Ce que nous confions au vent – Avis +

Présentation de l’éditeur

Takeshi, père célibataire, et Yui, qui a tout perdu dans le tsunami de 2011, se retrouvent autour du  » téléphone du vent  » : une cabine téléphonique sur les pentes du mont Kujira-yama réputée pour transmettre des messages aux disparus…

Sur les pentes abruptes du mont Kujira-yama, au milieu d’un immense jardin, se dresse une cabine téléphonique : le Téléphone du vent. Chaque année, des milliers de personnes décrochent le combiné pour confier au vent des messages à destination de leurs proches disparus.

En perdant sa mère et sa fille, emportées par le tsunami de 2011, Yui a perdu le sens de sa vie. C’est pour leur exprimer sa peine qu’elle se rend au mont Kujira-yama, où elle rencontre Takeshi, qui élève seul sa petite fille.
Mais une fois sur place, Yui ne trouve plus ses mots…

Avis de Thérèse

Un titre poétique et intrigant, une ravissante couverture montrant une cabine téléphonique près d’un cerisier en fleurs, voilà qui donne immédiatement envie de découvrir le roman de Laura Imai Messina. Ensuite, il n’y a plus qu’à se laisser porter par ses mots délicats et pleins de pudeur dans un récit peuplé de drames mais rempli de chaleur humaine, de bienveillance et d’espoir.

Yui a perdu sa fille et sa mère lors du tsunami du 11 mars 2011. Un soir, à la radio, sur le thème du deuil, un auditeur parle du Téléphone du Vent, cette cabine téléphonique reliée à rien installée dans un jardin où, à l’aide d’un vieux téléphone noir, on peut confier au vent les mots destinés aux disparus.

Dès le lendemain, elle décide de s’y rendre. Ne se sentant pas capable d’entrer dans la cabine, elle va rencontrer M. Suzuki, le discret mais attentionné gardien du Téléphone du Vent, et Takeshi dont la fille ne parle plus depuis deux ans, depuis que sa mère est morte d’un cancer. Habitant tous les deux Tokyo, à sept heures de voiture du jardin, ils vont prendre l’habitude de s’y rendre régulièrement ensemble. Ils vont tisser des liens entre eux et leurs deuils respectifs, faire des rencontres et découvrir les histoires de certains habitués, Shio, Keita, ce père qui vient insulter son fils décédé…

Yui, Takeshi, M. Suzuki et les autres sont les personnages que Laura Imai Messina nous présente avec beaucoup de tendresse et de pudeur dans son roman, qui touche avec délicatesse et respect aux émotions les plus profondes sans jamais se montrer larmoyant. Mais le Téléphone du Vent existe, créé dans le jardin de Bell Gardia par Itari Sasaki après la catastrophe de 2011 pour permettre à ceux qui en éprouvent le besoin de s’adresser à leurs disparus. Des centaines de personnes s’y rendent chaque année.

Le roman est entrecoupé de courts chapitres constitués de listes : morceaux de musique préférés de tel personnage, confiseries dégustées lors d’un trajet en voiture, sujets dont quelqu’un parle à son chien, petites phrases murmurées dans le Téléphone du Vent, adresse d’une librairie… Une façon de nous rappeler que la vie et les souvenirs sont composés de miettes et de détails du quotidien, et que chacun peut nous relier à ceux qu’on aime.

Laura Imai Messina vit au Japon depuis plus de quinze ans, elle est mariée à un Japonais et mère de deux enfants. Ce que nous confions au vent est son premier roman traduit en français. Elle rappelle à la fin du livre que Bell Gardia et le Téléphone du Vent ne sont pas une destination touristique mais un lieu de recueillement à respecter. Il est difficile de résister à l’envie d’en rechercher des photos sur internet : une cabine téléphonique blanche au milieu d’un jardin, un vieux téléphone noir à cadran (qui n’est relié à rien), un cahier, un stylo… et regarder la photo donne des frissons.

Coup de cœur pour ce roman qui aborde avec énormément de respect et de pudeur, sans pathos, les thèmes du deuil, du chagrin, de la reconstruction, du pardon (à soi-même ou à ceux à qui on reproche d’être partis), de l’importance des rites. Et qui, à une époque où nous vivons cernés de téléphones utilisés souvent pour des futilités, fait d’une cabine téléphonique et d’un téléphone en bakélite un symbole d’espoir et d’amour.

Fiche technique

Format : poche

Pages : ‎240
Éditeur ‏: ‎10/18
Sortie : 5 janvier 2023
Prix : 8,30 €