Eroline Martot, grande prêtresse de l’étrange – Avis +

Éditeur ‏: ‎Rouergue jeunesse

roman de Aurélie Magnin

Présentation de l’éditeur

Son nom évoque une folle aux chats dans un manoir hanté. Elle déteste la lumière du soleil. Dans la cour, elle parle toute seule. Sa mère peint des squelettes de chat. Oui, Eroline Martot n’est pas comme les autres. Peut-être parce qu’elle a la faculté de voir les morts. Ce sont d’ailleurs ses seuls amis : Nancy, Maryline, Haidar et son chat Lupin, ça fait du monde et du bruit.

Difficile de paraître normale, de sociabiliser avec les vivants… Alors quand Jackie débarque dans sa classe et semble trouver Eroline absolument parfaite, c’est tout son univers qui vacille.

Fantômes et salle de classe, vie scolaire et caprices d’ectoplasmes, ça y est, la jungle du collège est définitivement paranormale !

Avis de Valérie

Douze ans. Ce n’est plus tout à fait une enfant, et à peine une adolescente. Mais Eroline est plutôt en avance pour son âge. Peut-être a-t-elle mûri plus vite grâce à ses parents singuliers : une mère artiste plasticienne dont la matière première est… des chats morts, et un père professeur de sport pour personnes très âgées. Elle-même se distingue par sa manière de s’habiller et de vivre. Iconoclaste, elle ne rentre pas dans le moule mesquin des filles de son âge, et à l’école, elle est régulièrement harcelée.

Car Eroline parle aux insectes qu’elle garde dans des aquariums dans sa chambre… ainsi qu’aux fantômes qui squattent la pièce. Oui, Eroline voit les revenants et interagit quotidiennement avec eux. Ce sont, finalement, ses seuls amis. Leurs personnalités fortes — souvent marquées par des affaires inachevées — en font des tyrans supplémentaires, mais des tyrans tout de même plus affectueux que les vivants.

C’est le jour de la rentrée : peut-être aura-t-elle une chance de se faire des amis parmi les nouveaux venus, avant qu’on ne les briefe sur ses « manies ». Pas de chance, deux d’entre eux attirent aussitôt l’attention : Blandine, une peste niveau XXL, et Jacky, un garçon qu’elle trouve d’abord sympathique… avant qu’il ne se moque, lui aussi, d’elle.

Avec beaucoup de finesse, Aurélie Magnin déroule une histoire passionnante. Eroline et ses amis sonnent si juste qu’on plonge dans le récit comme si l’on connaissait chacun d’eux. Lorsque la jeune fille se lie enfin d’amitié, sa vivacité et sa créativité s’accordent à la générosité de l’autre, révélant alors les failles cachées de notre (h)éroïne.

La mécanique du harcèlement est particulièrement bien décrite, tout comme ses conséquences parfois funestes. Le jeune lecteur ne peut qu’être pris à partie dans cette escalade de coups bas. Si le roman reste joyeux et atypique, il souligne avant tout la nécessité d’accepter la différence pour créer un tout harmonieux. Avec intelligence, l’autrice propose une vision nuancée du monde adolescent et invite à lutter contre les jugements faciles, souvent source d’exclusion.

On ne s’ennuie pas un seul instant : c’est fin, bien écrit et parfaitement pensé. Le sujet de l’identité de genre y est également abordé avec délicatesse, de l’intérieur. Aucun personnage n’est parfait ; tous apprennent peu à peu le respect, le droit à la différence… et le courage de s’opposer à l’injustice.


Fiche technique

Format : broché
Pages : 208
Éditeur ‏: ‎Rouergue jeunesse
Sortie : ‎1 octobre 2025
Prix : 15,90 €