Prisonnière de l’île glacée de Trofimovsk – Avis +

Présentation de l’éditeur

Enfouie sous la terre pendant quarante ans, la vérité sur les structures de répression de l’URSS vient frapper la conscience du monde contemporain dans les années 90. Cette vérité, c’est le récit authentique de la déportée Dalia Grinkevičiūtė (1927-1987), arrêtée la nuit du 14 juin 1941, à l’âge de 14 ans, avec son frère et sa mère.

Dalia fera partie des 14 600 Lituaniens qui, sur ordre de Staline, furent brutalement arrachés à leur foyer par les agents de la Tchéka. Emmenés de force dans des wagons à bestiaux, puis par bateau sur l’île gelée de Trofimovsk, au-delà du cercle polaire, ils durent y accomplir des travaux titanesques. Sans vêtements adaptés, sans nourriture ni abris chauffés, ces malheureux étaient voués à une mort certaine.

Les mémoires de Dalia, d’une grande qualité littéraire et rédigés après son évasion avec sa mère en 1949, nous exhortent au souvenir des déportés de toutes nations que le régime stalinien a condamnés sans pitié à une fin solitaire, déshumanisée, tous ces morts dont les traces des tombes ont été effacées par les glaces et les vents de l’ex-Union soviétique.
Traduit en plusieurs langues, ce texte fait désormais partie des oeuvres classiques de la littérature des camps.

Les dessins de Gintautas Martynaitis, rescapé qui s’était lui-même retrouvé dans l’enfer de Trofimovsk à l’âge de 6 ans, illustrent admirablement ce récit.

Avis de Olivier

Ce livre est un monument incontournable de la littérature lituanienne. C’est l’un des rares témoignages des déportations sous Staline. 14 600 Lituaniens sont déportés vers la Sibérie orientale dans les années 41-42, la plupart ne reviendront jamais ; 118 000 autres suivront après guerre.

Ce livre est un étrange voyage dans la folie de ces hommes, qui ont voulu conquérir l’Arctique… au prix de la vie des autres. Cette édition nous offre ensembles deux ouvrages du même auteur. Le livre rédigé par Dalia vers 1975, alors qu’elle est de retour en Lituanie, médecin dans un hôpital de campagne. Et un livre plus ancien, écrit vers 1950, dont le manuscrit a été retrouvé après la mort de Dalia.

On trouve la fougue de la jeunesse et les anecdotes vivantes nées de souvenirs encore très frais dans l’un, les réflexions d’une quinquagénaire meurtrie dans l’autre. On chemine dans un journal intime ou dans des souvenirs soigneusement agencés. Le premier ouvrage décrit surtout la longue nuit de l’hiver 42-43 au delà du cercle polaire, le second raconte aussi la suite de l’histoire jusqu’au retour à un semblant de vie normale, sous l’oeil omniprésent du parti.

La description des conditions de vie des déportés est poignante. Les longues listes de noms, cités de mémoire et accompagnées de commentaires d’amitié, ne nous laissent pas indifférents. On retrouve comme chez Etty Hillesung ou Alexandre Soljenitsyne une réflexion profonde sur ce qui nous donne la force de survivre.

Dalia s’interroge sur la trace laissée par cette poignée de morts, d’un tout petit pays, au moment de la grande hécatombe de la Seconde Guerre mondiale. Et toujours, elle revient à cette certitude : chaque être humain a une valeur et une dignité ineffaçables.

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 336
Editeur : Editions du Rocher
Collection : Mémoire
Sortie : 12 avril 2017
Prix : 21,90 €