Olympe de Gouges et les droits de la femme – Avis +

Mot de l’éditeur

«La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits.» Olympe de Gouges (1714-1792), fille naturelle d’un aristocrate et d’une roturière, est l’auteur de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne en 1791. Toute sa vie elle n’aura de cesse de mener des combats qui ne trouveront leur issue que beaucoup plus tard : pour les droits des orphelins, des enfants naturels, pour le divorce, pour l’éducation des filles, contre l’esclavage, pour la démocratie et, bien sûr, pour le droit de vote des femmes, qu’elles n’obtiendront qu’en 1945.

Belle, libre et intelligente, Olympe de Gouges apprend sous la Révolution le maniement des mots, et publie nombre de pièces de théâtre et textes revendicatifs qui la conduiront à la prison et à la guillotine en 1792.

Avis d’Enora

Le XVIIIe siècle est certainement un tournant pour la place des femmes dans la société. Les précieuses créèrent des salons dans lesquels se réunissaient savants, écrivains et artistes : la première journaliste connue fut Jeanne L’Héritier qui collabora en 1703 au journal L’érudition enjouée ; Madame Leprince Beaumont célèbre auteur de La belle et la bête, fonda Le nouveau magasin français, recueil littéraire et scientifique. L’alphabétisation progresse, les écoles sont ouvertes aux filles, même si dans l’esprit de l’époque, la lecture reste considérée comme dangereuse pour le sexe faible, y compris la Bible, dont la lecture peut être mal comprise !

Marie Gouze, bâtarde de Jean-Jacques Lefranc de Pompignan, fille officielle d’un boucher, est mariée très jeune (à peine quatorze ans !) à un homme du peuple, le sieur Aubry dont elle a un fils, Pierre. A la mort de son époux, elle préfère ne pas se remarier et change son nom pour celui d’Olympe de Gouges, reprenant le prénom de sa mère. En 1767 elle part à Paris où elle vit dans le tourbillon du demi-monde de l’époque. En 1778, elle rencontre Louis-Sébastien Mercier, le «Rousseau du ruisseau», l’auteur des Tableaux de Paris, qui l’encourage à écrire. Elle commence par ses Mémoires qui l’affranchiront de son passé et écrit ensuite une pièce Zamore et Mirza dans laquelle elle prend parti pour l’abolition de l’esclavage. Ses pièces agacent et il lui faut faire face aux railleries, aux critiques et aux humiliations. En 1787, la grande famine envahit la France, Olympe se met à élaborer des réformes sociales. Avec la réunion des Etats Généraux, elle s’installe à Versailles et commence à écrire des articles qui apostrophent les femmes et leur place dans la cité. Elle gravite aux cotés des modérés et défend l’idée de monarchie constitutionnelle. Assistant comme beaucoup de femmes aux séances des Jacobins et de l’Assemblée nationale, elle rencontre Benjamin Franklin et Thomas Paine. Déçue par l’attitude du roi lors de sa fuite à Varennes, elle n’en continue pas moins à prôner la modération et le respect de la constitution. En 1791 elle adresse à la reine sa Déclaration des droits de la femme et de la citoyenneté, un texte visionnaire :

Le 14 juillet 1792, elle défile aux cotés de Theroigne de Méricourt à la tête d’un groupe de femmes, s’attirant de nombreuses critiques. Ses attaques contre Robespierre lui valent d’être molestée plusieurs fois. Sa prise de position contre l’exécution du roi, la condamne. Arrêtée, elle comparait le 2 novembre 1793 devant le tribunal révolutionnaire qui vient de prononcer une interdiction pour les femmes de se rassembler à plus de cinq ! Accusée d’avoir écrit et imprimé des textes portant atteinte à la souveraineté du peuple, elle se défend avec un courage qui impressionne le public mais pas les juges qui la condamneront à la guillotine le 3 novembre 1793. Après sa mort, son fils effrayé, la reniera publiquement. Quelques jours plus tard, Le moniteur publie ces quelques lignes « Olympe de Gouges, née avec une imagination exaltée, pris son délire pour une inspiration de la nature. Elle voulut être un homme d’état, et il semble que la loi ait puni cette conspiratrice d’avoir oublié les vertus qui conviennent à son sexe ».

Au XIXe siècle, ce siècle de grand recul pour la liberté des femmes – le code Napoléon avait inscrit l’inégalité des sexes dans la loi – la bourgeoisie se gaussera de toutes les femmes de la Révolution, les traitant de malades et d’hystériques. Et pourtant Olympe de Gouges ne se contenta pas comme beaucoup de femmes de son époque de témoigner de leur condition, avec Le projet d’un contrat social entre l’homme et la femme, elle écrivit l’indispensable complément à La déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui rappelons le, ne concernait que la moitié de la population !

En 1995, Félix-Marcel Castan a entrepris la publication de ses œuvres complètes : Œuvres complètes d’Olympe de Gouges, Tome I, introduction, notes et tableaux de référence par Félix-Marcel Castan, ouvrage conçu par la graphiste Betty Daël et publié avec le concours du Centre national des Lettres, de la Ville de Montauban et du département de Tarn-et-Garonne, éditions Cocagne, 361 pages.

Fiche technique

Format : poche
Editeur : Pocket
Sortie : décembre 2006
Collection : Pocket Agora
Prix : 6,08 euros