Rencontre avec Ginette Kolinka

Lieu : Drancy

du 2 octobre au 31 décembre 2023

Présentation officielle

Ginette Kolinka, survivante de la Shoah, a été déportée à Auschwitz en avril 1944 à l’âge de 19 ans avec son père, son frère et son neveu. Ces derniers sont assassinés à l’arrivée du convoi. Ginette, elle, est sélectionnée pour le travail.

Durant deux décennies, elle accompagne des groupes à Auschwitz, jusqu’en octobre 2020 où elle accompagne une dernière fois des élèves à Birkenau. Font également partie de cette visite un auteur de bande dessinée et un journaliste. De ce voyage naît une bande dessinée, dans laquelle Ginette raconte ce que fut sa vie avant, pendant et après la Shoah.

Elle témoigne également pour tous ceux qui ne sont pas revenus. Infatigable passeuse de mémoire, elle fait de la transmission aux jeunes générations son combat de tous les jours. À partir des planches de la bande dessinée, l’exposition replace le parcours de Ginette Kolinka dans une histoire plus large de la persécution de Juifs en France pendant la Seconde Guerre mondiale en s’appuyant sur des documents d’époque, archives et photographies.

L’exposition est présentée, du 15 septembre au 21 octobre 2023, à la Maison de la BD de Blois.

Avis de Valérie

Outre l’incroyable destinée de Ginette Kolinka, son infatigable travail au service de la Mémoire, ce qui surprend lorsqu’on la rencontre est cette verve qui n’a rien perdu en force malgré ses 98 printemps.

Elle avait 19 ans lorsqu’elle a été arrêtée par la police française, puis envoyée à Drancy pour prendre un train pour Auschwitz. Elle n’a pas de souvenir du trajet en bétaillère, mais arrivée à destination, elle se remémore avoir poussé son père et son frère à grimper dans le camion de la Croix-Rouge pour qu’ils se reposent tandis qu’elle pouvait marcher jusqu’au camp. Ce qui était bien sûr un subterfuge des nazis pour éliminer immédiatement les plus faibles ou malades, ce qui la poursuivra toute sa vie durant.

Lorsqu’on lui demande quel souvenir elle garde de son incarcération à Drancy, elle surprend en disant qu’elle avait fait la fête avec les autres jeunes juifs présents. Elle n’a jamais pensé que leur destination finale était la mort. Elle ne sait pas si les personnes âgées se doutaient de quoi que ce soit, mais ce qu’elle en avait compris, c’était qu’il y aurait du travail obligatoire, on était en temps de guerre et elle était jeune. Alors que son père soulevait quelques doutes, elle le rassure en affirmant qu’elle et son frère travailleront pour lui et que tout irait bien.

À plusieurs reprises, elle fait part d’une sorte de déni face à ce qu’elle va vivre et qui finalement va lui permette de survivre avec courage. À la libération des camps, elle ne se rappelle rien, elle était atteinte du typhus, et ne raconte que ce qu’on lui a dit, si malade. Elle a été embarquée dans un avion, puis arrivée à Lyon a subi un interrogatoire qu’elle se souvient très désagréable pour s’assurer qu’elle n’est ni un traître, ni une collabo cherchant à passer les mailles du filet.

Elle s’est mariée et a eu un enfant, Richard Kolinka membre fondateur du groupe Téléphone. C’est en 2000 qu’elle a accepté bien malgré elle de se rendre dans les écoles et autres rassemblements pour témoigner de son vécu. Elle avait donné son accord, pour « rendre service » et ne se doutait absolument pas du destin qui l’attendait. Elle se rappelle également qu’alors qu’elle travaillait sur les marchés, une cliente avait vu le chiffre 7 tatoué sur son bras. En rigolant elle lui demande si c’est parce qu’elle ne se rappelle pas de son numéro de téléphone. Ginette se rend compte effarée que bien que la France ait appris ce qui avait été fait aux prisonniers des camps, la population n’en avait rien retenue. Il fallait donc parler, sans cesse.

L’exposition à Drancy retrace le chemin de Ginette depuis son enfance jusqu’à ce jour et elle permet de visualiser par ses yeux pétillants et malicieux ce qu’on a lu dans les livres ou vu à la télé. Elle est si vibrante que JD Morvan et Victor Matet avec l’aide de l’historien Tal Bruttmann ont couché sur planche cette existence hors du commun, en la suivant dans l’un de ses voyages pour Auschwitz, dans une BD qui sonne incroyablement juste.

Lorsqu’on lui a annoncé qu’on allait éditer une bande-dessinée (Albin Michel) sur sa vie, Ginette s’est d’abord énervée, car elle avait en mémoire les Pieds nickelés de sa jeunesse : drôle, irrévérencieux voir vulgaire, bof ! Mais elle s’est ensuite rendu compte de l’incroyable outil de communication que c’était devenu et que cela serait. Et c’est très réussi !

Fiche technique

Date : du 2 octobre au 31 décembre 2023
Tarif : entrée gratuite
Lieu : Mémorial de Drancy niveau -1 – 110-112, avenue Jean Jaurès – 93700 Drancy
Commissariat : Tal Bruttmann, historien, Caroline François, chargée des expositions.
Avec la complicité de JD Morvan et Victor Matet et le regard de Ginette Kolinka.
En partenariat avec les éditions Albin Michel.
Graphisme : Philippe Poirier.

Nos photos de la rencontre avec Ginette Kolinka à Drancy :