Tout ce qui est à toi brûlera – Avis +

Présentation de l’éditeur

Il est son mari, elle est sa prisonnière.
Il l’appelle Jane, mais ce n’est pas son nom.

Thanh Dao a quitté illégalement son Vietnam natal pour rejoindre l’Angleterre, ses universités, sa liberté. Mais le rêve a viré au cauchemar. Personne ne soupçonne qu’elle est là, prisonnière de cette ferme perdue au milieu de nulle part. Personne ne viendra la sauver.

Sept ans que la jeune femme subit les remontrances, les humiliations, les punitions de l’homme qui l’a achetée. Bien sûr, elle a tenté de s’échapper, mais comment fuir ces plaines où le regard porte jusqu’à l’infini ?

Pourtant, aujourd’hui, elle a plus de raisons de lutter que jamais. Il y a cette vie minuscule qui grandit en elle. Et cette femme, cette voisine charmante et naïve venue se présenter un matin. Une étrangère dont Thanh est convaincue qu’elle est porteuse d’espoir…

Avis de Chris

Rarement un titre aura aussi bien porté le contenu d’un roman. Tout ce qui est à toi brûlera est aussi métaphorique que matérialiste.

Thanh Dao est une clandestine et la captive de Leonard, dit Lenn, un homme d’une cinquantaine d’années qui a fait d’elle sa femme. Du moins, dans sa conception du terme « épouse ». Après une énième tentative de fuite soldée par un échec cuisant, Lenn lui demande de se séparer d’un des quatre objets qui restent en sa possession.

Elle choisit alors la photo de ses parents, sans grands remords, car elle avait déjà consenti à la lui donner. Thanh est loin d’être dupe : avec une cheville cassée, extrêmement douloureuse, qui n’a jamais pu être soignée ni guérie en six ans, elle n’avait aucun espoir de franchir les limites de la vaste ferme, posée au milieu de nulle part sur une plaine immense.

Accablée par les réminiscences de la mère décédée de Lenn, elle s’accroche à la vie avec un filigrane d’espoir de liberté, surtout depuis qu’elle se sait enceinte. Plus que jamais, elle doit se sortir de cet enfer. Seulement, comment faire lorsque l’on est surveillé 24/24h, que l’on a perdu toute intimité et identité, que l’on est assommé par des antidouleurs pour chevaux, que chaque incartade au quotidien ritualisé de Lenn conduit à une punition et que l’on a une cheville aussi douloureuse qu’inutile ? L’espoir viendrait-il de la nouvelle voisine, pétillante de vie, qui vient d’emménager à quelques kilomètres de la ferme ?

Will Dean a le talent d’écrire une histoire sombre, mais toujours avec douceur. On s’attache irrémédiablement à Thanh, dès les premiers chapitres où on suit son calvaire. Se mettre à sa place est difficile tant ce qu’elle subit est inconcevable, mais être à ses côtés, lui insuffler un peu de courage pour en finir avec cette vie sans avenir, est tout ce que le lecteur peut lui apporter.

Malgré une écriture sans accro et fluide, il sera parfois compliqué de lire certains passages. On nous prépare même psychologiquement à ce qui risque de se dérouler dans les pages suivantes, à travers des rituels que l’on nous explique au cours de notre lecture. Ainsi, on peut parfaitement faire une pause et reprendre à un moment plus propice, lorsque l’on est plus apte à affronter la réalité atroce de notre héroïne.

Ce huis clos, bien que commun dans l’univers de la fiction, est intense, bouleversant et prend une ampleur grandissante au fur et à mesure de son déroulé. Ecrit à la première personne du singulier, on suit Thanh à travers ses pensées sensées et ses petites touches de sarcasmes qu’elle emploie notamment lorsqu’elle fait mention de la mère de Lenn. Tout ceci concourt au réalisme et à cette impression de vivre de l’intérieur ce supplice.

Dans Tout ce qui est toi brulera, Wil Dean ne réinvente pas le genre du huis clos, il lui offre un renouvellement qu’on aura du mal à oublier.

Fiche technique

Format : broché
Pages : 272
Éditeur : Belfond
Collection : Romans Noirs
Sortie : 24 mars 2022
Prix : 20 €