Séparation – Avis +

Présentation de l’éditeur

« Il me semble que j’avais parlé comme on avance dans le noir. Après tout, il en va souvent ainsi pour la psychanalyse, oui, mais dans certains cas on finirait bien par souhaiter qu’il suffise de s’arrêter de parler pour que le noir cesse.

Parler avait l’air de causer les maladies et les douleurs, mais ce n’était qu’un air ; je savais que c’était aussi le seul moyen de ne pas succomber à celles-ci.

Au fond, voilà, je me séparais de ma mère et j’en étais malade tout le temps ; j’étais comme double. Ou divisée c’est comme on voudra. Disons que je parlais contre mon double malade et endolori, contre le retour à l’état d’enfant que cause la maladie, et ma ténacité à rester cet enfant-là ; je parlais comme ma mère. J’avais pourtant l’impression de commencer à aimer. »

Avis de Claire

Dans l’univers littéraire, très riche et bien fourni, de Nicole Malinconi s’invitent les silhouettes furtives de Marguerite Duras, qui l’avait remarquée, ou encore de Jean Rouaud, qui lui a suggéré un jour d’«écrire au plus près de ce qu’on est».

Conseil suivi visiblement puisque l’auteur se livre ici avec une grande sincérité. Au sortir d’une psychanalyse, la narratrice nous confie ses réflexions et son cheminement personnel. Elle s’interroge sur la portée, la nécessité et la légitimité d’une telle démarche, celle de confier ses pensées les plus secrètes à un inconnu.

Quoi dire ? Tout ce qui passe par la tête sans y penser ? Mûrir un argumentaire nourri et le livrer comme un texte préparé à l’avance ? D’ailleurs, entre écrire et penser, quelle est la part de liberté ?

Les mots sont profonds, sincères, personnels. Troublants même, car pour la narratrice, la psychanalyse c’est « sortir les mots de cet enchevêtrement qui avait été enfoui jusque dans le corps« . On touche à l’intime.

La relation avec la mère semble faussée, les sentiments perdurent, l’enchevêtrement du corps serait-il également l’enchevêtrement du coeur ? C’est décidément un thème récurant, que cette relation difficile mère-fille, par exemple chez Christine Orban ou Nathalie Rheims.

Cet ouvrage fluide et éclairant de Nicole Malinconi se lit comme un témoignage d’une psychanalyse, avec ses travers et ses interrogations, mais surtout avec cette seule certitude, c’est que parfois il faut savoir s’arrêter, savoir renoncer, savoir se laisser aller.

En somme, s’accorder le droit de passer à autre chose. Comme l’avait écrit Marcel Proust[[Un amour de Swann]], ce sont les mots choisis en exergue par l’auteur  » l’absence d’une chose (…) c’est un bouleversement de tout le reste, c’est un état nouveau qu’on ne peut prévoir dans l’ancien« .

Fiche technique

Format : broché
Pages : 143
Editeur : Les Liens qui Lient
Sortie : 22 août 2012
Prix : 15 €