Présentation de l’éditeur
Brisée à la fois dans sa chair et dans son être le plus profond par une agression brutale, Eve Wilson s’est réfugiée dans l’univers virtuel de Shadowland. Là, loin des rues encombrées de Minneapolis, elle se projette dans une vie qui n’est pas la sienne, espérant tenir sa douleur à distance.
Mais alors qu’elle commence à recouvrer une certaine sérénité, plusieurs des femmes qui comme elle, fréquentent Shadowland se suicident mystérieusement. Et, de nouveau, Eve est assaillie par la peur : le monde auquel elle tente de se raccrocher serait-il tout aussi monstrueux que celui qu’elle essaye de fuir ? Bouleversée, elle se tourne alors vers l’inspecteur Noah Webster, chargé de l’enquête. Un homme secret, lui aussi hanté par ses démons.
Il lui apprend bientôt qu’il s’agit de meurtres maquillés en suicides : les victimes ont été retrouvées vêtues de rouge, outrageusement maquillées, la terreur se lisant encore dans leurs yeux. Profondément choquée par ces révélations, Eve propose à Noah de le conduire dans les méandres de cet univers de l’ombre où le tueur repère ses proies. Sans savoir que l’assassin a déjà préparé pour elle une robe écarlate.
Avis de Marnie
Heureusement, Karen Rose a du talent, beaucoup de talent, pour nous faire passer cette histoire qui se joue en quelques jours de tension, rythmés par des meurtres qui s’enchaînent méthodiquement dans une atmosphère glaciale et dramatique. Honnêtement, pour la première fois, on sent tout de même la mécanique se mettre en place, la redite, et le déjà vu. L’auteur semble nous refaire Le lys rouge, en intégrant deux intrigues parallèles, et l’on appréciera par exemple l’originalité et les surprises de Tu périras par le feu. Heureusement, nos deux héros très attachants, ainsi que l’intervention des personnages secondaires rattrapent cette lassitude menaçante.
Finissons en avec les déceptions avant de passer aux grandes qualités de ce roman. Tout d’abord, l’héroïne qui en six ans va se retrouver agressée par trois serial killers… c’est beaucoup, beaucoup, et lorsque le héros le remarque, tout étonné de la trouver courageuse, cela interpelle, et on souhaite plutôt lui mettre un bon coup sur le nez ! Donc, oui, cela ne fait pas très crédible, on ajoute deux énormes coïncidences franchement too much et un tueur en série dont on devine l’identité… au moins à la moitié du récit : on ne peut s’empêcher de faire la grimace, agacé. Mais, il y a donc un « mais », l’intensité, la conviction, l’empathie que l’on éprouve pour les personnages balayent très vite nos objections.
Eve, aussi fragile que forte, qui surmonte à force d’obstination ses traumatismes, est une héroïne idéale. Apparue à tous âges dans plusieurs romans de Karen Rose, qui a la particularité de reprendre un bon tiers de ses personnages dans tous ses romans, de faires des corrélations entre ses livres et ses séries, intégrant le plaisir de retrouver des héros des années plus tard, tout en faisant vieillir d’autres pour leur permettre de devenir des personnages principaux à leur tour, et bien notre petite Eve a mûri, et souhaite, comme les personnes qui l’ont élevée, aider les autres – et elle-même – en devenant psychologue.
La bonne idée est que la tension sentimentale est déjà sous-jacente lorsque commence le roman. Eve et Noah, même s’ils ne se sont pour ainsi dire jamais adressés la parole, ont beaucoup de choses en commun. Nous assistons à l’ingérence bienvenue ou maladroite des amis, familles, collègues, ce qui apporte une vraie chaleur, en contrepied de l’enquête froide, méticuleuse, laborieuse, de trouvailles en fausses pistes qui se déroule sous nos yeux (toujours un des grands points forts de Karen Rose) de vérifications tatillonnes en scénettes tragiques de mise en scène des meurtres.
Au final, même si le schéma reste tout de même hyper classique et repose sur une mécanique aux ressorts, certes bien huilés, mais sans surprise, Karen Rose connaît la recette mystérieuse pour attraper le lecteur dès le départ, et le laisser en haleine tout au long des 629 pages parfaitement maîtrisées. Il y a ici un vrai savoir-faire et tout ce que nous demandons à un auteur si talentueux, c’est de savoir se renouveler.
