Saint-Exupéry Écrivain en guerre – Avis +/-

Saint-Exupéry est désormais désigné comme victime expiatoire à la vindicte des Gaullistes.

Antoine de Saint-Exupéry est considéré comme un écrivain de talent en raison de ses récits sur l’Aéropostale et de son conte Le Petit Prince. Mais son livre Pilote de guerre est peu diffusé. Quant à l’oeuvre de Saint-Exupéry, elle est absente de l’enseignement au profit d’autres auteurs moins engagés comme Jean-Paul Sartre.

Pourtant celui qui survécut à la campagne de 1940 aux commandes d’un avion de reconnaissance, fit campagne aux États-Unis pour l’entrée en guerre des USA et disparut en mission en 1944 fut peu considéré durant la seconde Guerre Mondiale, puis dans l’après-guerre en raison de ses nombreux ennemis.

Le texte de Pilote de guerre paraît en France occupé et ceci malgré la censure allemande. Mais le problème viendra de l’extrême droite française qui voit en Saint-Exupéry « un démocrate, un philosémite et belliciste« . Le plus virulent de ses adversaires étant Pierre-Antoine Cousteau [[dénommé Pierre-André Cousteau dans cet ouvrage]]… le frère de qui vous savez. De ce fait la diffusion de « Pilote de guerre » passa dans la clandestinité.

Aux États-Unis l’ouvrage connut une haine tout aussi virulente, mais « surréaliste » puisqu’elle fut le fait d’André Breton. Quant aux Gaullistes présents de l’autre côté de l’Atlantique ils s’opposèrent non pas à l’oeuvre, mais à l’auteur. Celui qui considérait avec méfiance le Général De Gaulle était suspect de pétainisme puisqu’il n’avait pas rallié le clan gaulliste.

Puis vient le contact avec le général Giraud. Celui que les Américains estimaient plus contrôlable que le général De Gaulle venait en Algérie de procéder à l’arrestation de résistants gaullistes. De même, il ne s’empressa pas d’annuler les lois antisémites de Vichy et maintient l’abolition du décret Crémieux[[Adolphe Crémieux et Léon Gambetta furent les auteurs du décret qui accorda la nationalité française aux 36 000 Juifs d’Algérie]] .

Les écrits de Saint-Exupéry ne mentionne pas cette tendance pétainiste et antisémite de Giraud. Il est vrai que l’écrivain-combattant atteindra très tard l’Afrique du Nord, étant bloqué au Canada par une affaire de visa. Se présentant au général Chambe il commentera « J’ai six mois de retard. C’est la faute aux Gaullistes« . Et pendant plus d’un an, ils s’efforceront d’empêcher de voler celui qui rêvait de retourner au combat.

Finalement après de nombreux efforts et le soutien de ses amis Saint-Exupéry réintégra, malgré son âge, ses blessures et l’opposition des Gaullistes le groupe de reconnaissance 2/33. Il disparut aux commandes d’un P-38 le 31 juillet 1944[[cf. l’ouvrage de Jacques Pradel & Luc Vanrell Saint-Exupéry y l’ultime secret (Édition du Rocher)]]. Il était entré dans la légende.

Mais après-guerre se manifesta l’opposition communiste envers un écrivain de droite et descendant de la noblesse. À sa place c’est Jean-Paul Sartre qui s’imposa dans l’intelligentsia comme dans l’enseignement. N’appartenant ni au clan gaulliste, ni au parti communiste Saint-Exupéry vit sa renommée éclipsée.

La démarche de François Gerber est tranchée. Cependant précisons qu’il ne s’agit pas d’une analyse historique mais d’un essai. L’avantage c’est que l’opinion de l’auteur de Qui a tué Mermoz ?[[édition Prival]] n’est absolument pas nuancée. Il procède avec talent à la réhabilitation d’un écrivain-combattant dénigré.

Ses armes résident dans la présentation des faits historiques et de la biographie des opposants à Antoine de Saint-Exupéry. Ainsi il précise le séjour qu’effectua Jean-Paul Sartre à Berlin en 1933 et 1934. L’auteur de La Nausée était visiblement aveugle sur la nature du régime nazi.

L’examen des faits de guerre de Sartre et de Breton est instructif. On peut qualifier les deux rivaux de Saint-Exupéry de « planqués ». Le contraste avec l’objet de tant de dénigrement est éloquent.

Fiche Technique

Format : broché
Pages : 300
Editeur : Jacob-Duvernet
Sortie : 12 juillet 2012
Prix : 21 €