L’été d’après – Avis +

Présentation de l’éditeur

Deux jeunes sœurs, Nico et Margaret, se laissent dériver sur le lac, sous la chaleur de ce premier dimanche de mai. Alors que la vie s’écoule paresseusement dans ce lieu hors du temps, Nico assiste, sans le savoir, à la noyade de sa sœur aînée.

Inconsciente du drame qui se déroule sous ses yeux, Nico ne peut que subir ce drame aussi soudain que douloureux. La routine paisible d’un quotidien jusque-là bercé par une complicité de tous les jours, une passion commune pour les vieux films en noir et blanc et leurs imitations d’actrices laisse place à la stupeur, à la douleur et à la culpabilité.

L’épreuve du deuil bouleverse une famille qui perd brusquement ses repères. Le père s’isole dans la rédaction de son essai sur la fin des temps et délaisse sa librairie, tandis que sa femme abandonne son piano et divague de plus en plus sous l’emprise de ses antidépresseurs.

La disparition de sa sœur aînée, à la fois proche et modèle, ébranle gravement Nico. Hantée par l’image de Margaret, la jeune adolescente vit dans le souvenir de cette sœur à qui elle commence à s’identifier et même à ressembler étrangement, jusqu’à se laisser embarquer dans des aventures pas tout à fait de son âge…

Dans ce récit à la première personne, Nico, la jeune narratrice, raconte avec une lucidité et un naturel désarmants les différents temps de cet été éprouvant et toute la difficulté qu’elle a à vivre dans l’absence de sa sœur.

Avis d’Enora

L’été d’après est un beau roman, prenant et triste dont le titre original Goldengrove est tiré d’un poème de Gerard Manley Hopkins, Spring and fall, qui traite de la perte de l’innocence au sortir de l’enfance. La jeune fille du poème, Margaret, perçoit la mort pour la première fois en voyant les arbres perdre leurs feuilles en hiver. Cette prise de conscience de la mortalité de l’espèce humaine et de la sienne de ce fait, lui causera une douleur qui sera le premier pas vers la maturité.

Margaret, are you grieving

Over Goldengrove unleaving?

Leaves, like the things of man, you

With your fresh thoughts care for, can you?

Ah! as the heart grows older

It will come to such sights colder

By and by, nor spare a sigh

Though worlds of wanwood leafmeal lie;

And yet you will weep and know why.

Now no matter, child, the name:

Sorrow’s springs are the same.

Nor mouth had, no nor mind, expressed

What heart heard of, ghost guessed:

It is the blight man was born for,

It is Margaret you mourn for.

Nico a treize ans quand disparait sa sœur ainée, elle est à l’âge où elle se cherche, où pour construite sa propre personnalité, elle doit trouver des modèles et s’opposer à d’autres. Mais du coup le processus se grippe, elle se retrouve à materner ses parents isolés dans leur souffrance et à essayer de reconstruire sa famille alors qu’elle-même est rongée par la culpabilité de la mort de cette sœur qu’elle admirait. Cette disparition la rend, de plus, transparente aux yeux des autres puisqu’elle n’est plus pour eux que la sœur de la jeune noyée. Extrêmement vulnérable et seule, elle est inconsciemment entrainée dans un mimétisme qui la détruit et qui est alimentée par la relation glauque que va entretenir avec elle l’ex petit ami de sa sœur. L’éveil de sa sexualité, elle le vivra dans l’identité d’une autre, d’une morte qu’elle n’arrive pas à enterrer et qui la hante.

C’est Nico elle-même qui relate ces événements de nombreuses années après. Ce récit cathartique lui permet de faire remonter les émotions liées aux souvenirs refoulés. Elle se rappelle d’elle comme le vilain petit canard de cette famille où tous sont artistes, où tous sont beaux, elle qui se sentait une âme de scientifique dans un corps encore en chrysalide. Elle se souvient des années terribles pendant lesquelles sa sœur continua à la hanter, jusqu’à ce qu’elle puisse comprendre que Margaret, n’était pas une entité avec le drame de sa mort et que tourner la page ne voulait pas dire oublier sa sœur, mais simplement continuer à vivre .

Roman sur la perte et le deuil qui isole chacun des membres d’une famille dans sa souffrance, c’est aussi une réflexion sur l’adolescence et le passage à la maturité quand le drame parasite les rouages des étapes et du temps. Ecrit à la première personne avec beaucoup de sensibilité, il distille une émotion qui étreint le lecteur tout au long des trois cents pages.

Fiche technique

Format : broché
Pages : 296
Editeur : BakerStreet
Sortie : 7 mai 2009
Prix : 21 €