La cité sauvage – Avis +

Présentation de l’éditeur

Le 28 août 1963, le jour où Martin Luther King Jr déclara : « I have a dream… » sur les marches du Lincoln Mémorial à Washington, deux femmes blanches furent sauvagement assassinées dans leur appartement de Manhattan.

Ce crime, promptement baptisé « Meurtre des Career Girls » – les deux victimes étant de jeunes employées de bureau -, propagea la peur à travers toute la ville, et déclencha un conflit brutal entre des forces de police profondément corrompues, cyniques et racistes, et une communauté afro-américaine marquée par la détresse économique, la violence et la drogue.

La Cité sauvage s’attache à retracer cet événement crucial et la terrible décennie qui s’ensuivit à travers le parcours de trois hommes : George Whitmore Jr, jeune Noir de dix-neuf ans, pauvre, quasi aveugle, appelé à devenir un bouc émissaire, Bill Phillips, agent effrontément véreux de la police new-yorkaise, à l’origine du plus grand scandale de toute l’histoire du NYPD, et Dhoruba Bin Wahad, membre historique du Black Panther Party, dont l’activisme militant fit l’une des cibles privilégiées des forces de l’ordre municipales et fédérales.

Avis de Linagalatée

Patricia Tolles appelle le commissariat du 22e district de Manhattan. L’appartement qu’elle partage avec Janice Wylie et Emily Hoffer est complètement retourné et vandalisé. L’inspecteur Martin J. Zinkand s’y rend tranquillement pensant à un simple cambriolage, chose très fréquente dans ce quartier huppé près de Madison Avenue.

Janice et Emily ont été retrouvées assassinées, quasiment déchiquetées, par le père de Janice. La scène de crime est insoutenable.

Pendant ce temps Martin Luther King Jr prononce son fameux discours sur l’égalité du peuple noir, contre la répression policière et le droit pour les noirs de voter et d’accéder à des postes intéressants au même titre que les blancs.

Nous sommes le mercredi 28 août 1963.

Georges Withemore Jr vit à Wildwood où les noirs sont très nombreux à avoir trouvé du travail pendant la période estivale. Le père de Georges est allé de petit boulot en petit boulot pour subvenir aux besoins de sa famille mais garde en lui une rancœur contre l’injustice et l’oppression omniprésentes envers son peuple.

Georges n’est pas bête, il a simplement une tellement mauvaise vue qu’il est quasiment aveugle, d’où son entière confiance en ce qu’on lui dit. Il pense que tout le monde est gentil. Las des frasques de son père, il décide de s’installer chez de la famille qu’il a dans le ghetto de Brownsville et d’y trouver du travail.

Dhoruba Bin Wahad est dans une prison du nord de l’Etat de New-York. C’est là qu’il entend parler de Georges Whithemore Jr, de Martin Luther King et Malcom X. Issu d’un gang de noirs, il est déjà malgré ses dix-neuf ans, une « pointure ». Il s’était à un moment engagé dans l’armée et y avait appris le maniement des armes avant d’être renvoyé pour indiscipline notoire.

C’est un excellent documentaire sur les Etats-Unis des années 60 à 70, l’abolition de l’esclavage et l’immigration des anciens esclaves des Etats du Sud vers New-York pour y trouver du travail. Le racisme et le racket au sein du NYPD, où beaucoup de policiers de l’époque doublaient, triplaient, voire plus leur salaire mensuel, où peut importait si le suspect était coupable ou non du moment qu’il était noir et qu’il avait de toute façon avoué sous la contrainte, les crimes les plus abjects.

La révolte des noirs des ghettos contre ces flics, ces pigs[[cochon en anglais]]. Pour ces gangs un bon pig était un pig mort. L’inverse était valable également. Des heurts, des tensions, des assassinats, des guet-apens, tout était bon à prendre pour faire régner la terreur des deux côtés.

Le livre retrace une « erreur judiciaire » pour ne pas dire des aveux montés de toute pièces, celle de Georges Whitemore, de son arrestation sans aucune raison, jusqu’à ses aveux pour deux viols et deux crimes, juste parce qu’il n’en pouvait plus d’être frappé, et les policiers lui avaient dit que s’il avouait, ils se chargeraient de minimiser les chefs d’accusation.

Un injustice qui fait mal, et que n’auront de cesse de défendre ses deux avocats. De jugement en jugement, Georges perd espoir, sombre dans la déprime et l’alcoolisme, mais continue de se battre pour faire reconnaître son innocence.

Malheureusement la tâche sera très difficile, face au racisme qui est profondément ancré dans cette civilisation, et la violence noire face à la police, qui renforce encore plus la haine raciale.

Un seul bémol pour ce documentaire qui fait tout de même 700 pages, c’est la profusion de faits-divers et de dates qui rend sa lecture parfois un peu fastidieuse, même s’il est tout à fait possible de ne pas le lire d’une seule traite.

Sa lecture gagne a être faite en plusieurs fois selon l’humeur du moment. Quoi qu’il en soit, c’est un livre extrêmement intéressant, particulièrement bien documenté et entrecoupé de photos d’époque qui rendent l’immersion encore plus complète.

Fiche technique

Format : poche
Pages : 714
Editeur : 10/18
Collection : Littérature étrangère
Sortie : 20 février 2014
Prix : 9,60 €