The Artist – Avis +

Présentation du film

Hollywood 1927. George Valentin est une vedette du cinéma muet à qui tout sourit. L’arrivée des films parlants va le faire sombrer dans l’oubli. Peppy Miller, jeune figurante, va elle, être propulsée au firmament des stars. Ce film raconte l’histoire de leurs destins croisés, ou comment la célébrité, l’orgueil et l’argent peuvent être autant d’obstacles à leur histoire d’amour.

Avis de Marnie

En fait, cela serait peut-être un peu trop résumer notre impression de dire que si vous êtes cinéphiles, courrez-y, si vous êtes cinéphages, passez votre chemin… En effet, le choix bluffant et très osé du réalisateur, Michel Hazanavicius, qui a tenté (et réussi) le pari de tourner un film muet en noir et blanc avec un scénario daté, le tout au premier degré, peut être considéré comme un véritable suicide ou une aventure exceptionnelle et passionnante.

Ainsi, dans la salle de cinéma, nous pouvions trouver en fin de projection, des applaudissements nourris et enthousiastes, des places vides de spectateurs sortis durant le film, des jeunes adultes endormis qui n’avaient jamais vu un seul film muet (ou même en noir et blanc) de toute leur existence et qui n’avaient capté aucune référence, des admirateurs déçus de Jean Dujardin et du second degré des OSS, ne retrouvant pas ce recul ici, mais aussi quelques jeunes séduits par la grâce d’un cinéma que l’on ne pourra plus jamais retrouver.

Il s’agit en fait d’un hommage vibrant, magnifiquement évoqué du cinéma américain des années 20, mais aussi à certains films marquants (mais aujourd’hui assez confidentiels) des années 30, 40 et même 50. En premier lieu, lorsque j’ai demandé autour de moi, de quel film s’inspirait le scénario, il m’a été répondu Chantons sous la pluie, la seule comédie musicale que tout le monde semble avoir vu et qui raconte dans une flamboyante envolée pleines de chansons et de couleur, la naissance du cinéma parlant.

Or, en fait, le scénario reprend librement mais indubitablement le scénario D’Une étoile est née, un film de 1937 (et non pas le formidable remake avec Judy Garland), lui-même s’inspirant de la réelle et dramatique histoire d’amour entre Greta Garbo et John Gilbert, deux stars du muet, le second ne survivant pas ni professionnellement ni même physiquement à l’avènement du parlant.

Après se succèdent des dizaines de clins d’oeil, d’allusions, d’hommages, de références à tout un cinéma disparu. Ainsi Jean Dujardin semble doubler (avec brio) Douglas Fairbanks, et si Bérénice Béjo dit s’être inspirée de Joan Crawford à ses débuts, on pense immédiatement en voyant ses mimiques et son naturel à la première « star » parlante de la comédie musicale : Ruby Keeler et notamment à sa performance dans 42e rue, et les ballets de Bubsy Berkeley.

James Cromwell est un merveilleux Eric Von Strohem dans Sunset Boulevard. Quant à John Goodman, il est le prototype de tous les Meyer ou Warner ayant existé. On sourit lorsque Missi Pyle devient le sosie de Jean Hagen (la méchante de Chantons sous la pluie) et surtout quand Jean Dujardin se moque de la voir chanter au micro (pour ceux qui ne la connaissent pas, c’est une excellente chanteuse…). Quant à l’apparition de Malcolm McDowell, tout amoureux du cinéma de Kubrick ne peut être qu’enchanté !

La dernière star du film est… aussi le troisième personnage de cette romance, le chien. Il n’est autre que le clone du plus célèbre chien du cinéma avant Rintintin, soit Asta, compagnon d’un couple de milliardaires emblématiques (Nick et Nora), une série brillante et joyeusement cynique de romantics suspenses des années 30, The thin man, que l’on peut revoir régulièrement sur les chaînes câblées classiques. Dans les années 70, la télévision s’inspirera d’eux pour la série très médiocre Pour l’amour du risque.

Et encore, cela ne représente que le haut de l’iceberg, nous retrouvons en effet un plan du portrait de Dorian Gray côtoyant une scène de burlesque, ou des Marx Brothers. Il ne manque que Harold Lloyd et sa célèbre et dangereuse scène de l’horloge…

Une des qualités du film est aussi d’avoir su utiliser l’argent à bon escient, dans les effets de foule, les décors hollywoodiens superbement bien travaillés, une impeccable photographie (un travail d’orfèvre), et une musique inspirée de Ludovic Bource qui joue totalement avec le travail de l’époque, puis s’amuse à provoquer quelques ruptures de ton (très Kubrick là-aussi) en plaçant des notes gaies sur des moments tristes ou vice-versa.

Cependant, le moment de bravoure du film dure quelques minutes… juste le moment où tout cinéphile reconnaîtra la plus belle des musiques, le morceau « d’amour » que le génial Bernard Herrmann composera pour Vertigo, le film d’Hitchcock.

C’est un sublime passage mêlant par les images, tragédie, rires, larmes et amour, et qui transporte le spectateur dans un autre univers qui ne nous donne qu’une seule envie, celle de nous replonger dans nos films préférés…

Fiche Technique

Sortie : 12 octobre 2011

Avec Jean Dujardin, Bérénice Bejo, John Goodman, etc.

Genre : comédie dramatique

Durée : 100 minutes

Distributeur : Warner Bros. France