DVD : Dark Horse – Avis +

Résumé du distributeur

Daniel, jeune homme rêveur, pas toujours respectueux des règles et un peu dyslexique, erre dans les rues de Copenhague, son walkman sur les oreilles et gagne sa vie en « graphant » sur des façades d’immeuble les déclarations d’amour qu’on lui commande. Tiraillé entre le fisc, son père indifférent et son meilleur ami Papy qui rêve d’arbitrer des matchs de football, il se laisse porter sur la vague de l’insouciance. Jusqu’au jour où il rencontre Francesca (Franc) qui vit, elle aussi, dans sa bulle et dont il tombe amoureux…

Avis d’Enora

Dagur Kàri, réalisateur, scénariste et musicien islandais s’est fait connaître par un moyen-métrage Lost weekend, suivi d’un long-métrage Noi albinoi qui ont l’un et l’autre reçu de nombreux prix internationaux .

Pour Dark Horse, son second long métrage – Grand Prix du Festival du Film Européen de Bruxelles 2005 – Dagur Kàri a choisi le noir et blanc en hommage aux films des années 60 et particulièrement à celui de Godard Masculin, féminin qui inspira son scénario ; mais le noir et blanc qui sont les couleurs du rêve, renvoient aussi à son personnage principal Daniel qui évolue dans un monde hors des réalités. De plus cette technique lui a permis de mettre l’accent sur l’aspect graphique et d’accentuer le contraste entre l’architecture toute en lignes/angles et les courbes du corps humain, symbolisant ainsi la difficulté d’adaptation de l’être humain dans la société moderne. Un seul plan est en couleurs, le visage de Franc endormie, correspondant à une sorte d’illumination chez Daniel au moment ou tout bascule pour lui.

Le film est découpé en douze parties dont la dernière s’appelle Dark horse. Cette expression chez les turfistes désigne le cheval sur lequel personne n’a parié mais qui gagne une course, ce qui « résume assez bien la journée du personnage principal, Daniel » [[Interview de Dagur Kàri par Mattieu Menossi pour Evene, mars 2007]] Celui-ci, en effet, est un charmant jeune homme qui se vante de n’avoir travaillé que quelques heures dans sa vie, se contentant de peindre sur les murs des déclarations d’amour qu’on lui commande. Incapable de s’adapter aux normes de la société et de prendre des responsabilités, il vit au fil de ses envies, s’échappant dans les préludes de Bach, au volant de sa Fiat 500. C’est en découvrant l’amour avec Franc, une jeune fille paumée dont la mère est nymphomane, que Daniel va changer et grandir « Grandir, c’est trouver le bon équilibre entre responsabilité et envie…si tu n’aspires qu’à satisfaire tes envies, tu oublies souvent tes responsabilités » [[Interview de Dagur Kàri par Mattieu Menossi pour Evene, mars 2007]] La musique a un rôle primordial dans ce film, en effet, Daniel vit en permanence avec un casque audio sur les oreilles. A noter que la BO a été composée par SlowBlow le groupe formé par Dagur Kàri et Orri Jonsson.

Papy est l’antinomie de son ami, il respecte les règles jusqu’à l’exagération (allant jusqu’à revendiquer une contravention) et rêve de devenir arbitre. Avec son physique ingrat et son travail ennuyeux (il pose des électrodes sur des « cobayes » pour étudier les rythmes de sommeil) c’est un être émouvant qui rêve de trouver l’amour. Le ressort comique du film repose essentiellement sur son personnage.

Parallèlement à eux, évolue un juge insomniaque que Daniel rencontrera au cours de son procès. Responsable, marié, père de famille, le juge est un personnage dont les scènes sont majoritairement silencieuses. Son évolution est l’antithèse de celle de Daniel, ses questions d’ordre plutôt existentiel vont l’amener à prendre du recul par rapport à la société de façon dramatique. Le contraste entre les deux hommes est accentué par la mise en place de scènes parallèles (aéroport, hôtel, contenu répandu de la perforatrice). Son rôle est capital car à travers lui, le réalisateur nous fait comprendre qu’il ne cherche en rien à être moralisateur, son but étant juste d’amener à constater et à réfléchir.

Dagur Kàri avec poésie et humour noir, tendresse et sérieux, nous offre dans ce film une réflexion existentielle sur la difficulté d’adaptation de l’individu à la société moderne et sur la complexité du passage à l’âge adulte. « J’aime les films qui nous transportent dans une bulle d’images et de sons » [[Interview de Dagur Kàri par Mattieu Menossi pour Evene, mars 2007]] confie le réalisateur qui réussit effectivement avec cette comédie douce-amère à nous transporter dans son univers ; univers qui m’a renvoyée comme beaucoup de cinéphiles, à quelques films particulièrement réussis de Jim Jarmush comme Stranger Than Paradise c’est dire tout le talent de Dagur Kàri !

Fiche technique

Titre original : Voksne mennesker (Jeunes adultes)

Distributeur : Epicentre Films

Sortie du film : 14 mars 2007

Sortie du DVD : 19 novembre 2007

Caractéristiques du DVD

VO danoise sous-titrée français et anglais, avec en bonus une interview de Dagur Kàri et les scènes coupées présentées par le réalisateur.