Nous nous dirigeons tout droit vers les limites de la résistance physique. Quand on pense que certains auteurs attribuent la conquête du terrain à la seule bravoure des soldats de métier ! Mais alors, que l’on nous explique ce que nous faisons là.
Les livres sur la guerre d’Algérie se concentrent le plus souvent sur l’action des troupes de choc. Ici l’auteur a recensé les témoignages des membres d’un régiment de cavalerie blindé. Délaissant leurs chars de combat pour des motos, des jeeps, des camions, des automitrailleuses et des half-tracks, équipés d’armes plus ou moins modernes, certaines étant antérieures à la guerre mondiale (la première), les cuirassiers allaient combattre pendant des années affrontant les coups de feu, les mines, les bazookas et même les pièces d’artillerie russes de 152 mm servies par des « fells aux yeux bridés »[[à l’époque le camarade Mao avait des visées sur l’Algérie]].
Ce régiment était composé de professionnels, mais aussi de rappelés et d’appelés. Un grand nombre des cuirassiers venaient de la campagne, les militaires s’étant aperçus que les agriculteurs avaient tendance à prendre grand soin du matériel. Accessoirement ils étaient pourvu d’un certain bon sens, comme ce fils de paysan informant son lieutenant que la confiscation du bétail constitue le meilleur moyen de se faire un ennemi mortel !
Dans l’ensemble les cuirassiers eurent de bonnes relations avec la population indigène, ce qui n’était pas le cas avec les Européens. Ainsi, suite à une attaque nocturne du FLN les civils armés se mettent à tirer sur les ombres, c’est à dire les cuirassiers chargés de leur protection qui n’apprécient guère les tirs qui leur ont été destinés. Devant leurs protestations les militaires français se verront interdire de cinéma et de piscine par les autorités civiles locales. Les cuirassiers accompliront leur mission sous le soleil brûlant du désert, la pluie en zone méditerranéenne, la neige en montagne, la pluie de balles, de roquettes, d’obus de mortier et d’artillerie lourde à la frontière tunisienne.
L’un des intérêt de ce livre est de nous éclairer sur un aspect méconnu de la guerre d’Algérie, présentée le plus souvent comme se limitant à des missions de protection, patrouille et ratissage. Or il s’agissait également d’une guerre des frontières, le FLN entraînant et équipant dans les pays voisins des dizaines de milliers d’hommes qui cherchaient régulièrement à franchir le barrage où au contraire simulaient une percée afin d’attirer les militaires français dans une embuscade.
Le putsch de 1961 surprendra le régiment. Le 6° Cuirs étant dans sa presque totalité légaliste, certains de ses membres étant même très enthousiastes envers le général De Gaulle, ce qui apportera quelques désagréments. Ainsi un officier ayant fait peindre une croix de Lorraine sur sa jeep verra son véhicule percuté « accidentellement » par un blindé du 1° Régiment étranger de chasseur. De même un mess imprudemment décoré d’une croix de Lorraine recevra la visite d’une grenade (accidentellement ?).
Fiche Technique
Préface : Général Alain de Saint Salvy
Editeur : Thélès
Sortie : mars 2005
Prix : 22 euros
Inédit, moyen format, 300 pages