Commissaire Krim – Avis +

Présentation de l’éditeur

Dans ce roman parodique, polar comique rebondissant en formules et gags, Y.B. toujours aussi virtuose et grinçant alterne le « nonsense » à l’anglaise et le détournement des séries télévisées devant lesquelles ses propres personnages s’abrutissent. Divertissement, certes, mais dont les rebonds, de la cité bétonnée aux groupuscules néo-nazis, n’ignorent rien de la politique contemporaine.

Résumé

L’intrigue tient en peu de mots : une jeune femme du nom de Zayneb Bouslimane est retrouvée morte, la tête sauvagement écrasée, à un jet de pierres de sa barre d’immeubles. Zayneb était croyante et voilée. Comme le résume l’auteur, lapidaire : « Cette femme n’avait pas de vie, maintenant elle ne vit plus ». Le commissaire Krim, de la criminelle, musulman non pratiquant, mène l’enquête parmi les islamistes barbus et la « racaille » insouciante de la cité à l’heure du sarkozysme : les suspects se multiplient jusqu’à l’absurde. Le père de la victime ressemblant comme un frère à Ben Laden, on soupçonne même Al Qaïda, «organisation détentrice du monopole du cœur, j’entends par là le monopole d’en faire cesser les battements»…

Avis d’Enora

Dans la lignée d’Allah Superstar, ce livre a plus de points communs avec Samuel Beckett et Boris Vian qu’avec un polar classique ! L’histoire débute par la découverte du corps sans vie d’une jeune maghrébine dont l’enquête est confiée au Commissaire Krim, ténébreux quadragénaire et à son équipe composée, du docteur Pognard, «vampire du dimanche sous un masque de légiste à la petite semaine», du commandant Jambon, un adepte de l’ordre, du psychologue d’urgence Prunier, « qui croule sous le poids de sa science et de sa fausse modestie », de Barbera, que le départ de sa petite amie a laissé avec le cœur brisé et une infection urinaire, du brigadier Jeanne Martel, petite blonde gironde et d’Agathe Cohen, l’ex-gogo danseuse.

Aidé (ou handicapé ?) par son équipe de choc, le Commissaire Krim se lance dans une enquête qui va lui faire croiser des personnes et des groupes, plus déjantés les uns que les autres : comme par exemple, Steve, le fiancé de la victime, qui souffre de dédoublement de personnalité due à sa kleptomanie qui l’amène à voler l’identité des gens qu’il croise…

Entre formules lapidaires, ironie grinçante, humour (plus ou moins lourd) et situations absurdes, YB s’amuse tout en jetant par ci, par là, ses petits coups de griffes personnels :

– Sur le coup de Kärcher, promis par l’ex-premier ministre, « Promu depuis à la plus haute fonction du pays, par la grâce de talonnettes high-tech ».
– Le pouvoir qu’il fasse rire ou pleurer (à croire qu’il a lu ton article, Domino !) « Au bled, le candidat n’a pas besoin de faire la une de Paris Match en maillot de bain sur un yacht avec une femme échappée d’un mauvais Harlequin ! Il lui suffit d’un médecin attentionné et de militaires déterminés »
– Et toujours l’intégrisme qui musèle la liberté d’expression et utilise la désinformation : « L’assassinat des journalistes tel que vous le préconisez, est une tradition islamique, au même titre que celui des moutons, animaux laineux qui du reste, partagent l’instinct grégaire des primitifs chevelus… pour finir, les journalistes c’est comme les préservatifs, il faut savoir s’en servir et tirer la chasse après usage. Et surtout refermez la cuvette des WC avant de flusher, sinon ça revient à s’asperger d’un bouillon de culture ! »

Au total, ne cherchez surtout pas quelques suites logiques à ce livre, laissez-vous simplement portés et malmenés par l’auteur, vous en retirerez un grand plaisir et comme toujours avec YB, quelques bonnes pistes de réflexion.

Fiche Technique

Pages : 270
Format : broché
Editeur Grasset
Sortie : 23 janvier 2008
Prix : 17,90 €