Girl in a blue dress – Avis +

Résumé de l’éditeur

Alfred Gibson’s funeral has taken place at Westminister Abbey, and his wife of twenty years, Dorothea, has not been invited. The Great Man favours his children and a clandestine mistress over his estranged wife. Dorothea revisits their early courtship before the birth of too many children snapped her vitality, and discovers the devious nature and hypnotic power of this celebrity author. Now she needs to face her grown up children, and worse, her nemesis of ten years, the charming Miss Ricketts. This is a re-telling of the lives of Charles and Catherine Dickens.

Avis de Callixta

Catherine Hogarth, l’épouse délaissée de Charles Dickens avait demandé qu’on conserve les lettres que son époux lui avait adressées afin que tout le monde puisse voir qu’un jour, il l’avait aimée. Gaynor Arnold remplit sans doute cet office en écrivant un fort beau livre sur un couple très librement inspiré de celui formé par Catherine et Charles Dickens. Ici, le grand écrivain se nomme Alfred Gibson et son épouse dont on loue le caractère facile et la silhouette confortable, Dorothea dite Dodo.

Nous sommes en 1870 et Alfred Gibson vient de mourir brutalement à cinquante-huit ans. Dorothea, son épouse répudiée, apprend la nouvelle dans son petit appartement et va faire le point sur sa vie, elle qui n’a même pas le droit de se rendre à l’enterrement. C’est le passé du couple et le présent de la vie de Dorothea que nous allons découvrir dans un roman poignant et superbement écrit. En effet, la mort du grand écrivain va faire basculer la planète pour son entourage immédiat. Comme un astre solaire, il avait organisé la vie des autres, à sa convenance autour de la sienne, obligeant ceux qui voulaient rester auprès de lui à graviter dans son orbite. Impitoyablement, ceux dont ils ne voulaient pas en était rejeté. C’est ce qui était arrivé à Dorothea. La disparition d’Alfred Gibson va provoquer des bouleversements souterrains énormes et obliger chacun à se repositionner.

Le roman est admirablement construit alternant les flash-backs sur la vie commune du couple et les évènements contemporains de la mort de Gibson. Comme un puzzle, le mystère de l’échec de leur relation amoureuse apparaît peu à peu à travers la vision des faits de différents protagonistes. Ce sont les enfants du couple, leurs amis, d’autres membres de la famille ou les souvenirs de quelques scènes marquantes de Dorothea, elle-même. Mais ce sont aussi les lettres et le journal de cet homme qui aimait autant parler qu’écrire.

C’est l’histoire finalement banale d’un couple qui échoue mais avec un de ses membres qui est une sommité dans son pays et dont la mort est un drame national. C’est aussi un écrivain, un artiste, un monstre sacré. Le mot monstre convient bien à ce personnage dont le portrait est bien peu flatteur. Mégalomane, égoïste au plus profond de lui-même mais aussi charmeur et follement amusant, il bouleverse tout sur son passage et provoque très souvent la même réaction chez ceux qui le croisent : une fascination respectueuse et une envie de le servir et de le rendre toujours heureux. Dorothea, jeune fille, ne fera pas exception et toute sa vie, elle aura à cœur de réussir cela, ne parvenant jamais à ne plus aimer cet homme qui l’a pourtant rejetée.

Nous oscillons entre dégoût et pitié devant la réaction des personnages dans un premier temps. Alfred est un manipulateur égoïste particulièrement déplaisant et son épouse d’une faiblesse consternante. Mais peu à peu, les personnages prennent de l’épaisseur, des nuances. Ils apparaissent avec leurs fêlures, leurs fragilités et leurs erreurs. L’émotion l’emporte alors dans ce récit nostalgique mais aussi optimiste.

C’est aussi le portrait romancé d’un écrivain à succès. Gaynor Arnold s’est inspirée d’anectodes véridiques de la vie de Dickens comme son goût pour les lectures publiques de ses œuvres qui l’ont épuisé ou sa liaison avec une actrice qui l’a amené à se séparer officiellement de son épouse. Le talent de l’auteur fait qu’il est difficile de démêler le vrai du faux, l’anecdote véridique du produit de l’imagination de l’auteur. C’est surtout le portrait d’une femme qui ne pouvait être qu’oubliée, sans doute bien ordinaire à côté de son brillant époux, mais tellement humaine et amoureuse qu’elle devait être connue. Gaynor Arnold dépeint ce qui était certainement le quotidien de ces femmes du milieu du dix-neuvième siècle britannique où leurs droits étaient nuls et leur fonction de mère essentielle. La pauvre Dorothea s’épuisera en grossesses même si l’auteur ne lui en impose que huit au lieu des dix supportées par l’épouse de Dickens !

C’est un livre qui laisse une émotion prégnante, la sensation de mieux connaître cette femme et même un petit peu d’optimisme. C’est un très joli livre grave et triste, remarquablement écrit, de plus, par une auteur qui n’a produit que cet ouvrage pour le moment. Un très beau livre sur l’amour qui embellit tout et anoblit les êtres.

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 512
Editeur : Tindal Street Press
Sortie : 14 août 2008
Langue : anglais
Prix : 10,74 €