Henry Dunant, l’homme qui inventa le droit humanitaire – Avis +

Présentation de l’éditeur

Le matin du 24 juin 1859, la France et l’Autriche s’affrontent en un combat sanglant aux portes de Solferino. Un jeune commerçant genevois est témoin de la bataille et des souffrances qui lui font cortège. Il racontera trois ans plus tard combien la désorganisation de l’intendance médicale militaire fut fatale à des milliers de soldats, de part et d’autre du front. Hanté par cette vision d’horreur, Dunant n’a de cesse, pendant quatre ans, de faire accepter par les chancelleries son idée d’aide humanitaire, neutre et bénévole en temps de guerre. Et cette œuvre novatrice, pour laquelle il réclame « un haut degré de dévouement » va progressivement s’immiscer dans les consciences et s’étendre à tous les états du monde.

Aussi, en en 1901, pour le premier Prix Nobel de la paix, le nom de Henry Dunant (1828-1910) est naturellement sur toutes les lèvres…même si le fondateur de la Croix-Rouge ne fait pas l’unanimité parmi les pacifistes.

Poursuivi par les créanciers, Dunant s’est refugié dans la solitude et l’anonymat sur les hauteurs du lac de Constance.

Il ne recherche plus que la tranquillité lorsque les projecteurs de Stockholm viennent rappeler au monde ce que fut sa vie…

Avis d’Enora

L’année 2009 est une année importante pour la Croix-Rouge. Elle correspond au cent cinquantième anniversaire du combat qui, en 1859, vit s’affronter à Solferino les armées française, italienne et autrichienne. Une des plus grandes boucheries de tous les temps ! Trois cent cinquante mille hommes se sont affrontés pendant plus d’une journée. Des milliers de morts, plus de douze mille blessés dont la plupart mourront du manque de soin ou…de la soif ! C’est cette vision d’horreur qui fera naitre l’idée, chez un jeune commerçant genevois, Henry Dunant, d’une assistance médicale, neutre, efficace, bénévole pour les blessés de guerre. Bien sûr il ne fut pas le seul à réagir pour que cessent ces carnages, mais c’est lui qui se démena, de Chancellerie en Chancellerie pour faire accepter son idée d’aide humanitaire en temps de guerre.

Sa tâche se heurta non seulement à la difficulté de fédérer les gouvernements autour d’une idée venant d’un comité privé mais aussi à l’opposition des pacifistes qui pensaient que cela cautionnait l’instinct belliqueux des états et qu’il fallait beaucoup mieux s’attaquer à la racine du mal, c’est-à-dire la guerre, pour supprimer à la fois la cause et les effets. La naissance officielle de la Société de secours aux blessés appelée plus généralement la Croix-Rouge (non pas comme signe chrétien mais comme hommage à la Suisse dont le drapeau fédéral avait été récemment adopté) est entérinée le 22 aout 1964. En 1867, Henry Dunant fait faillite et le monde l’abandonne à son sort. Le comité de la Croix-Rouge comme celui de l’Union chrétienne de Genève le poussent à la démission. Ses amis l’abandonnent, certains iront même jusqu’à lui nuire, égarés peut-être par l’ambition et la soif de pouvoir.

Dunant continue malgré tout de se battre pour ses idées : la diminution du nombre des conflits armés, le droit des travailleurs, le traitement des prisonniers de guerre (ses propositions ne seront adoptées qu’en 1906 à la révision de la convention de Genève), un projet de bibliothèque universelle, le repeuplement de la Palestine par le peuple juif, l’arbitrage politique au service de la paix. Malade, oublié, le vieux philanthrope devenu pacifiste militant se réfugie dans la solitude au bord du lac de Constance. C’est le journaliste Georg Baumberger qui, en publiant un entretien qu’il a avec Henry Dunant en 1895, le réhabilitera. Le monde qui le croyait mort, le redécouvre ainsi que son œuvre et ses combats. En 1901 le premier prix Nobel de la paix lui est conjointement attribué avec Fréderic Passy, pacifiste français de la première heure. Il meurt le 30 octobre 1910 à l’hôpital de Heiden.

Gérard A. Jaeger nous offre ici une biographie remarquable, fruit d’un énorme travail de recherches. Mais outre la reconnaissance de cet homme admirable, qui toute sa vie se battit pour l’humanité, cet ouvrage offre aussi une réflexion intéressante sur la naissance du pacifisme et la difficulté de l’engagement humanitaire. En effet, dans quelle mesure le fait d’institutionnaliser la protection des victimes de guerre, ne peut-il être considéré comme une reconnaissance et l’acceptation tacite du recours à la force ? Henry Dunant a voulu exorciser le cauchemar qu’il avait vécu à Solferino à travers l’œuvre de la Croix-Rouge mais ça ne l’a pas empêché d’œuvrer pour la paix, pour sauver ce monde contre ses penchants, son aveuglement et ses justifications péremptoires. A ce que disait en 1973, le prix Nobel de la paix Henry Kissinger, « Un seul homme ne peut accomplir la paix, car celle-ci résulte d’efforts accomplis dans le monde entier et elle ne pourra perdurer que si elle est l’œuvre de l’humanité toute entière », je rajouterais que pour aller dans ce sens, l’humanité a besoin de guides, de philanthropes comme fut cet homme remarquable auquel dans cet ouvrage, Gérard A. Jaeger offre un hommage aussi documenté que mérité.

Fiche technique

Format : broché
Pages : 305
Editeur : L’Archipel
Sortie : 6 mai 2009
Prix : 19,95 €