Turandot – Avis +

Lieu : Paris

mis en scène par Robert Wilson d’après Giacomo Puccini

Présentation officielle

À Pékin, une princesse renommée pour sa beauté soumet ses prétendants à trois énigmes. Le prince qui saura les résoudre obtiendra sa main et le trône. Hélas ! Jusqu’à présent, tous ont échoué et ont subi la sentence implacable : la mort. Le jeune Calaf réussira-t-il ? Inspiré par une fable de Carlo Gozzi puisant lui-même à plusieurs sources dont les Mille et une nuits, l’ultime opéra de Puccini renoue avec une atmosphère orientale, déjà présente dans Madame Butterfly.

Mais en 1924, année où le compositeur meurt en laissant sa partition inachevée, son écriture a gagné en modernité, sans rien perdre de son invention mélodique, comme en témoigne le célèbre air « Nessun dorma ». Les références à l’Asie ne pouvaient que séduire Robert Wilson dont l’esthétique emprunte au théâtre nô. Sa mise en scène épurée, traversée de touches de commedia dell’arte offre des images saisissantes et hypnotiques.

Avis de Chris

En Chine, l’empereur souhaite marier sa fille Turandot. Cette dernière acceptera la main d’un prince s’il résout trois énigmes. Beaucoup s’y sont essayés, mais tous ont échoué et ont été décapités. Voilà la punition pour ceux qui se croient plus malins que les autres. Vient alors un étranger, tombé amoureux de la princesse, souhaitant tenter sa chance. Il souhaite la conquérir, alors que tout son entourage essaye de le raisonner. Quel sort le destin de cet étranger et celui de la princesse Turandot va leur réserver ?

En trois actes et découpé en deux parties scindées d’un entracte, Turandot a une mise en scène moderne et réfléchie à bien des égards. La première partie d’une heure vingt-cinq, peut paraître un peu longue et manque parfois d’énergie. L’immobilisation des personnages et tableaux rend cet effet plus marqué. Seulement, les interludes du trio de comiques et les prouesses vocales des chanteurs ravivent notre enthousiasme en un rien de temps. La seconde partie, de quarante-cinq minutes, est bien plus diversifiée et l’histoire s’accélère, peut-être même un peu trop par rapport à la première, plus lente.

Même si cet opéra est italien, créé par Giacomo Puccini (1), l’histoire se déroule dans une Chine ancestrale. Inspiré du théâtre de (2) et du théâtre chanté de marionnettes chinois (3), les chanteurs sont particulièrement statiques. On les confond même souvent avec des statues ou des pantins. Mention spéciale aux deux gardes positionnés à chaque extrémité de la scène au début du premier acte. Dès qu’ils ont prouvé leur vivacité, on a compris que le spectacle allait beaucoup jouer avec ce type d’effet, très intéressant et captivant. Rester aussi longtemps dans la même position est un talent indéniable, qui plus est en chantant ou en ne pipant pas mot. Rien n’est laissé au hasard, et chaque mouvement est effectué avec mesure.

De plus, la manière dont les chœurs sont exploités, dans l’ombre, mais toujours sur scène en tant que villageois, est appréciable. Ils font intégralement partie du spectacle ! Quant à la musique, elle sied à merveille au contexte de la Chine impériale. Quelques sonorités asiatiques résonnent dans la salle, accompagnant des moments clés de l’histoire et des scène sur le ton de l’humour. On apprécie d’ailleurs Pong, Pang et Ping – surtout ce dernier – très expressifs, drôles et donnant un dynamisme appréciable à cet opéra très esthétique. Beaucoup de musiques et chants connus se révèlent d’ailleurs à nos oreilles, ravissant les néophytes du genre.

N’oublions pas les costumes et le maquillage ! Un régal pour les yeux. On sent qu’ils ont été étudiés pour ce jeu de lumières, d’ombres et de couleurs très marquées. Ils s’appuient de décors épurés, presque hypnotiques à certains moments.

Turandot mêle la grâce à cette histoire d’amour quelque peu tragique. On émet tout de même une petite frustration quant au destin dramatique de l’un des personnages qui n’aura insufflé que peu de compassion par le peuple et par les personnages principaux. Malgré tout, on salue la troupe entière qui a su émerveiller son public durant deux heures et demi.


(1) Œuvre inachevée en 1924
(2) Forme de théâtre japonais alliant musique, danse et poésie
(3) Jeu d’ombre et de lumière avec plusieurs types de marionnettes
(4) Les rôles principaux sont incarnés par deux à trois chanteurs différents selon les dates. Ceux cités ont interprété leurs personnages le 19 novembre à 14 h 30

Fiche technique

Adresse : Opéra Bastille – place de la Bastille – 75012 Paris
Horaires : du 06 au 29 novembre 2023,14H30 et 20H selon les jours
Tarif : de 15 à 220 €
Metteur en scène : Robert Wilson et Nicola Panzer
Avec Tamara Wilson, Carlo Bosi, Mika Kares, Gregory Kunde, Adriana Gonzales, Florent Mbia, Maciej Kwasnikowski, Nicholas Jones, Guilherm Worms, Hyun-Jong Roh… (4)
Durée : 135 minutes (et 30 minutes d’entracte)