Synopsis
Le shérif Guthrie McCabe (James Steward) boit tranquillement une bière sur la terrasse de sa maison quand il voit arriver un groupe de cavaliers dirigé par un vieil ami du sherif, le lieutenant Jim Gary (Richard Widmark). Sur ordre du commandant Frazer (John Meintire), ils doivent récupérer des prisonniers blancs que les Commanches ont capturé durant les dix dernières années, leur famille étant inquiètes à leur sujet. Les deux hommes pénètrent en territoire commanche et négocient le retour de deux colons : une jeune femme Marty Purcell (Shirley Jones) et un adolescent rebelle, contre leurs armes. Le retour chez les pionners sera d’abord triomphal. Mais …
Avis de Luc
John Ford avait 66 ans quand il réalisa Les deux cavaliers. Sa vision idéaliste de l’Amérique et de la conquête de l’Ouest qu’il avait si bien dépeinte auparavant en prend en sacré coup. Le shérif Guthrie McCabe est ici alcoolique et corrompu, ce qui m’a sidéré, alors que dans ses films précédents, le sherif incarnait l’ordre et la droiture. Ces valeurs sont représentées par le lieutenant, intègre, mais cela n’altère pas une sincère amitié entre les deux hommes, montrée dès le début du film par une discussion entre les deux au bord de la rivière qui dure plusieurs minutes, ce qui est étonnant dans un western classique. Le film prend son temps, instaure une ambiance, d’abord chaleureuse, puis devient inquiétante au fur et à mesure de son déroulement.
Le pire est à venir. Quand les deux prisonniers libérés arrivent dans la communauté de Blancs, on s’attend à un retour triomphal. C’est le contraire qui se produit. La « bonne société » blanche montre là toute sa méchanceté, comme dans celle décrite à notre époque dans Edward aux mains d’argent de Tim Burton où le pauvre Johnny Depp est contraint de s’enfuir. Quand je pense qu’on a reproché à John Ford une certaine forme de racisme envers les Indiens et défendu les valeurs de l’Amérique profonde. J’aimerais que ceux qui font ce reproche voient ses derniers films où il montre que les « sauvages » ne sont pas les Indiens. Il finira même sa carrière en réalisant « Les Cheyennes », film pro-indien.
Les deux cavaliers m’a laissé une impression amère, alors que d’habitude, les westerns sont exaltants. Le film est sombre et ne laisse aucune issue à la « bonne société » blanche, finalement plus cruelle que les Indiens.
Il est baigné (comme toujours chez John Ford) d’une profonde humanité, et les deux comédiens principaux, deux vétérans du western (qui tournent là pour la première fois ensemble) : James Stewart, en anti-héros, est génial car en fait, son personnage de shérif corrompu est lucide et ne se fait aucune illusion sur la nature humaine (la fin du film lui donne raison) et est terriblement humain. Richard Widmark (le méchant dans « Le trésor du pendu » de John Sturge) est à l’inverse l’incarnation de l’héroïsme militaire cher à John Ford, et les deux acteurs sont formidables.
John Ford retrouvera Richard Widmark dans « Les Cheyennes », son film ouvertement pro-indien. Quant à James Steward, vraiment génial ici, John Ford tournera six films avec lui (que j’ai très envie de découvrir) dont le célèbre L’homme qui tua Liberty Valance sorti un an plus tard.
« Les deux cavaliers » est vraiment un film à voir !
Fiche Technique
Avec James Stewart, Richard Widmark, Shirley Jones, etc.
Genre : western
Durée : 109 minutes
Année de production : 1961
Titre original : Two Rode Together