
Le film de PIL Gam-sung, My daughter is a zombie a fait l’ouverture de cette 20eme édition du Festival du Film Coréen à Paris. Le film a été diffusé une deuxième fois en salle comble ce jeudi 30 octobre 2025 et une session de questions-réponses a suivi la projection ! Attention, des éléments du film sont dévoilés dans cette session.
Présentateur : Je vais lui laisser le premier mot.
PIL Gam-sung (réalisateur) : Bonsoir, je suis Pil Gam-sung, ravi de vous rencontrer. Le français est dur (en français). Le français est très compliqué, je vais m’arrêter là, je suis vraiment très heureux d’être là, dans la ville berceau du cinéma, dans cette même ville qui est Paris, pour moi c’est un très grand honneur d’avoir été invité et en plus qu’il soit sélectionné en film d’ouverture du vingtième anniversaire du FFCP, donc je suis très heureux d’être parmi vous.
Question du public : Bravo pour ce second film qui est très différent du premier qui avait un ton très sérieux, c’est assez incroyable de passer d’un genre à un autre, comment l’idée de ce projet vous est venu et comment avez-vous réussi à changer de ton par rapport à votre premier film1 ?
PIL Gam-sung (réalisateur) : Oui, après mon film Hostage, j’avais également fait un thriller2, je me sentais vidé et à court de création. Je me disais à quel point la création peut finalement m’embêter pour que je trouve une source d’inspiration. J’étais très fatigué et c’est à ce moment-là qu’on m’a proposé d’adapter l’œuvre originale en film. A l’époque, on était vraiment à l’apogée de la pandémie en Corée, je voulais faire ce film, un peu comme une sorte de consolation auprès du public. Il y a donc deux raisons pour lesquelles j’ai fait ce film, c’était une adaptation d’une oeuvre originale, mais cela me permettait de poser deux questions qui me tenaient à coeur : si votre bien-aimé devenait un zombien, comment feriez-vous ? Et la deuxième raison c’est que lorsqu’on sait que son bien-aimé est devenu un zombie, c’est quelque chose d’assez tragique, et je me disais qu’en mettant un côté ludique à cette histoire, quelque chose de gai, cela pourrait devenir un histoire et un film un peu marrant. Donc je me suis un peu lancé ce défi.
Présentateur : Je rappelle à ceux qui ne sont pas au courant, que son premier film était Hostage, qu’on avait passé au festival en 2021, c’était une édition covid avec aucun invité.
Question du public : Merci pour ce superbe film, j’ai aussi beaucoup aimé la fin, j’ai l’impression que vous avez hésité à en faire une fin triste, j’ai aimé cette fin, mais avez-vous hésité et vous êtes revenu dessus ?
PIL Gam-sung (réalisateur) : Je ne dirais pas que je suis allé jusqu’à hésiter, mais c’est vrai que j’avais la volonté de m’orienter vers quelque chose d’assez tragique car lors de la pandémie, quand on y pense, si on ne déclarait pas quelqu’un atteint du covid, ça ressemblait à un crime. Donc ne pas déclarer quelqu’un qui est atteint de zombisme, c’est un crime dans le film, et je voulais montrer que cette famille était plus ou moins punie avec cette fin tragique, et quand le public commence à se dire ça, il peut se dire ensuite qu’il y a encore de l’espoir.
En Corée, l’œuvre originale a eu un succès retentissant et, pour information, la fin c’est que le père meurt. Je pense aussi que c’est pour ça que vous pensez que j’ai hésité, car dans l’oeuvre originale le père meurt et je voulais rajouter quelque chose de différent, donc c’est vraiment une sorte de revirement. Si vous avez ressenti ça, c’est que vous êtes vraiment doué.
Question du public : Merci beaucoup pour ce film qui fait chaud au coeur, concernant l’adaptation du webtoon en film, je voulais savoir comment s’est passé ce processus d’adaptation et le travail avec l’auteur original ?
PIL Gam-sung (réalisateur) : Il n’y a pas eu de collaboration avec l’auteur du webtoon, c’est juste avant le tournage que je lui ai montré le scénario. D’ailleurs, je le voulais pas le lui montrer, j’avais peur qu’il n’aime pas l’adaptation, j’étais très inquiet car j’étais en train de changer la fin de son oeuvre. Finalement, ça a été une grande force pour moi car il était très heureux que je change la fin et il était content de cette fin choisie.
Sinon concernant l’adaptation, j’ai vraiment voulu garder la tonalité du webtoon, par contre j’ai augmenté un peu l’intensité de la volonté du personnage principal. Dans l’œuvre originale, normalement la fille devient un zombie et donc le père l’emmène à la campagne pour essayer d’attendre qu’elle aille un peu mieux. Ici dans le film, la seule différence est que j’ai choisi que le père a comme métier dresseur animalier. Et la différence qu’il y a également, c’est qu’en tant que dresseur animalier, il essaye vraiment d’entrainer sa fille pour qu’elle redevienne humaine, et j’ai aussi rajouté la Kpop et la danse, ce sont les seules différences par rapport au webtoon.




Question du public : En parlant d’amour pour la musique, est-ce que le choix de l’acteur, JO Jung-suk, était une évidence en lien avec cet aspect là, c’est un acteur qu’on connait en tant que père dans son rôle dans Hospital Playlist et c’est quelqu’un qui aime beaucoup la musique. Est-ce que c’est parce que vous aviez cet acteur en tête que ça a influé l’envie d’incorporer la musique dans le film. Et sinon, l’actrice LEE Jung-eun (la grand-mère), beaucoup l’apprécient, et a un immense talent pour la comédie, comment cela s’est passé pour le casting ?
