L’affaire Markovic – Avis +

– Monsieur Delon. Excusez-nous de vous déranger… Nous aurions quelques questions à vous poser, ce sera plus discret ici que si on vous convoque au commissariat, vous comprenez ?

Octobre 1968, les événements de mai s’éloignent. Le pays est redevenu calme, principalement grâce au premier ministre Pompidou qui a négocié avec les syndicats.

À présent, Georges Pompidou a laissé la place à Maurice Couve de Murville. Ce dernier donne pleinement satisfaction au général De Gaulle. En effet, il n’émet jamais d’objections. Ainsi, pour le référendum qui s’annonce, il s’aligne sur la pensée du général De Gaulle, persuadé qu’il l’emportera facilement.

C’est alors qu’est découvert dans une décharge le corps de Stefan Markovic. Ce petit voyou yougoslave exerçait la fonction d’homme à tout faire pour Alain Delon. Suivent alors des affirmations (dont une lettre dépourvue de fautes d’orthographe alors qu’elle a été « rédigée » par un illettré) et une photo truquée impliquant madame Pompidou dans des « parties libertines ». Les autorités sont mises au courant et le nouveau premier ministre Couve de Murville « oublie » d’avertir son prédécesseur.

Alors que les rumeurs se propagent Pompidou se retrouve vite le dernier informé du monde politique. C’est avec stupeur qu’il apprend qu’il aurait rencontré Stefan Markovic chez Alain Delon (chez qui il ne s’est jamais rendu).

La narration ne néglige pas le pittoresque. Ainsi, le truand François Marcantoni, ami d’Alain Delon et suspect du meurtre, commente : « Nous ne sommes que trois à connaître la vérité : Delon, moi et Dieu, or ce dernier ne balance jamais. »

Parallèlement, on voit madame Pompidou allumer une cigarette avec le mégot de son époux et un dénommé Jacques Chirac se précipiter dans un bistrot pour enguirlander le ministre de l’Information au téléphone (et ceci juste avant d’offrir une tournée générale).

Outre l’affaire judiciaire, cet événement aura de graves conséquences pour la politique française. N’étant absolument pas soutenu par le chef de l’État, Pompidou, à l’époque placé en « réserve de la République », ne voit plus de raison de lui obéir.

En janvier 1969, il déclare aux journalistes : « Si le général De Gaulle venait à se retirer, je me porterais candidat à sa succession. » Or, le référendum approche et le général De Gaulle a annoncé qu’en cas de rejet, il quittera ses fonctions. Pour la France, c’était De Gaulle ou le chaos. Mais avec l’annonce de Pompidou la perspective de chaos disparaît. Ce n’est plus De Gaulle ou le chaos, mais De Gaulle ou Pompidou.

Ensuite, le référendum a échoué et l’Histoire a suivi son cours.

Fiche technique

Format : album
Pages : 88
Scénario : Jean-Yves Le Naour
Dessin : Manu Cassier
Éditeur : Bamboo
Collection : Grand Angle
Sortie : 31 août 2022
Prix : 18,90 €