L’Alliance impie (François 1er et Soliman le Magnifique contre Charles Quint) – Avis +/-

La partie allait se jouer désormais entre Soliman le Magnifique, Charles Quint et François 1er. Les trois souverains, arrivés à la maturité, entraient dans l’étape la plus brillante de leurs règnes respectifs. L’Europe entière – la Seigneurie de Venise, l’Angleterre, les princes allemands, les Pays-Bas et jusqu’au roi de Danemark – sera entraînée dans la tourmente.

Au XVIe siècle Charles Quint empereur des Habsbourg éprouva la volonté de gouverner toute la chrétienté. Légitimement inquiet de telles ambitions, le roi de France François 1er s’avisa que Charles Quint disposait d’un ennemi puissant en la personne du sultan Soliman le Magnifique, d’où un rapprochement entre la France et l’Empire turc. Les liens diplomatiques et militaires de la France avec une puissance musulmane furent bien entendu qualifiés d’Alliance impie par Charles Quint… pendant qu’il négociait avec la Perse contre l’Empire turc.

La période concernée couvre les années 1529 – 1547 durant lesquelles la région méditerranéenne et les Balkans connurent une intense activité : diplomatie secrète, formation d’armées, combats navals, débarquements, raids sur les côtes ennemies. Le récit illustre parfaitement l’époque. Ainsi il est précisé que pour négocier avec Suliman l’envoyé doit être muni d’un sauf-conduit (indispensable sinon l’envoyé perd la tête) et « qu’il soit fort bien garni d’argent et de présents, sinon il ne serait pas le bienvenu ».

On observera que l’auteur[[qui obtint en 2007 le prix Diane Potier-Boès de l’académie française pour L’Âge d’or des Galères en France. Le champ de bataille méditerranéen]] s’intéresse principalement aux personnes. Ainsi est envisagé l’hypothèse d’une connivence entre les deux amiraux des principales flottes ennemies : Barberousse le turc et Andrea Doria au service de Charles Quint. En effet, si l’un éliminait l’autre le rescapé aurait beaucoup moins d’utilité pour son souverain. De plus Andrea Doria coopéra pour une fois avec la flotte vénitienne (ennemie potentielle de Charles Quint). Lors d’une bataille navale qui unissait les deux flottes contre celle de Barberousse, la flotte impériale pris « accidentellement » un retard considérable sur la flotte vénitienne qui fut prise d’assaut par la flotte turque, au moment précis où selon un phénomène assez connu le vent tombait. De ce fait Andrea Doria ne put que constater « amèrement » que le vent étant tombé il ne pouvait intervenir pendant que Barberousse s’emparait des navires vénitiens.

Outre les connivences entre les deux amiraux mercenaires, on observe des querelles personnelles au sein du même camp. Ainsi le comte d’Enghien sera victime d’un « accident » et mourut suite à la chute d’un meuble du premier étage. Une chaise ? Non, un buffet. D’où une question fondamentale : comment peut-on faire tomber accidentellement un buffet par une fenêtre ?

Les personnages sont très humains. Ainsi, tandis que les forces impériales débarquent en force à Tunis, Barberousse furieux décide de massacrer les milliers d’esclaves chrétiens détenus sur place. C’est alors que son adjoint le rais Sinan intervient avec succès et obtint la clémence de Barberousse en évoquant l’utilisation future de ces esclaves comme galériens. Cet intervention n’était donc du qu’à du pragmatisme…Certes on pourrait évoquer des motifs bassement financiers, à savoir que la plupart de ces esclaves étaient la possession personnelle de Sinan. Bien entendu, le fait que parmi tous ces Chrétiens épargnés par Sinan se trouvait une Chrétienne en particulier…et le fait que cette Chrétienne avait donné naissance à un fils… Passons.

En mettant l’accent sur les personnages l’auteur procède à un retour de l’Histoire événementielle, plus humaine que comptable. Parmi les personnages évoqués on remarquera la grande place procurée au capitaine Polin, alias le Baron de la Garde. Ce serviteur de la France, homme de guerre et diplomate, se trouve être d’origine inconnue. L’auteur envisage ici qu’il soit le fils naturel d’Adhémar de Grignan, lieutenant du sénéchal de Provence. Or curieusement Edith Garnier n’évoque même pas l’hypothèse selon laquelle le nom de « Polin » ne serait qu’un surnom provenant de ses origines. En effet à l’époque le mot « poulain » désigne une personne née de l’union d’un Européen avec une orientale. Cette double culture apporterait un avantage indéniable pour aller négocier en territoire musulman.

Fiche Technique

Pages : 304
Format : broché
Edition : Le Félin
Collection : Les Marches du temps
Sortie : juin 2008
Prix : 22 euros