La Route des magiciens – Avis +

Présentation officielle

« Je n’ai commencé mon travail sur les Dolce que bien des années plus tard, après avoir revu mon camarade de classe. Vingt ans s’étaient écoulés. Et il n’avait pratiquement pas changé ! D’abord, je crus à une illusion, mais il portait à son cou un pendentif qu’il avait déjà dans notre enfance. Il vieillissait simplement plus lentement que nous. J’ai su à ce moment qu’il était plus important pour moi de comprendre qui il était, que tout autre chose dans la vie. J’avais en face de moi l’un des derniers magiciens au monde… »

Persécutés des siècles durant par les sorciers, ces êtres singuliers ne sont plus qu’une poignée. Cinq exactement. Une famille : les Dolce. La lignée, traquée en permanence, tente depuis des années de se fondre dans la société moderne, et vit pour l’heure dans une bicoque de Brooklyn. Le grand-père n’a plus toute sa tête, le père et la mère exercent des professions sans histoires et les adolescents vont à l’école.

Se faire des amis ne devrait pas être un problème, quand on peut lire dans les pensées. Mais la discrétion qu’ils doivent constamment observer et les déménagements à répétition ne leur facilitent pas la tâche. Ainsi, Leamedia, la cadette, décide-t-elle de s’émanciper : le jour de ses onze ans, elle utilise ses tout nouveaux pouvoirs magiques à très mauvais escient. Son premier sort provoque un désastre.

Repérée par ses redoutables ennemis, la famille doit décamper aussitôt, reprendre à nouveau la route, errer encore sans autre but que de se faire oublier. Sans savoir qu’ils détiennent le secret qui permettrait la régénération d’une planète polluée et rendue hostile aux hommes.

Avis d’Artemis

Voilà un roman jeunesse qui tient de la saga, avec un véritable souffle épique. C’est un livre d’aventures, un récit initiatique, l’histoire d’une famille. L’ouvrage est dense, intense, complexe et nous embarque dans le dernier clan de magiciens, ce qui s’accompagne de légendes et d’un univers imaginaire, le tout étant non dénué d’humour et de vivacité.

Alors certes, certains lecteurs pourront trouver un peu difficile d’entrer dans les premières pages, mais très vite, La route des magiciens devient inlâchable (pardonnez le néologisme !)… D’une part par les personnages auxquels on s’attache bien vite, d’autre part par les situations et péripéties auxquelles cette famille atypique est confrontée.

En effet, lorsque l’on ne vieillit quasiment pas, que la maison vit, respire, bouge, que l’on ne boit pas (ni eau ni rien), que comme dans les Indestructibles[[De Brad Bird, Pixar, 2004]] les enfants ont des pouvoirs physiques et intellectuels hyper-développés, se fondre dans la masse au quotidien n’est pas chose des plus évidentes !

Surtout avec la cadette, en pleine crise d’adolescence, qui est sur le point de voir ses pouvoirs libérés. Et comment résoudre l’équation entre l’envie d’être une famille normale, de développer des relations amicales avec d’autres parents d’élèves, sans se compromettre ?

Et puis il y a le grand-père Melkaridion qui perd un peu la tête et que l’aîné, Anto, doit surveiller, bien que ce dernier préférerait faire de la musique avec son groupe d’amis. A sa décharge, le grand-père en question a tout de même la bagatelle de plusieurs centaines d’années.

Heureusement, sa mémoire est sauvegardée par une petite souris à l’intelligence pointue, Simone, qui rédige les chroniques de la vie de son magicien. L’introduction du doyen dans le roman est particulièrement savoureuse : « […] Melkaridion Dolce, l’ancien de la famille, un vestige sans âge habité d’une intelligence capricieuse et irradiante trouée d’oublis, un être délirant ou extralucide qu’Antonius pilotait chaque dimanche par les rues de Brooklyn et les allées arborées de Prospect Park, conformément aux instructions maternelles. »

Une dimension écologique sous-jacente est aussi joliment traitée tout au long du récit. Une mythologie liée à l’eau est développée (vous n’en saurez pas plus pour conserver la magie de la découverte), tout autant qu’à la nature de manière plus générale. En effet, les magiciens peuvent agir sur les objets en matière naturelle, mais dès que ceux-ci sont en plastique (ou d’un autre matériau fabriqué par l’homme) ou que leur nature est polluée, ils sont impuissants.

Le roman aborde aussi des thèmes tels que l’amitié, la connaissance, le rôle de la mémoire et de la filiation, mais aussi l’amour. Vous l’aurez compris, cette œuvre a de nombreux axes de lecture, chacun s’intégrant parfaitement aux autres et au cours du récit.

La barre est donc très haute avec ce premier tome et la suite est attendue de pied ferme !

Fiche technique

Format : broché
Pages : 535
Editeur : Don Quichotte
Sortie : 3 novembre 2011
Prix : 19,90 €