A quand le prochain ?
Avis d’Enora
Eve Wilson est une jeune femme au passé lourd, qui a vécu deux événements traumatisants qui l’ont marqué à la fois dans sa chair et dans son psychisme. Quand commence l’histoire (Eve est un personnage introduit dans Don’t tell, non traduit en français), la jeune femme est en train de reprendre sa vie en main. Etudiante en psychologie le jour, elle paie ses études en étant barmaid dans un « bar à flics » le soir.
Son sujet de thèse porte sur l’utilisation du monde virtuel pour asseoir l’estime de soi, pour cela elle a mis en place une étude en double aveugle dans un jeu en ligne, Shadowland. En s’apercevant que certains de ses « cobayes » devenaient des utilisateurs compulsifs et se mettaient en danger, Eve transgresse le protocole en cherchant l’identité de ces joueurs et en s’introduisant elle-même dans le jeu afin de dialoguer avec eux et de les aider.
Mais un jour, une jeune femme disparaît du jeu et Eve apprend quelques temps plus tard qu’elle s’est suicidée. Quand une seconde femme ne se connecte plus, Eve décide d’avertir la police, en sachant qu’elle prend non seulement le risque d’être exclue de l’université mais aussi de se retrouver face à l’inspecteur Noah Webster, un homme qui occupe déjà beaucoup trop ses pensées…
Cette fois ci Karen Rose nous entraine dans les souterrains du monde virtuel et des jeux en ligne. Elle analyse avec finesse comment les personnes qui se sentent paralysés dans le monde réel, arrive à lever leurs inhibitions dans l’univers virtuel, finissant même parfois à confondre les deux et à se mettre en danger.
Ses deux personnages principaux sont des êtres traumatisés : Eve, de part ses agressions s’est d’abord réfugiée dans le monde virtuel grâce auquel elle a pu remonter la pente avant de trouver son moteur de vie dans la relation d’aide. Malgré son enfance difficile, elle a été élevée par des femmes fortes qui lui ont permis de trouver une résilience.
Noah, lui, a perdu sa famille il y a dix ans dans un accident et a noyé sa culpabilité dans l’alcool. Quand l’histoire commence, ils se connaissent et ressentent une attirance mutuelle depuis un an mais aucun des deux n’a jamais franchi le pas, convaincus qu’ils sont de ne pas être capable de vivre une autre histoire d’amour. L’enquête qui va les réunir malgré eux pendant deux semaines, va leur apprendre à s’accepter avec leurs failles et à se faire confiance mutuellement.
Comme toujours chez cet auteur, tous les personnages secondaires sont minutieusement décrits, certains sont nouveaux, d’autres sont d’anciennes connaissances qu’on a plaisir à retrouver. (D’ailleurs je vous conseille ce site, si vous voulez savoir dans quels livres retrouver un personnage que vous appréciez particulièrement, malheureusement tous les romans ne sont pas traduits.
L’intrigue est prenante, avec de nombreux rebondissements et un rythme enlevé qui ne laisse aucun moment de répit au lecteur. Les petits bémols (parce qu’il en est des bons auteurs comme des bons amants, on attend d’eux toujours plus d’imagination et de prouesses à chacune des rencontres) :
1) Le coté catastrophe gigogne qui arrive à l’héroïne, c’est quand même la troisième fois en six ans qu’elle est la cible de détraqués.
2) Le coté un peu lourd et répétitif des incursions des différents personnages secondaires dans la relation entre Noah et Eve qui force cette dernière à expliquer à chaque fois ses réactions (on est loin de l’écriture subtile d’une Amy Mackinnon).
3) Encore un tueur en série…
Mais rassurez-vous , un roman de Karen Rose c’est toujours du bon ! L’auteur a le don de planter dès les premières pages une atmosphère qui piège le lecteur et de façonner des personnages particulièrement réalistes et attachants. A noter que le prochain roman, Silent Scream sortira le 25 mai aux States et qu’on y retrouvera deux des personnages de cette histoire David Hunter et Olivia Mitchell. Olivia, malgré son passé d’enfant maltraitée, saura-t-elle laisser parler son cœur et réussira-t-elle à guérir le jeune pompier de son amour sans espoir pour Dana ?
Fiche technique
Format : broché
Pages : 629
Editeur : Harlequin
Collection : Mira
Sortie 1 mai 2010
Prix : 12,50 €