Interview de Bastien Simon

Bastien Simon est un jeune réalisateur lorrain de 24 ans. Il est sur le point de réaliser, après Ceux qui marchent contre le vent, qu’Onirik avait particulièrement aimé, un nouveau court-métrage, intitulé L’Art de la chute.

Comment t’es venue cette passion pour le cinéma ?

J’ai découvert l’univers du cinéma assez tôt grâce à un entourage fortement artistique. J’ai testé le possible et l’impossible avec une première caméra et réalisé toutes sortes de petits films sur le tas en tourné monté.

Explique-nous quelle a été ta formation ?

En 2006, juste après l’obtention du bac, je suis entré en Classe de Mise à Niveau Cinéma Audiovisuel au Lycée Poincaré de Nancy, mais n’éprouvant pas forcément le désir d’entrer dans une école de cinéma traditionnelle ou une école technique, j’ai décidé de faire mes études à l’Ecole Supérieure d’Art de Lorraine à Metz en 2007.

J’ai passé cinq années à découvrir et à me perfectionner dans de nombreux domaines artistiques tels que le dessin, la peinture, la photographie, la sculpture et bien d’autres encore.

Et au niveau pratique ?

Pendant toutes ces années j’ai participé à des expositions, des stages de photographies et de direction d’acteur à Paris, entre autres.

J’ai aussi réalisé quelques documentaires, des captations de voyages de Berlin, New York, Helsinki ou Venise mais aussi une performance en canoë sur 264 kilomètres en compagnie de deux camarades de classe, Julien Matoska et Antoine Debacque.

J’ai continué ma pratique du court-métrage en réalisant notamment «Aujourd’hui 16 janvier…» en 2005, «La traversée du temps» en 2007 ou encore «Ceux qui marchent contre le vent» en 2011. Mes films participent à de nombreux festivals et me permettent de mettre un pas de plus dans le milieu du cinéma.

Donc tu voyages pas mal avec ce métier…

Oui. En 2009 je suis parti en ERASMUS à la HFG de Karlsruhe en Allemagne en section cinéma. De là j’ai réalisé mes premiers clips pour un groupe allemand et français.

J’ai tenté par tous les moyens de rebondir d’un genre à l’autre, d’un média à l’autre, et de raconter des histoires de plus en plus engagées.

Aujourd’hui je réalise mon dixième court-métrage, L’art de la chute en essayant de réunir l’argent nécessaire pour que le projet aboutisse, ce qui est de plus en plus difficile avec les nouvelles réformes et la crise économique actuelle.

Peux-tu nous présenter quelques uns de tes travaux ?

Il y a notamment « Aujourd’hui 16 janvier…« , tourné en 2005, en noir et blanc et qui dure 6 minutes, d’après une nouvelle de Dino Buzzati, avec Philippe Poirot.

« Aujourd’hui 16 janvier j’ai 58 ans, c’est un jour épouvantable, vous aussi un jour vous l’éprouverez… » est extrait du livre de Dino Buzzati du livre « Le K« .

Ce court a été distingué par le Prix de la meilleure réalisation, du meilleur montage et prises de vues au 7e festival de Valbonne en 2005 et aussi le Prix de la meilleure musique originale au festival de St-Maur des Fossés 2005. Il a été sélectionné dans de nombreux festivals.

Et puis, il y a eu aussi « Ceux qui marchent contre le vent« , qui a été beaucoup remarqué et primé…

« Ceux qui marchent contre le vent« , date de 2011 et a été imaginé d’après des textes du livre de François Bon « La douceur dans l’abîme, vies et paroles de sans-abris« , d’Anne Calife « Conte d’asphalte » et de Patrick Declerck « Le sang nouveau est arrivé, l’horreur SDF« .

Il a obtenu pas mal de prix en effet, dont le Prix de la photographie et la mention spéciale jeune aux 20e rencontres régionales de Nancy et le Prix Fujifilm de la meilleure photographie au festival Paris Courts-Devant, à Paris.

