Parigots…

Le Parisien fait des siennes. Non, il ne s’agit pas du touriste honni qui, pour encore quelques jours, va polluer le littoral et les petits villages par son arrogance légendaire.

Il s’agit du journal. L’ancien « Parisien libéré », quotidien populaire francilien édité à 470 500 exemplaires et qui se décline en plusieurs magazines dont La Parisienne qui sort tous les samedis.

Le Parisien se distingue aujourd’hui non pas par la qualité de ses articles mais par l’assignation d’une blogueuse qui a le mauvais goût, d’une part, d’être parisienne et d’autre part, d’avoir intitulé son blog « the Parisienne ». Un blog qui a 5 ans d’existence et par lequel l’auteur partage ses découvertes en matière de culture, de balade, de shopping…

C’est la vieille histoire de David contre Goliath qui se rejoue ici. Le journal demande la fermeture du blog, le transfert du nom de domaine theparisienne.fr et la somme de 20 000 € de dommages et intérêts.

Ce qui est reproché à cette blogueuse ? La contrefaçon. Elle cite l’assignation : « … le nom de domaine THE PARISIENNE reprend tout d’abord l’élément distinctif dominant de la marque antérieure LA PARISIENNE, savoir le terme « PARISIENNE »».

Nous parlons bien ici d’un litige entre une personne morale dont l’activité est commerciale contre une personne physique dont l’activité est bénévole. En consultant le blog en question, il est évident qu’elle ne cherche en rien à récupérer la notoriété du journal et qu’il n’y a pas d’activité commerciale liée à son activité.

Cette démarche pose de nombreuses questions. D’une façon générale, on a bien du mal à croire que le blog The Parisienne puisse faire de l’ombre au magazine La Parisienne. L’auteur du blog explique par ailleurs que ses tentatives de conciliation se sont soldées par une fin de non recevoir.

Le journal veut en découdre et demande une somme considérable pour un particulier et en ne laissant aucune autre échappatoire que le procès. Même si la blogueuse le gagne, il est probable qu’elle en soit de sa poche, car le paiement des frais d’avocats par la partie déboutée ne couvre généralement pas l’ensemble des frais.

Indépendamment de la licéité de la démarche, Le Parisien fait ici preuve d’une brutalité effarante. Il est difficile de voir une autre intention que celle de casser la créatrice du blog et de la dégoûter à jamais de s’exprimer sur internet.

La démarche est légale ? Oui sans doute. Cela ne l’empêche pas d’être immorale, arrogante et déshonorante pour Le Parisien. On aurait préféré qu’il s’impose par la qualité de ses articles, ou bien encore en proposant une chronique de la jeune femme puisque son blog semble assez bon pour avoir un lectorat régulier.

Onirik étant un webzine bénévole lui aussi, l’équipe de rédaction ne peut que se sentir solidaire de The Parisienne. L’idée d’être un jour confronté à de l’intimidation pure et dure de la part d’une entreprise dotée de moyens que nous n’avons pas est à la fois révoltante et inquiétante.

Elle dessine un monde de ceux qui comptent et ont le droit de s’exprimer et celui de ceux qui ne pèsent rien et qu’on fait taire au travers d’artifices juridiques et procéduraux. C’est le monde d’avant internet où publier était compliqué, cher et réservé à une élite. Cette affaire est bien partie pour provoquer un effet Streisand et c’est tant mieux.

Faire du bruit, s’exprimer, s’indigner, provoquer le débat est la fronde qui nous permet d’abattre des géants. Le Parisien y perdra beaucoup plus que ce qu’il espère gagner avec cette procédure.

En conclusion, la prochaine fois qu’un « 75 » vous refuse la priorité à droite sur vos routes de campagne, consolez-vous en vous disant que le parisien, mieux vaut encore l’avoir comme ça qu’en journal !