Me faire ça à moi ! – Avis +

Présentation de l’éditeur

«L’humour, c’est connu, se pratique au premier, au deuxième voire au troisième degré selon que l’on a ou non l’esprit d’escalier. Jean-Do, le héros du roman, cumule l’esprit d’escalier, les vertus alpestres des grands séducteurs et un sens de l’humour qui, degré par degré, fait gagner son lecteur à la Loterie nationale du rire.

Jean-Do fait rire. D’abord, privilège du désespoir, de lui-même, encore et toujours acteur de ses ridicules de fils de famille, né une cuillère nickelée dans la bouche et un baobab dans la main, tout occupé de lui-même, de ses conquêtes, de ses caprices. Il fait rire ensuite de ses semblables, les oisifs et les oisives du grand monde qu’il décrit avec la précision jubilatoire d’un ornithologue traquant l’oie blanche, le merle moqueur et la vieille VIP. Mais ce n’est pas tout.

Jean-Do a des problèmes de conscience, des tourments métaphysiques, des interrogations philosophiques pour lesquelles il n’a d’autre interlocuteur que l’Éternel, c’est-à-dire Marcel Proust. Un Marcel mélancolique, observant que son temps perdu n’est pas retrouvé, et que Jean-Do a beau se décarcasser, il n’est pas prêt de le rapporter aux objets trouvés.

Si en anglais “ swan ” est un cygne noir, pour Pierre Grimblat, Jean-Do (Swann) est un signe qui glisse avec élégance sur le lac de la page blanche et s’envole vers les cieux toujours bleus où l’humour abolit les nationalités.» 

Gerard Mordillat

Avis d’Enora

Nous connaissions son génie de poète et de cinéaste, nous avions découvert son talent d’écrivain avec Recherche jeune homme aimant le cinéma , mémoires retraçant l’ascension de ce fils d’émigrés juifs autrichiens ; aujourd’hui Pierre Grimblat nous comble de joie en nous livrant un premier roman savoureux.

Son héros est Jean-Dominique Langlois, plus communément appelé Jean-Do, fils de fabriquant de robinets, qui à force de mensonges, va frauduleusement s’introduire dans le « grand monde », celui de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie, avec la crainte perpétuelle de se faire démasquer et chasser.

Un jour, il reçoit Le dictionnaire égoïste de la littérature française et en lisant l’article sur le roman, « récit d’une modification, celle du personnage principal », il se dit qu’il est « un personnage principal » et qu’il doit écrire le véritable roman de sa modification, le récit de ce qui l’a transformé au fur et à mesure de son parcours périlleux sur la planète parisienne.

« Quelle est cette métamorphose, moins dure, d’accord, que celle de Kafka ? Récapitulons : désirant briller dans un monde de cons, je décidai d’être encore plus con que les autres, de façon ostentatoire, brillante et sophistiquée. Je fus le seul qui ait longtemps écouté les femmes tomber plutôt que la pluie. »

Pourtant l’écrivain de la famille ce n’est pas lui mais son frère, que ses succès de librairie viennent de consacrer au Goncourt. Lui, il n’a jamais ouvert un seul des cent cinquante livres que son décorateur a exposé dans son salon, pour que leur reliure havane rappelle le cuir de son canapé. Mais un jour un déclic va tout changer : invité à une soirée dinatoire par le prix Nobel de littérature, il décide de faire la lecture accélérée de sa bibliothèque, en trente trois jours, et découvre A la recherche du temps perdu. Pas d’erreur, il est Swann, Proust a fait son portrait comme s’il l’avait intimement connu…

Pierre Grimblat décrit avec Jean-Do une espèce de Swann d’aujourd’hui, mais qui serait drôle, gaffeur, naïf et possédé par des pulsions de sincérité aux conséquences souvent désastreuses mais toujours jubilatoires. Son héros nous fait rire par son inconscience à dire les pires vérités, mais il nous émeut et nous touche aussi par sa candeur et sa quête du temps perdu. L’écriture est envolée, mordante, cynique ; le style vif et lapidaire. Un vrai bonheur de lecture !

Fiche technique

Format : broché
Pages : 252
Editeur : Michel de Maule
Sortie : 14 octobre 2010
Prix : 19 €