Révélés, Révelés de Marie Goussé

Révélés, Révelés – Création artistique contemporaine de Marie Goussé, plasticienne

« Enracinées dans la terre, gardienne de l’histoire enfouie, des installations monumentales de bois et de toiles, verticales et transparentes, fluides et légères, entreprennent un dialogue poétique entre Passé et Présent. »

Démarche

Marie Goussé travaille sur et avec des lieux chargés de mémoire. Elle intervient dans le paysage comme les artistes du Land’art*1, mais son intervention reste minimale :« Le travail ne s’effectue pas sur la nature elle-même mais bien sur les traces de l’homme, sa présence, qui sont des signes à lire Je n’ai pas d’intérêt pour un site si l’homme n’y donne pas sa dimension. »

Dès 1990 pour sa première installation, elle a procédé à la revitalisation d’un espace en forêt, en réalisant des empreintes du sol à l’aide d’encres et de fins papiers, qu’elle a ensuite suspendues aux arbres. Le lieu s’est trouvé animé d’un nouveau souffle, grâce à ces relevés d’une vie éteinte. L’acte de RELEVER lui a fourni depuis un champ d’investigation inépuisable.

À la recherche de l’émotion multi-sensorielle, l’artiste questionne les relations de l’Homme avec l’espace qu’il occupe et le rapport de chacun avec sa propre histoire et le monde environnant.

Rencontre avec le site

Marie Goussé a visité pour la première fois Saint Romain en Gal en 2000. Attirée par le contraste entre l’architecture contemporaine et le site ancien, elle a été séduite par sa situation exceptionnelle face à la ville historique de Vienne, en bordure du fleuve. Elle est ensuite revenue régulièrement « respirer l’âme du lieu » et a pris contact avec le musée pour proposer un projet.

Afin de donner à voir les traces de vie et la mémoire du lieu, le travail s’est élaboré à partir du visage actuel du site et sur les bases des connaissances archéologiques de ce quartier résidentiel de la Vienne antique. Pour la première fois, la couleur (vert olive, ocres, pourpre, safran…) surgit à côté des blancs et écrus qu’elle privilégie habituellement dans ses créations. Elle a été inspirée par la richesse et la variété des tonalités des fresques et mosaïques du musée.

Ainsi, les « Relevés Révélés », en rendant présents les vestiges par la verticalité, interrogent les liens entre patrimoine, paysage et visiteurs. Leur ancrage nous permet de suivre un nouvel itinéraire par une « déambulation du regard, des pieds et de la pensée ».

Les installations

Réparties sur l’ensemble du site, quatre sculptures-assemblages éphémères de bois et de voiles viennent re-marquer visuellement des lignes de force du site, ses limites naturelles ou forgées par l’homme. Elles rendent tangibles des structures visibles ou cachées et évoquent des modes de vie passés.

Temple

Bouleau, voile de gaze de coton blanc. Au fond du théâtre de verdure, devant le musée.

À l’ombre des grands arbres, une chambre de voiles nous invite au repos. L’oeuvre s’est imposée dans son évidence, prenant appui sur les troncs et les dalles de granit dispersées, «ces pierres abandonnées, en attente… entre-deux.»

L’installation s’inscrit dans la lignée des « Carrées », que l’artiste construit au gré de son parcours artistique. Cet abri à structure ouverte, entre portes et fenêtres, signifie le passage de l’homme et ses tentatives d’enracinement.

Fronton triangulaire, blancheur des parois en voiles et intégration aux éléments naturels évoquent aussi les autels domestiques placés souvent au coeur du jardin dans les demeures romaines.

Ce jardin qui relie la maisonnée à la nature, aux Dieux et aux forces cosmiques de l’univers…

Aléas-toiles

Cannes à pêche, toile de spi. En bordure du Rhône, sur la butte du théâtre de verdure. Aux pieds du musée, en arc le long du fleuve, des voiles flamboyantes constituent comme un signal ou un appel à la rive gauche du Rhône, en faisant écho au mouvement des flots et du ciel.

Le choix de l’emplacement, des formes et des sensations colorées puisent directement dans des éléments de la muséographie. Notamment la « maquette des grands entrepôts » de la Vienne antique et « ses bateaux avec leurs voiles de couleurs évoquant la vie grouillante, le commerce, les échanges… »

L’artiste nous offre ainsi « un bouquet de flammes coloré » dont les teintes chatoyantes et les ondulations reflètent les couleurs du Temps.

Colonnes

Perches de bois, toiles de lin, corde.
Sur le terre-plein central

Au centre du site, sur les vastes pelouses qui abritent des vestiges à découvrir, les colonnes se présentent depuis la passerelle du musée dans l’enfilade des colonnes antiques.

Celles-ci signalent sur le site le jardin des vastes demeures gallo-romaines bordé de colonnades (péristyle).

Éparpillées çà et là, elles suggèrent les maisons enfouies… « comme si on pouvait relever les colonnes qui étaient là avant ». Ces lourdes toiles de lin symboliques ne sont pas à « regarder comme des monolithes mais comme des formes évanescentes ».

Il s’agit pour l’artiste d’appuyer les perspectives existantes, de faire vaciller et circuler notre point de vue.

Portes

Perches de bois, tendeur élastique, toile de spi. Le long de la route départementale, dans le prolongement du pont. Constituée d’étoffes rectangulaires parfois superposées, suspendues et libres au vent, l’installation propose un parcours ludique en même temps qu’un jeu d’optique.

Comme un rideau de porte, on peut les franchir en les soulevant.

Bannières ou drapeaux par les formes et les mosaïques de couleurs, les « Portes » marquent la bordure du site et retissent du lien entre Passé et Présent. Elles s’élèvent en effet, là où se dressait le monumental portique antique faisant le lien les Thermes des Lutteurs et ceux du Palais du miroir, ces établissements luxueux de bains publics où se retrouvaient les habitants.

À l’image du costume antique dans lequel on se drape, chacune se révèle un « drap-peau ». « En vous invitant à passer à travers les toiles colorées suspendues de ces « PORTES », je laisse le vent vous habiller furtivement de drapés éphémères. »