PIL Gam-sung (réalisateur) : Pour l’acteur JO Jung-suk, c’est vrai que tout au long de l’écriture du scénario, j’ai pensé à lui. En fait dans ce film, il y a des scènes qui sont très drôles et qui deviennent ensuite très tristes, au sein d’une même scène. Il fallait une fluidité et un acteur qui puisse avoir une étendue, une variété de sentiments, qu’il puisse changer d’un moment à un autre. Et comme je pensais à lui, naturellement ce sont des éléments qui me sont venus, un père doué en danse et petit à petit, j’ai eu envie de mettre plus de scènes de ce genre.
Et l’actrice LEE Jung-eun, qui joue la grand-mère, c’est vraiment une actrice qui peut jouer n’importe quoi, vraiment, tout est à sa portée. Et j’avais même dit dans une interview coréenne, qu’elle pouvait jouer Batman. C’est une actrice qui a vraiment une intensité incroyable, elle peut jouer tous les genres, tous les rôles. Puis même sur le tournage, elle a vraiment été tellement sympathique, tout le monde était heureux de tourner avec elle, donc maintenant pour mes prochains films, je me dirais « qu’est-ce que je peux trouver comme rôle pour elle ? ».
Question du public : Merci de m’avoir fait rire et pleurer dans la même soirée, ainsi à quel point ça a été difficile de trouver le juste dosage entre l’humour et les moments d’émotion ?
PIL Gam-sung (réalisateur) : C’est exactement la raison pour laquelle je voulais faire ce film, c’était vraiment trouver le juste équilibre, je savais que ça allait être difficile mais c’était un grand défi que je me suis donné. Avant le tournage, on a beaucoup parlé entre l’équipe technique et les acteurs également pour savoir comment on allait pouvoir maitriser tous ces genres mélangés, pour qu’il y ait une fluidité. La première réponse pour moi était qu’il fallait être très réaliste.
Il fallait surtout éviter d’être trop comique dans les scènes qui allaient être de la comédie, mais il ne fallait pas non plus sombrer de trop dans le pathos pour essayer de trouver quelque chose de triste. Le plus important était de rester fidèle à l’histoire, pour les acteurs et pour moi.
Lors de la post-production, pour la couleur, mon technicien avait déjà défini que lorsqu’on voyait les zombies ça allait être un peu froid et sombre. Mais pour moi, je me disais que si le film devait être à des moments comiques, la couleur ne pouvait pas être aussi sombre que cela, car sinon le spectateur ne peut plus vraiment rire. Le technicien me disait que c’était quand même un film de zombies, qu’il y avait besoin de cette tonalité, cette couleur-là. Finalement, je me suis dit qu’on ne pouvait pas réussir une sorte d’harmonie, et donc on ne pouvait pas aller vers ce qui semblait le plus évident.
Question du public : Bonsoir, je me demandais si pour le film, il y avait des recherches qui avaient été faites sur des vrais programmes médicaux qui serviraient à la rééducation du langage, du rapport social aux autres, etc, car j’ai trouvé que tous les éléments là étaient très touchants et très beaux, cette volonté qu’a le père d’essayer de réveiller à la vie, aux autres, à elle-même. On sent que dans la scène où le père est dans la chambre de sa fille, que peut-être « je ne la reverrais plus jamais comme avant », qu’il est énormément peiné car elle semble « enfermée en elle-même ». Donc je me demandais s’il y avait une telle inspiration ?
PIL Gam-sung (réalisateur) : Pour être tout à fait honnête, non, je n’ai pas fait de recherches, mais j’ai une fille qui a pile l’âge, en pleine adolescence et parfois je me dis que c’est un peu un zombie. Parce que c’est ma fille, mais parfois elle a des réactions imprévisibles, donc avant de lui dire quelque chose, je tourne trois fois ma langue en me demandant si je dois vraiment lui dire et en prenant des pincettes.
Lors de la sortie du film en Corée, il y avait eu plusieurs articles disant qu’ici, être un zombie, c’était peut être une allusion à une sorte de maladie, souffrir d’un handicap, d’autisme, ou une métaphore de la puberté, voire Alzheimer. Mais plutôt que de rentrer dans l’aspect technique ou médical, je voulais montrer pas vraiment un zombie, mais une personne autre. Au lieu de discriminer ces gens là, l’idée serait de les accepter tels qu’ils sont.
Finalement on voit que le père, la grand mère, même l’ami qui devient l’oncle de la fille, et la jeune prof qui devient une sorte de tante, et enfin finalement tout le village s’y met. Tout le village attend avec espoir que cette fille redevienne une humaine à part entière. C’est pour montrer que le pouvoir de l’amour peut vaincre n’importe quel obstacle. Donc non, je n’ai pas fait de recherche, mais le message que je cherchais à véhiculer était plus proche de la réalité.
Dernier mot de PIL Gam-sung : Je vous remercie d’être resté très tard pour ce film et pour cette session de questions, d’ailleurs, les questions sont à un tel niveau que je commençais à être de plus en plus nerveux. Merci.
Restranscription de la session de questions-réponses pour Onirik.net, cette dernière se base sur la traductrice de la session.