Comment se passe la préparation d’un projet, la phase d’écriture, le choix des acteurs, le repérage des lieux, les autorisations de tournage, ce genre de choses ?

Lorsque j’entreprends un projet de court-métrage je passe par une recherche intensive d’histoires à adapter, que ce soient des nouvelles ou des textes d’auteurs.

Lorsque j’ai commencé à travailler sur « Ceux qui marchent contre le vent« , je savais déjà que le thème serait les sans-abri. J’ai donc épluché le maximum de livres abordant le sujet de manière sociologique ou romancée.

De là j’ai découvert quelque très bons auteurs comme Patrick Declerck (sociologue, ethnologue), René Taesch (ancien sans abri de Metz) ou encore Anne Calife (romancière).

Et là seulement, tu commences la phase d’écriture ?

En fait, suivant les éléments que je sélectionne, que ce soient des morceaux de textes ou une nouvelle dans son entier, j’entame l’écriture du scénario.

Ne me considérant nullement comme écrivain, j’adapte de manière politique, sociale et poétique tous ces petits récits. Comme un puzzle, j’assemble les idées pour former un tout.

Il y a aussi le désir d’apprendre, de présenter des aspects de notre société, que l’on connait mal ou pas du tout.

Et puis, il y a le casting …

Oui, ce n’est qu’après cela que je propose l’idée à mes éventuels acteurs comme par exemple Philippe Poirot (professeur à l’Ecole Supérieure d’Art de Lorraine d’Epinal) qui me suit depuis plusieurs années maintenant.

Ce sont avant tout des proches qui m’aident bénévolement et qui n’hésitent pas à partager leur savoir dans les différents domaines.

En technique notamment, sans eux je n’aurais pas fait tous ces petits films. Mes projets étant de plus en plus compliqués à mettre en oeuvre je tente par tous les moyens de me faire aider par des amis et professionnels du métier. Et bien entendu il y a le soutien inconditionnel de la famille, essentiel.

En compagnie de Sophie Kieffer, décoratrice et assistante rencontré depuis peu, nous nous occupons de la logistique et de la technique du film.

Parle-nous du court-métrage qui t’occupe actuellement, L’Art de la chute

Cela demande une très grande préparation en amont, que ce soit pour les recherches de textes, les autorisations de tournages – que j’ai heureusement obtenues – (filmage à l’Opéra théâtre de Metz, la mairie de Metz, une salle de sport, un restaurant, le Centre Pompidou de Metz etc…), les rendez vous avec les acteurs, les repérages un peu partout, la conception et la fabrication décors, des papiers en tout genre ou encore le planning rassemblant les acteurs, techniciens qui travaillent tous en parralèlle pour d’autres projets.

Au final c’est pas loin d’un an de travail pour finaliser le projet. Etant donné qu’il est de plus en plus difficile de trouver de l’argent pour faire un court-métrage, car cela ne rapporte pas, nous devons nous entourer de bénévoles.

La difficulté réside dans le fait que nous devons à côté gagner de l’argent afin de vivre (ou survivre). Il est très difficile de mélanger les deux et cela retarde fortement nos différents projets.

Comment as-tu procédé cette fois-ci ?

Cette année, j’ai décidé de rechercher des subventions afin de pouvoir au moins nourrir et défrayer les personnes participantes. Je suis parrainé par « Envie d’Agir » de la Région Lorraine, le dernier à ce jour en France.

En pleine période de crise économique c’est bien évidemment l’art qui est touché. En Lorraine, c’est pas moins de 700 000 euros qui ont été retirés des caisses après le gel de 6% ordonné par l’Etat. En faisant cela nous centralisons à nouveau fortement le cinéma en région parisienne.

Bastien Simon, merci infiniment d’avoir pris le temps de répondre à ces questions, bonne continuation et bon tournage !

Si vous voulez aider Bastien Simon et participer à L’Art de la chute, rendez-vous sur ce lien.