de faire tenir 166 pages de scénario dans deux heures. Vrai ou pas, cela insuffle un rythme ahurissant dans les échanges entre les protagonistes et au final à l’ensemble du film. Ils sont jeunes et brillants. Ils pensent vite. Ils parlent vite.

Les caractères (romancés?) sont dépeints fidèlement au livre. Zuckerberg est affublé d’un complexe de supériorité détestable tout en apparaissant véritablement talentueux. Tour à tour intrigué par le monde et les réactions des gens, féroce envers la médiocrité, jaloux, parfois (méchamment) drôle, il est surtout doté d’une vision claire sur le développement de son projet. Le film se conclue cependant sur une scène inexistante dans le livre, cette discussion avec l’avocate vient adoucir le portrait au vitriol du jeune milliardaire dont l’image se voit sévèrement malmenée pendant deux heures.

Jesse Eisenberg est parfait dans le rôle de Mark Zuckerberg. Oscar material disent certains. C’est peut-être un peu exagéré, cependant il incarne parfaitement cet étudiant caustique à la limite de l’autisme. Pas d’incertitude[[oui, je sais, pas de “H”, j’ai accès à wikipedia, moi aussi…]], il est bon. Les frères Winklevoss sont joués par deux acteurs à qui on a plaqué la tête de l’un sur l’autre, miracle de la technologie, on ne se rend à aucun moment compte de l’artifice. Justin Timberlake est suffisamment crédible dans le rôle de Sean Parker pour qu’on oublie que c’est… Justin Timberlake.

Je ne suis en rien spécialiste des technologies décrites quand Zuckerberg collecte les photos pour son site facemash.com, mais on y croit. Tout cela paraît réaliste (emacs, perl, php, scripts…). Donc pas d’effet Opération Espadon ici… Les vrais informaticiens se feront sûrement plus tatillons.

Côté réalisation, David Fincher présente un travail digne de ses précédents opus. A noter la course d’aviron en tilt-shift, petit clin d’œil aux vidéos qui pullulent sur internet. L’ensemble est mis en rythme par l’excellente bande son de Trent “Nine Inch Nails” Reznor, véritable cerise sur ce gâteau.

Anecdote/clin d’oeil trouvé sur IMDB : au cours d’une déposition, Facebook est décrit par un des avocats comme la plus grande invention d’un campus qui a pourtant engendré 19 prix Nobel, 15 Pulitzer, 2 futurs champions olympiques et une star de cinéma. Un avocat demande alors qui est la star et se voit répondre “est-ce important?”.

La star en question est Natalie Portman qui a été à Harvard de 1999 à 2003 et qui a aidé Aaron Sorkin dans l’écriture de son script en lui offrant un regard “de l’intérieur” sur le campus alors que Facebook faisait son apparition.

The Social Network offre un point de vue sur la genèse controversée d’un véritable phénomène de société, dont la forme brillante ne masque pas pour autant un fond plus intéressant que la simple histoire d’un site web. C’est le témoignage d’une époque, la description d’un autre capitalisme façon XXIe siècle qui n’a rien à envier aux requins de Wall Street 2 .

Sujet de réflexion plagié sur les animateurs de the TRS qui s’interrogeaient sur l’exactitude “historique” de ce livre/film et se demandaient avec pertinence si au final, dans l’inconscient collectif, il ne restera que cette version romancée des faits… Véritable injustice pour Mark Zuckerberg ? Il lui restera cependant quelques milliards pour se consoler.

Facemash

Who’s hotter ?

Fiche Technique

Scénario de Aaron Sorkin d’après le livre de Ben Mezrich

Avec Jesse Eisenberg, Armie Hammer, Joseph Mazzello, Andrew Garfield

Durée : 120 minutes

Sortie : 13 octobre 2010