Hedi, un vent de liberté – Avis +

Présentation officielle

Kairouan en Tunisie, peu après le printemps arabe.
Hedi est un jeune homme sage et réservé. Passionné de dessin, il travaille sans enthousiasme comme commercial.

Bien que son pays soit en pleine mutation, il reste soumis aux conventions sociales et laisse sa famille prendre les décisions à sa place. Alors que sa mère prépare activement son mariage, son patron l’envoie à Mahdia à la recherche de nouveaux clients.

Hedi y rencontre Rim, animatrice dans un hôtel local, femme indépendante dont la liberté le séduit.

Pour la première fois, il est tenté de prendre sa vie en main.

Avis de Vivi

Le calme avant et après la tempête…

Le générique alterne avec de très gros plans sur le cou d’un homme en train de faire un noeud de cravate. Un homme noué. Hedi. Tout est dit. Un prénom qui signifie le calme. Pas celui de la caméra qui s’agite comme celle des frères Dardenne, coproducteurs du film, travelling avant sur la nuque de notre homme en marche pour faire du surplace, taiseux qui laisse sa mère parler et décider de sa vie à sa place -son mariage avec Khedija, la décoration de leur futur appartement, son argent de poche, son emploi…- et qui s’exprime à travers l’art graphique. Hedi ou la BD silencieuse, l’homme gris qui rêve de feutres de couleur…

Le choix de la longue focale inscrit le personnage dans un décor flou et le léger tremblé de l’image même, quand le plan est censé être fixe, révèle subtilement l’indétermination intérieure du personnage. Belle ironie que de lui attribuer un emploi de commercial sans bagou, qui le conduit tout de même à quitter le fief familial de Kairouan, pour un hôtel de la ville côtière de Mahdia. Là, le calme du baigneur qui se laisse flotter dans la mer étale celui de la contemplation sur la plage, rompu par la sonnerie du portable qui l’oblige à sortir de sa réserve et à mentir…

Rencontre avec Rim (Rym Ben Messaoud, lumineuse), l’animatrice de l’hôtel, libre et indépendante… Une invitation à libérer la parole, les émotions et le corps, jusque là entravé. Le calme trop plat de l’hôtel, qui a plus de personnel que de touristes, dénonce la récession économique qui a suivi la tempête tunisienne et hypothèque l’avenir de la jeune génération. Rester et s’ensabler, partir pour Montpellier avec Rim, un rêve ou un projet? Aller et venir, revérifier le poids de la tradition dans le foyer familial où la seule échappée offerte au couple Hedi/ Khedija est l’espace confiné d’une voiture à l’arrêt, dans laquelle rien ne se passe.

Retourner sur la côte faire exulter les corps, jusqu’à la transe lors d’un spectacle brésilien auxquels assistent des touristes allemands (!), seule scène non préparée, nous a avoué le réalisateur Mohamed Ben Attia qui a su capter au passage la réalité du moment. Et perdre son calme en finissant par « dire ses quatre vérités » à cette mère castratrice… Un vent de liberté va pouvoir enfin souffler…

Pour son premier long-métrage, Mohamed Ben Attia fait preuve d’une grande maîtrise et réussit à nous donner des nouvelles de la Tunisie, coincée entre tradition et modernité, à travers un personnage a priori banal mais que la finesse de jeu de l’acteur Majd Mastoura, sans esbroufe, rend attachant, voire émouvant.

Fiche Technique

Sortie : 28 décembre 2016

Durée : 93 minutes

Avec : Majd Mastoura, Rym Ben Messaoud, Sabah Bouzouita

Genre : drame