Résumé de l’auteur
Avis de Callixta
Jo Beverley est une auteur qui me surprendra toujours. J’ai cherché, pour rédiger cette critique, ce qui rendait ce livre si agréable à lire et ce qui me donnait une impression de réussite mais on a du mal à trouver exactement ce qui provoquait cette impression d’avoir lu un très bon livre. Je vais tenter toutefois d’apporter des éléments d’explication parce qu’il serait dommage que vous passiez à côté de cet auteur à l’écriture si intelligente.
Tout d’abord, elle écrit des romances Régence parfaitement bien contextualisées. Pas d’anachronismes ni de comportements étranges pour ses personnages. Les thèmes qu’elle aborde sont même d’un classicisme étonnant : une jeune héroïne de vingt ans, fille d’un duc qui passe son temps à aller de couturières en bals et qui, bien sûr est à la recherche d’un mari qu’elle aurait sans doute déjà trouvé si un drame familial n’avait pas reculé son entrée dans le monde. Ainsi est Thea Debenham, fille du puissant duc de Yeovil. Pour celles qui auraient lu les ouvrages antérieurs de Jo Beverley, Thea n’est pas une inconnue, elle est la sœur du héros du roman précédent ( justement à l’origine du grave problème familial) et le livre présente de très nombreux personnages déjà vus auparavant dans l’œuvre de l’auteur. Il est notamment question des Rogues, ce groupe de douze jeunes hommes qui ont passé un pacte d’entraide lors de leurs études et ont eu l’occasion de l’honorer à plusieurs reprises depuis. Ici, ils jouent un rôle important bien que le héros ne soit pas l’un des leurs. Très astucieusement, Jo Beverley a décidé de s’intéresser cette fois, à un exclu du groupe, un membre de l’école jamais admis dans le club et qui depuis, porte une solide rancune aux Rogues et notamment à Dare Debenham le frère de Thea.
Le héros est typique chez cet auteur : Horatio Cave, vicomte de Darien est un personnage sombre, mâle mais intelligent et réservé. Il est inclassable. Ce n’est certainement pas un héros alpha bien qu’il en ait une certaine violence et virilité. C’est un homme tourmenté, au caractère difficile. Ces êtres complexes aussi cérébraux que physiques sont très fréquents dans l’oeuvre de Jo Beverley et elle les réussit fort bien. Cave appartient à une famille maudite : son père et son frères sont devenus fous. Tous deux sont morts mais son frère a commis un jour l’irréparable en tuant sauvagement une jeune aristocrate. Toute sa vie, il a dû vivre avec le poids de la réputation de sa famille. Jeune garçon rendu ombrageux par la douleur, il s’est isolé et a souffert en silence devant l’unité des Rogues. Dare Debenham lui a même trouvé un surnom : Canem Cave, jeu de mot latin sur son nom et qui signifie « Prends garde au chien ». Cette partie rappelant la souffrance d’un enfant qui pèse encore sur l’adulte qu’il est devenu est particulièrement fine et intelligente.
Mais Cave a passé ce stade. Il veut seulement rétablir l’image de sa famille pour assurer l’avenir de son plus jeune frère et a décidé d’un coup pour cela : il va aider Dare Debenham touché par une rumeur terrible et essayé de s’infiltrer dans les bonnes grâces de la puissante famille Yeovil. Il certifie ainsi que Debenham a bien été blessé à Waterloo contrairement à ce que prétend la rumeur qui parle d’un accident n’ayant rien à voir. Le plan marche au delà de toute espérance et il va se rapprocher cyniquement d’abord de Thea, une proie qui lui semble facile.
L’évolution des relations de Thea, la parfaite lady et de Cave le soldat un peu rude et blessé est superbe. Sans grands effets de style ni de rebondissements, Jo Beverley nous démontre comment ces deux êtres dont la liaison a si mal commencé vont s’aimer, comment Cave va peu à peu surmonter ses propres doutes sur lui-même et comment Thea qui se comporte tout le temps de façon raisonnable va savoir prendre des risques. C’est simple, crédible, émouvant et beaucoup plus profond que le laissent penser les bals, soirées musicales et déplacements de châteaux en châteaux. Ce qui permet cette réussite est l’intelligence et la finesse que l’on sent derrière la construction du livre, dans les dialogues très travaillés, et même dans les jeux de mots. Tout sonne juste et toute la gamme des sentiments est balayée : émotion, sourire, colère… Le seul reproche que l’on pourrait faire est une certaine lenteur auquel il faut s’accoutumer et qui, à mon sens, sert le livre mais contraste nettement avec d’autres auteurs qui multiplient rebondissements et situations différentes à chaque page. Jo Beverley se permet même de faire une scène d’une grande sensualité dans un roman qui n’en comporte… qu’une ! Sans changer son style, elle surprend en créant une rencontre discrète entre nos deux héros dans un placard.
Les nombreux romans de Jo Beverley devraient être davantage connus parce qu’ils sont vraiment très fins et très particuliers. Elle a écrit en même temps deux vastes séries. Il semblerait que celle des Rogues arrive à son terme. Mais son prochain roman qui complète une autre série semble prometteur. Et qui sait si elle ne trouvera pas encore un membre de ce groupe de Rogues pour relancer sa série ? On se plaît à attendre encore de nouveaux livres aussi intéressants que celui-ci.
Fiche Technique
Format : poche
Pages : 432
Editeur : Signet Book
Sortie : juin 2007
Langue : anglais
Prix : 5,19 €